AJNS
NEUROEPIDEMIOLOGY / NEUROEPIDEMIOLOGIE
 
LES ASPECTS EPIDEMIOLOGIQUES ET CLINIQUES DES EPILEPSIES DU NOURISSON ET DU JEUNE ENFANT

CLINICAL AND EPIDEMIOLOGICAL ASPECTS OF EPILEPSY IN INFANTS AND CHILDREN


  1. Centre Neuropsychopathologique du Mont-Amba (CNPP), Universite de Kinshasa République Démocratique du Congo (RDC)

E-Mail Contact - KASHAMA W.K. :


RESUME

Pour commencer la recherche sur les épilepsies du nourrisson et du jeune enfant dans notre Centre, nous analysons rétrospectivement sur une periode d’une année, les facteurs biomedicaux et socio-demographiques associes a cette pathologic.
L’age,le sexe, le rang de naissance, la taille de la fratrie et le groupe ethnique des enfants ainsi que lu2019âge, de début des crises, les facteurs étiologiques et les signes cliniques associés sont les données étudiées.
Les résultats de notre étude corroborent bien de données de l’épidemiologie des épilepsies infantiles et présentent quelques particularités en rapport avec notre milieu d’étude.

Mots cles: Afrique, Epilepsie, pédiatrie


SUMMARY

To study the problems related to paediatric epilepsy up to the age of seven years, a retrograde research of one year has been done considering the bio-medical and socio-demographic factors related of this pathology. Age, sex, birth order, family size and ethnic group of the children as well as the age of onset of seizures, etiologic factors and clinical features has been taken into account. The findings of this research are similar to the epidemiological data of epilepsy in children, though showing some particularities related to the area of this particular study.

Keywords : Africa, paediatric, epilepsy, tropics

INTRODUCTION

L’epilepsie est un probleme majeur de sante qui touche 1% de la population mondiale (13), avec des taux plus eleves de 1,5, a 5% dans les pays en voie de developpement (11). Les sept premieres annees de la vie constituent la periode de plus grande predilection (9).
Dans notre Centre, pres de 6 enfants sur 10 ages de 7 ans souf&ent d’epilepsie(lO), ce qui fait de cette pathologic une priorite de recherche pour cette tranche d’age. Prelude a cette recherche, notre etude se propose de determiner les facteurs socio-demographiques et les contextes etiologiques associes a cette affection et les aspects cliniques qu’elle revet.

METHODOLOGIE

Notre etude est restrospective et porte sur les dossiers des enfants d’age inferieur a 7 ans soignes dans notre Centre pour la premiere fois au courant de I’annee 1989.
Deux groupes d’age sont distingues, nous designons nourrisson (NS), les enfants ages de moins de 3 ans, jeune enfant ou enfant en age prescolaire (APS) ceux de 3 ans a moins de 7 ans.Le diagnostic d’pilepsie est electroclinique pour des phenomenes paroxystiques recurrents convulsifs ou non ayant ete justiciables d’un traitement anticomitial, L’analyse des donnees suivantes ont fait I’objet de notre travail: age, sexe, groupe ethnique, rang de naissance et taille de la fratrie des enfants, facteurs etiologiques, type clinique de crises et signes cliniques associes. Nous avons utilise 1’epreuve de x2 pour 1’association significative de donnees

RESULTATS

1. Incidence de la pathologie

Sur 400 dossiers de nourrisons et de jeunes enfants soignes, 221 soit 55,5% constituent notre collectif d’etude d’enfants epileptiques, ce qui represente 3,79% de 1’incidence annuelle des consultations dans notre Centre en 1989, adultes et enfant confondus (n=5 821).

2. L’age et le sexe des enfants

L’age des enfants a la premiere consultation varie de 4 a 78 mois, avec une moyenne de 41 mois et un mode de 48 mois. Les enfants en age prescolaire sontmajoritaires avec 61,99% des cas (13/221). Le sexe masculin predomine avec 60.18% (133/221).

3. Le rang de naissance et la taille de la fratrie des enfants

Indique dans 167 cas sur 221, le rang de naissance accuse une predominance de 5 premiers enfants 138/167 : 82,63% avec des frequences plus elevees pour les deux premiers-nes et un le deuxieme enfant (tableau 1). Les families de a 6 enfants sont plus nombreuses, 137/161 mentionnes: 85,09%; des fratries de 3 et 4 enfants presentent des plus grandes frequences (Tableau II).

4. Le groupe ethnique

La frequence de 1’epilepse parait significativement variable suivant le groupe ethnique des enfants (p=0,00129) tableau III).

