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CLINICAL STUDIES / ETUDES CLINIQUES
 
DIFFICULTES DE LA PRISE EN CHARGE DE L’EPILEPSIE EN MILIEU RURAL CAMEROUNAIS : LE CAS DE LA LOCALITE DE MBANGASSINA

DIFFICULTIES FACED IN THE MANAGEMENT OF EPILEPSY IN RURAL CAMEROON : THE CASE OF MBANGASSINA LOCALITY


  1. Département de Médecine Interne, Unité de Neurologie, Université de Yaoundé I
  2. Centre Médical d’Arrondissement de Mbangassina
  3. Hôpital Laquitinie de Douala

E-Mail Contact - DONGMO Louis : ldongmo@cm.refer.org


RESUME

Introduction

L’épilepsie est fréquente en Afrique et la majorité des malades vivent en milieu rural où l’accès aux médicaments est difficile , et leur acceptabilité encore inconnue.

Objectif

Le but de ce travail est d’utiliser une médecine de proximité pour évaluer les difficultés de prise en charge des malades épileptiques dans leur milieu naturel.

Méthodologie

Des épileptiques diagnostiqués à l’aide des critères OMS/IENT dans la localité de Mbangassina (Cameroun) , ont été suivis en consultations mensuelles pendant 15 mois de Juin 1999 à Août 2000.Les prescriptions conseillées, la régularité des prises, la réponse thérapeutique, les principaux effets secondaires, les raisons de non compliance, ont été notés. Un algorithme de prise en charge a été construit.

Résultats

125 malades ont été suivis pendant la durée d’étude. 25,6% avaient suivi un traitement traditionnel auparavant. Les médicaments utilisés étaient : le phénobarbital (75,2%),la carbamazépine (15,2%), les phénytoines (3,2%). Le taux de compliance était de 71,2%. La raison de non compliance était financière. Le principal effet secondaire était la somnolence. La rémission complète des crises était observée dans 69,6% des cas, une amélioration partielle dans 16%, et un échec dans 14,4%. Le coût moyen du traitement était de 30,58 CFA/jour. L’activité du personnel médical était bénévole.

Conclusion

La prise en charge des épileptiques en milieu rural est possible à coût abordable. Les résultats sont excellents. Il s’agit cependant d’une organisation qui doit prendre en compte les coûts de déplacement du personnel d’encadrement.

Keywords: Cameroon, Epilepsy, Treatment


ABSTRACT

Introduction

Epilepsy is frequent in Africa and most of the patients live in the rural areas where anti-epileptic drugs (AED) are difficult to find and even when available, might not even be accepted.

Objective

The aim of this study is to employ « proximity » medical practice to evaluate the difficulties faced in the management of epileptic patients in their natural environment.

Patients and Methods

Epileptic patients diagnosed using the WHO/IENT criteria in the Mbangassina area of Cameroon, were followed-up monthly for 15 months from June 1999 to September 2000 in an out-patient consultation. Proposed medical prescriptions, compliance, response to treatment, the main side-effects, reasons for non-compliance were examined. A management algorithm was constructed.

Results

During the study period, 125 patients were followed-up. Out of these, 25.6% had been on traditional treatment before. The AED used were : phenobarbital (75.2%), carbamazepine (15.2%), phenytoines (3.2%). Compliance rate was 71.2%. The main reason for non-compliance was lack of finances. The main side effect was somnolence. Complete remission of seizures was observed in 69.6% of cases, partial improvement in 16% and failure of treatment in 14.4%. The average cost of treatment per patient was 30.58 CFA/day. The medical team involved was voluntary.

Conclusion

The management of epileptic patients in rural areas at affordable cost is possible. The results are excellent. However, this involves an organisation that has to take into consideration the cost of moving the supervising team.

Mots clés : Cameroun, Epilepsie, Traitement

I – INTRODUCTION

L’épilepsie est une affection chronique fréquente dans les pays en développement, notamment en Afrique où sa prévalence varie de 3,43 à 49%0 (p.mille) en Afrique (14,20). Son traitement est long et a pour but ultime le contrôle des crises (3). Une prise en charge précoce et adaptée permet dans les pays développés le contrôle des crises dans 70 à 80% des cas (8). Il est classiquement admis que 80 à 90 % des épileptiques dans le tiers monde n’ont pas accès aux thérapeutiques adaptées. Dans ces pays la prise en charge des malades surtout en zone rurale est rendue difficile par de nombreux facteurs notamment le manque de personnel qualifié et de moyens d’explorations paracliniques pour assurer un diagnostic correct, la non-acceptation des thérapeutiques par les patients du fait de leurs croyances, le coût élevé des médicaments, leur indisponibilité et l’impact psychosocial de la maladie (1,18)
Au Cameroun comme dans la plupart des pays africains l’épilepsie n’est pas inscrite dans la liste des priorités de soins de santé primaires. Très peu d’observations ont donc été consacrées à la conduite pratique de la prise en charge de cette affection, ce malgré l’existence de foyers ruraux de la maladie tel que celui de Bilomo dans la vallée du Mbam où la prévalence est de 49‰ (27).
Nous avons suivi pendant 15 mois des épileptiques selectionnés dans la localité de Mbangassina par une enquête épidémiologique ; Notre but était d’évaluer les difficultés de la prise en charge du patient épileptique dans son milieu naturel par une médecine de proximité .

II – MATERIEL ET METHODES

1) Lieu

La localité de Mbangassina est située dans la vallée du Mbam, à environ 135 Km au nord de Yaoundé. Sa population est d’environ 40 000 personnes. Sur le plan sanitaire, elle est couverte par deux structures sanitaires: une privée catholique, et l’autre publique disposant d’un médecin généraliste. Chacun de ces centres de santé couvre les villages environnants dans un rayon d’environ 15km. Aucune de ces structures ne dispose de moyens d’exploration paracliniques (biologiques, EEG, scanner) pouvant permettre de rechercher une étiologie dans certaines crises d’épilepsie, ou de réaliser les dosages sanguins des médicaments. Les seules pharmacies de la localité sont celles de ces deux centres de santé qui disposent seulement de 4 médicaments antiépileptiques : le phénobarbital, la phénytoine , le diazépam et la carbamazépine.

2) Collecte des données

Elle a été faite de façon prospective sur une période de 15 mois allant de juin 1999 à Août 2000. Les fiches de suivi des patients étaient remplies par un médecin à chaque consultation mensuelle dont bénéficiait chaque épileptique. Les informations recueillies étaients : des éléments d’identification, les antécédents du malade, les résultats de l’examen physique (y compris d’éventuels effets indésirables de médicaments antiépileptiques), des éléments de l’observance thérapeutique et la réponse au traitement

3) Critères d’inclusion

Les patients suivis avaient été préalablement sélectionnés au cours d’une enquête épidémiologique sur la base des critères du protocole de l’Institut d’Epidémiologie neurologique et de Neurologie Tropicale (IENT). Chaque diagnostic avait été confirmé par un neurologue ; qui avait institué un traitement en tenant compte de l’étiologie présomptive attribuée à l’épilepsie sur la base des données anamnestiques et cliniques. Les patients étaient revus mensuellement par une équipe constituée de médecins généralistes et d’un neurologue. Seul ce dernier décidait des modifications du traitement.
Etait inclus tout patient selectionné qui avait participé à au moins deux consultations dans l’un des deux centres de santé concernés.

4) Estimation des coûts du traitement médicamenteux

L’estimation des coûts directs du traitement médicamenteux a été faite par la méthode dite de «bottom – up approach». Méthode consistant à faire une estimation des coûts par extrapolation à partir d’un patient avec des informations obtenues auprès de celui ci et des fournisseurs de ses médicaments.

5) Analyse des données

L’analyse des données a été faite à l’aide du logiciel EPI Info version 6.04 c.

III- RESULTATS

Sur 250 épileptiques suivi dans le cadre du programme de Mbangassina. Seuls 125 de ces patients remplissaient les critères d’inclusion.
L’âge de cette population d’étude variait de 8 à 32 ans avec une moyenne de 17,95 ans. La tranche d’âge de 12 à 15 ans était la plus représentée.
Le sex ratio était de 1,2/1 en faveur du sexe masculin.