5. Les facteurs etiologiques

Les epilepsies sont retrouvees surtout dans le contextecliniqued’encephalopathie: 155/221 (52,04% des cas.p=0,0004). Les facteurs morbides prenataux sont notes dans 14%, les perinataux dans 22,20% des cas, les infections cerebrales aigues postnatales dans 17,60%. Les antecedents heredo-collateraux de comitial ite sont observes dans 3 0,3 2% des cas, 67/221 dont 35/221 : 15,84% en dehors de la famille restreinte; 24/221 : 10,86% au niveau de la fratrie et 8/221 : 3,62% au niveau de parents. Dans le cas d’epilepse en dehors du contexte clinique d’encephalopathie, ces antecedents sont notes dans 35,85% des cas, avec predominance au niveau de la famille restreinte pour les crises febriles (tableau IV).

6. L’age de debut des crises

L’age de debut est bien note seulement dans epilepsies hors encephalopathie. L’analyse du tableau V indique que tres peu de crises ont commence dans le premier semestre de la vie (8,08%) et au-dela de la quatrieme annee (13,13%). 72,73% d’epilepsies ont commence dans les trois premieres annees de la vie, le pic est atteint dans la deuxieme annee avec pres d’un tiers des cas (29,30%).

7. Les types cliniques des crises epileptiques

Les crises n’ont ete typees que dans 136 cas sur 221 dans notre etude. La predominance de crises generalisees d’emblee dans 1’ensemble. Dans les epilepsies hors encephalopathie, sur 75 cas analyses, les crises decrites generalisees d’emblee representent 68% des cas, les crises partielles 16% des cas chez les nourrisons et 24 chez les enfants en age prescolaire, les crises unilaterales 16% chez les nourrissons et 8% chez les plus ages (tableau VI et figure 1).
8. Les signes cliniques associes

L’encephalophathie est presente dans 52,04% (115/221). Les pricipaux problemes (tableau VII) associes aux crises epileptiques sont:
-1’instabilite/agitation motrice ou psychomotrice dans 33.03% des cas (73/221)
-les handicaps moteurs dans 30,03% (67/221)
-les troubles du langage (retard et surdi-mutite) dans 13,1% (39/221).

Tableau 1: rang de naissance des enfants

RANG Nbre de cas %
1 34 20.35
2 37 22.15
3 26 15.57
4 22 13.17
5 19 11.38
6 8 4.79
7 5 2.99
8 5 2.99
9 4 2.40
10 3 1.79
11 2 1.19
TOTAL 167 100

Tableau 2 : la taille de fratrie des enfants

Taille de la fratrie Nbre de cas %
1 7 5.11
2 24 17.52
3 35 20.96
4 28 20.43
5 25 18.24
6 18 13.14
7 7 5.11
8 7 5.11
9 2 1.46
10 6 4.38
11 3 2.19
TOTAL 137 100

Tableau 3

Groupe ethnique Frenquence par groupe ethnique %
Luba 31/60 51.67
Ntandu 20/33 60.61
Yombe 15/21 71.43
Yanzi 13/20 65.00
Mbala 9/20 47.37
Mongo 10/20 50.00
Ndibu 16/20 80.00
Nianga 11/18 61.11
Yaka 13/18 72.22
Lulua 5/16 31.25
Tetela 1/10 10.00
Autres 77/145 55.10
Total 221/400 55.25

Tableau 4

Type de crises Nombre de cas par type de parente (n=38)
Crises febriles (n=28) Geniteur = 1, Frantrie = 6, Autre = 4
Crises non febriles (n=78) Geniteur = 7, Frantrie = 4, Autre = 16
Total Geniteur = 8, Frantrie = 10, Autre = 20

Tableau 5 : L’age de debut des tableaux cliniques

Age de debut Encephalopathie avec epilepsie (Nbre de cas) Encephalopathie avec epilepsie (%) Encephalopathie avec epilepsie (% cum.) Epilepsie hors encephalopathie clinique (Nbre de cas) Epilepsie hors encephalopathie clinique (%) Epilepsie hors encephalopathie clinique (% cum.)
1er semestre de la vie 40 46.51 46.51 8 8.08 8.08
2e semestre 15 17.44 63.95 21 21.21 29.29
3e semestre 8 10.71 86.05 14 14.14 72.73
4e semestre 7 8.14 95.19 14 14.14 86.87
5e semestre 4 4.65 98.84 12 12.12 98.99
6e semestre 1 1.16 100.00 1 1.01 100.00
Total 88 100 100 99 100 100