Tableau I : répartition des patients par tranche d’âge

Tranches d’âge (années) Nombre de patients (n=125) Pourcentage (%)
8 – 12 9 7,2
12 – 15 38 30,4
16 – 19 32 25,6
20 – 23 31 24,8
24 – 27 9 7,2
28 – 31 5 4,0

58,4% des patients étaient des agriculteurs, 11,2% étaient inactifs essentiellement des enfants et adolescents en âge scolaire.
Le principal facteur de risque de l’épilepsie était un antécédent familial d’épilepsie retrouvé chez 60% de patients.
L’âge de survenue de la maladie se situait entre 10 et 14 ans chez 52,8% des patients. La durée de la maladie était supérieure ou égale à 3 ans dans 77,6% de cas.
Les crises généralisées constituaient le type le plus fréquent soit 94,4% de cas. La forme de crise généralisée la plus fréquentes étaient les crises tonico – cloniques soit 86,4% de cas. Les crises partielles ne représentaient que 4% de cas, et les crises non classées 1%

Tableau II : traitement antiépileptique antérieur au suivi

Type de traitement Nombre de malades (n=125) Pourcentage (%)
Uniquement médical 86 68,8
Uniquement traditionnel 20 16,0
Medical et traditionnel 12 9,6

Avant la période de suivi dans les centres de santé :
78,4% des patients avaient reçu un traitement médicamenteux ;
25,6% avaient eu recours au traitement traditionnel dont les principales modalité étaient les scarifications faciales de localisation malaire uni ou bilatérales, les séances d’exorcisme, les sacrifices à l’eau du fleuve, les décoctions, les palabres avec les lanceurs de sort ;
5,6% n’avaient eu aucun traitement.

Tableau III : répartition des patients selon le type de médicaments utilisés en monothérapie

Medicaments Nombre de patients Pourcentage (%)
Phénobarbital 94 75,2
Carbamazépine 19 15,2

Dans le cadre du suivi, l’option thérapeutique a été la monothérapie dans 93,6% de cas, la bithérapie dans 6,4% de cas. En monothérapie les médicaments utilisés ont ete le phénobarbital chez 75,2% des patients, la carbamazépine chez 15,2% et la phénytoine chez 3,2%.
Le taux de compliance au traitement s’élevait à 71,2% ; la principale raison de non compliance étant le manque de moyens financiers.
Des effets indésirables des médicaments ont été notés chez 16% de patients. Avec comme principal effet indésirable le couple somnolence-ralentissement psychomoteur
Une rémission des crises a été observée chez 69,6% des patients, une diminution de la fréquence chez 16% et une non-amélioration chez 14,4%. Il n’y avait pas de relation statistiquement significative (p>0,05) entre l’âge de début de la maladie et la réponse au traitement, entre la durée de la maladie la réponse au traitement.
Le coût moyen journalier de chaque type de médicament par malade était pour :
le phénobarbital de : 14,58 Francs CFA
la phénytoine de : 1,44 Francs CFA
la carbamazépine de 14,4 Francs CFA
le diazépam de 0,32 Francs CFA
Le coût moyen journalier du traitement médicamenteux par malade était donc de 30,58 Francs CFA

IV – DISCUSSION

La sélection des nos malades avait été faite à l’aide du protocole de l’Institut d’Epidemiologie neurologique et de Neurologie Tropicale (IENT) de Limoges. Protocole incluant les critères de L’Organisation Mondiale de la Santé et de L’ International League Against Epilepsy (ILAE). Aucun d’eux n’a bénéficié d’examens paracliniques tel le scanner ou l’EEG
La régularité aux consultations était souvent perturbée par des facteurs exogènes tels les deuils, les marchés, les grandes pluies et les récoltes. La survenue de crise était cependant un facteur fréquent de demande d’une nouvelle consultation.

Le recours aux tradipraticiens se retrouve en bonne place dans l’arsenal thérapeutique contre l’épilepsie en milieu traditionnel.(5,6) Il s’agit d’une conduite corrélée aux croyances selon lesquelles l’épilepsie aurait des causes surnaturelles. Seuls 25,6% de nos patients ont affirmé avoir eu recours aux pratiques traditionnelles, avant leur suivi hospitalier. Ce qui est modéré , comparé aux 91% rapportés par Tiemagni et Preux dans une étude réalisée en milieu semi – urbain à l’Ouest du Cameroun (in 22). Notre enquête s’est déroulée dans un milieu fortement christianisé, où de telles pratiques sont réprimées et qualifiées de sorcières. Il est fort probable que beaucoup de patients ou leurs parents aient jugé inopportun de dire la vérité à ce sujet. Le nombre élevé de scarifications à but thérapeutique et d’amulettes portées par les patients témoignaient d’une fréquentation bien plus élevées .

Les différents moyens thérapeutiques traditionnels notés ici sont retrouvées ailleurs au Cameroun (22) et dans d’autres pays Africains (6,29).. Si certaines peuvent être rejetées, car dangereuses pour l’intégrité physique de l’individu à l’instar des scarifications et des sacrifices , la phytothérapie nécessite à notre avis une attention particulière, car elle constitue une voie de recours pour des nouvelles thérapeutiques à coût abordable.
Dans les pays en voie de développement, l’accès aux médicaments est très variable passant des zones où elle est pratiquement inexistante, soit 5 à 10% de patients (11) aux régions où elle est très élevée soit 97 % de patients (22). Dans notre étude 68,8% des patients avaient un jour reçu un traitement médicamenteux avant notre consultation , l’origine des prescriptions , variable, allait du médecin au voisin du quartier en passant par d’autres malades. Ce chiffre est élevé par rapport aux 26% décrits par Feksi et al (12) au Kenya , avant l’initiation d’un programme communautaire de contrôle de l’épilepsie. Les principales raisons de cette différence sont : la délivrance d’antiépileptiques par les pharmaciens sans prescription médicale, fréquente au Cameroun (22) ; la livraison à domicile d’antiépileptiques par les vendeurs de médicaments ambulants fréquents dans la région, la présence de médecins dans les centres de santé , la proximité de la route Yaoundé – Bafoussam et le peu d’éloignement par rapport à Yaoundé la capitale du Cameroun.

La monothérapie de première intention est fortement conseillée dans le traitement de l’épilepsie (8). Elle a été adoptée en première intention chez nos patients, mais les modifications ultérieures compte tenu de l’évolution clinique ont amené à ne conserver que 93,6% des cas. Le médicament le plus utilisé était le phénobarbital. C’est selon la Ligue Internationale Contre L’épilepsie, l’antiépileptique de choix dans les pays en développement (4,26). Les auteurs qui le soutiennent évoquent ses nombreux avantages qui sont : bonne efficacité, prix abordable, simplicité (une seule prise par jour), effets secondaires peu nombreux, importante marge entre les taux sériques thérapeutiques et toxiques, cinétique d’élimination linéaire rendant son utilisation facile sans monitoring des taux sanguins médicamenteux (1,24). A l’opposé Shorvon et al. (26) pensent que l’on devrait limiter son utilisation dans la pratique médicale africaine en raison de ses inconvénients : risque de crises de sevrage, parfois d’état de mal qui seraient plus fréquents qu’avec d’autres médicaments , véritable problème dans le contexte d’interruptions fréquentes de l’approvisionnement ou de la non – compliance.
Dans nombre de pays tel le Zimbabwe, l’Inde, le Mali, la République Centrafricaine, la phénytoine est le médicament le plus prescrit (23). Bien que d’efficacité comparable à celle du phénobarbital, la phénytoine est un mauvais choix comme médicament de première intention dans le traitement de l’épilepsie dans les pays en développement. Ceci pour plusieurs raisons :
sa cinétique non linéaire rend difficile la surveillance sans avoir recours aux dosages plasmatiques des concentrations du médicament,
ses nombreux effets secondaires notamment l’hypertrophie gingivale dans des régions où les caries dentaires et les désordres nutritionnels sont fréquents,
son interaction avec de nombreux médicaments comme le praziquantel, largement utilisé pour traiter les parasitoses dans ces pays (28).
Le paquet minimum des antiépileptiques de l’OMS prévoit l’éthosuximide, le valproate et. la carbarmazépine (30). Cependant ils n’ont été que très peu ou pas du tout utilisés ici, en raison du coût pour la carbamazépine et de l’indisponibilité pour le valproate et l’éthosuximide.

Le phenobarbital a donc été le médicament de choix dans la région parce que facilement accessible et nécessitant moins de surveillance.

Classiquement le choix d’un antiépileptique dépend du type de crise, de son efficacité présumée ou potentielle dans ce type de crise, ensuite de sa tolérance et de sa toxicité (8). En zone rurale les contraintes de l’utilisation des médicaments sont innombrables et obligent à mettre en exergue le critère d’accessibilité. Ceci a justifié l’utilisation du phénobarbital en première intention quel que soit le type de crises dans notre étude. Cette utilisation irrationnelle du phénobarbital également relevée par Heaney et al (15), est largement soutenue par beaucoup d’auteurs parmi lesquels Dumas qui affirme: « Boire une eau impure ou non potable peut entraîner la mort, ne pas la boire du tout lorsqu’elle est la seule disponible entraîne obligatoirement la mort. » (17) On pourrait donc l’utiliser en première intention lorsqu’il est le seul disponible tout en surveillant l’efficacité et les effets secondaires.

Le taux de non compliance au traitement antiépileptique varie entre 55 et 82% en Afrique (10). Le taux de compliance remarquablement élevé retrouvé a été favorisé par les nombreux échecs auprès des tradipraticiens ; mais surtout par l’action positive d’éducation menée avant chaque séance de consultation. L’éducation des patients sur leur maladie aurait permis, de faire passer le taux de non compliance au traitement antiépileptique de 15,6% à 2,2% dans un programme d’action communautaire au Zimbabwe (2). Les séances d’éducation impliquant les malades et les familles sont à notre avis des éléments efficaces de lutte contre l’irrégularité thérapeutique.

La pauvreté a été évoquée par Elechi (10), comme raison de non compliance au traitement dans les pays en développement. D’autres auteurs tel Shorvon et al (26) et Ellison et al (11) affirment que le prix des médicaments n’est pas un réel problème dans les pays en développement, certaines familles dépensant parfois plus de 20% de leur budget pour leur santé et réussissant à payer des forfaits incroyablement élevés demandés par les tradipraticiens. Cette affirmation mérite d’être modulée parce que basée sur des données indirectes dans deux pays. La non – compliance au traitement, a largement été attribuée par nos patients aux moyens financiers limités. Mais il existe aussi dans un milieu traditionnel une influence non négligeable des croyances et des facteurs personnels de découragement.

La thérapie antiépileptique a permis le contrôle total de 69,7% des crises dans le cadre de cette étude. Ce taux est largement supérieur à ceux de 17%, 52%, et 67% obtenus respectivement par Ogunniyi (19) au Nigeria, Feksi (13) au Kenya, et Placienca (21) en Equateur ; mais se rapproche des 70 à 80% décrits dans les pays développés (22). Le traitement de l’épilepsie est long et devrait respecter la durée réglementaire de 3 à 5 ans (8). D’où la nécessité pour consolider ces bons résultats de poursuivre ce suivi sans relâche. le taux de rechute reste encore très élevé de l’ordre de 70% après des traitements de courte durée (3) .

Dans cette étude un taux d’échec thérapeutique était de 30,4%. Les facteurs explicatifs suivants ont été notés :
les prescriptions inadaptées, dictées par les contraintes locales,
des possibilités de non compliance inavouées,
une absence de traitement étiologique concomitant dans les épilepsies symptomatiques ; surtout quand on sait que la région est une zone d’endémie d’onchocercose, de trypanosomiase et de cysticercose (27,31). Et qu’à l’examen on a retrouvé des nodules sous – cutanés susceptibles d’être onchocerquiens ou cysticerquiens. Bien que la relation entre l’onchocercose et l’épilepsie ne soit pas clairement établie (9).

Les médicaments constituent l’élément le plus coûteux du traitement antiépileptique (3). Mais avant la prescription médicamenteuse , des dépenses sont nécessaire dans le cadre la démarche diagnostique. Les pertes occasionnées par la maladie épileptique et son traitement ne sont pas facilement chiffrables en milieu rural. Les coûts ne peuvent donc se référer qu’aux prix des médicaments et éventuellement de la journée de consultation du médecin. Les autres frais directs (médicaux : consultations, hospitalisation, explorations ; et non médicaux : aide à domicile, frais de transport jusqu’à l’hôpital), ou indirects (chômage, sous emploi, mortalité) étaient difficilement évaluables dans notre contexte ; ce qui expliquait les coût de traitement très modérés.
Une procédure de calcul prenant en compte les prix des médicaments en officine dans le pays (22) a montré des résultats 4 fois plus élevés. Cette différence, est imputable au conditionnement, à la taxation douanière faite sur ces produits (contrairement aux médicaments génériques à destination hospitalière), et au transport.

Les malades ayant bénéficié de ce suivi ont finalement eu une prise en charge à un coût très abordable, qu’il serait nécessaire de revoir à la hausse, lors de toute entreprise programmée indépendamment de cette étude pilote.

V – CONCLUSION

La prise en charge satisfaisante de l’épilepsie en milieu rural peut – être possible a l’aide de moyens techniques et financiers très limités. Des éléments de minimisation des coûts sont axés sur l’utilisation d’un personnel itinérant et le choix des médicaments financièrement abordables.


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