Tableau 6: Type clinique des crises epileptiques en dehors des encephalopathies

Types de crises Nourissons (Nbre de cas) Nourissons (%) Age prescolaire (Nbre de cas) Age prescolaire (%) TOTAL %
1. Crises generalisees d’emblee 17 68 34 68 51 68
– tonico-clonique 11 19 30 40.00
– tonique 2 11 13 17.33
– clonique 3 2 5 6.67
– atonique 1 0 1 1.33
– absence petit mal 0 1 1 1.33
– mixte : tonico-clonique et absence 0 1 1 1.33
2. Crises partielles 4 16 12 24 16 21.33
– crise bravais-jacksonienne avec generalisation secondaire 3 5 8 10.67
– crise viscerale abdominale 1 1 2 2.67
– crise motrice focale (faciale) 0 1 1 1.33
– crise psychomotrice 0 1 1 1.33
– crise psychomotrice avec generalisation secondaire 0 3 3 4.00
– crise adversive 0 1 1 1.33
3. Crises unilaterales 4 16 4 8 8 10.67
Total 25 100 40 100 75 100

Tableau 7 : Les signes associes aux crises epileptiques (N = 221)

Signes Frenquence relative %
1. Instabilite / Agitation motrice ou psychomotrice 73 33.03
2. Handicaps moteurs 67 30.31
3. Retard de la langue 19 8.59
4. Surdi-mutite 10 4.52
5. Retard saturo-ponderal 10 4.52
6. Dysmorph cranofaciale 8 3.62
7. Cecite 5 2.26
Figure 1: Type clinique des crises suivant I age

Figure 1: Type clinique des crises suivant I age

COMMENTAIRES

Les epilepsies infantiles frappent plus les garcons comme le signale RAGNAR qui decrit la predominance masculine plus prononcee entre 5 et 10 ans (14). Notre taux de 60,18% approche les chiffres des etudes generales de BHARUCHA et al., 1988(3): 60,5% et de KOUL et al., 1988(8): 65%. ISHIDA trouve bien la predominance masculine dans son materiel pediatrique de 2.327 enfants (7).

Nos resultats sur 1’age de debut des crises corroborent les observations de ISHIDA (1988) qui constatent une prevalence elevee de 1’epilepsie a 1’age de debut des crises dans les trois premieres annees dans 77,72% des cas (7).
Sur Ie plan etiopathologique, nous trouvons 52,04% d’epilepsies dans les contextes cliniques d’encephalopathie infantile et une predominance de la morbidite perinatale permi les facteurs etioloques 22% des cas. BHARUCHA et al. (1988) dans leur etude generate a Bombay (Inde) observent que la majorite de cas d’epilepsie sont associees au retard mental et aux infirmites motrices d’origine cerebrale (3). KOUL et al. (1988) notent le retard mental dans 22,9% des cas (8) En outre. RANTAKALLO et VONT WENDT (1986) (14) sur un collectif de 12,000 enfants 43% d’epilepsies associees aux causes pre, peri et post natales representant respectivement 9,18 et 16% des cas. La frequence predominate de la morbidite perinatale parmi les facteurs etiologiques de 1’epilepsie denote le pouvoir epileptogene eleve de lesions cerebrales perinatales. CAMBIER et BUGE en decrivent chacun un taux devolution epileptogene de 50% en cas d’encephalopathie (4,5).

La frequence elevee des enfants premier et deuxieme-nes de families de 1 a 6 enfants dans notre etude ne rendrait pas seulement compte de leur importance demographique numerique mais aussi de leur risque plus eleve d’atteinte cerebrale perinatale. A ce propos, CAMBIER et al. mentionnent la pus grande frequence de 1’epilepsie chez Ie premier-ne d’une fratrie qu’ils imputent aux lesions perinatales (5).
II s’avere que les groupes ethniques qui presentent des taux plus eleves d’enfants epileptiques dans notre etude sont caracterises par une dynamique psycho-sociologique marquee par 1’irritabilite et 1’impulsivete (Yaka et Ndibu).

La prevalence elevee de la morbidite perinatale et des atteintes cerebrales prenatales et postnatales dans les pays en voie de developpement explique les taux eleves d’epilepsie dans ces pays (11). Notre taux d’antecedents heredo-collateraux de comitialite relativement eleve tiendrait entre autres a la prevalence elevee de 1’epilipsie dans notre milieu, et au fait propre des epilepsies infantiles (5).

La predominance des crises generalisees, les taux plus eleves des crises unilaterales chez les nourissons, des crises partielles chez les enfants en age prescolaire et la rarete des crises d’absence petit mai dans notre etude evoquent Ie profil des epilepsies selon les ages decrit par BACAUD (1) et plusieurs donnees de 1’epidemiologie des crises chez 1’enfant. Les crises unilaterales sont 1’apanage des nourrisons (2). Les crises d’absence petit mal sont plus frequentes pendant I’age scolaire (12). (12). La frequence des crises partielles augmentent avec I’age pour predominate apres I’age pour devenir predominate apres l’age de 10 ans (14). Toutefois, les proportions de differents types cliniques des crises sont variables scion les etudes.

Dans le materiel pediatrique de DECHEF (6), nous trouvons 58,67% de crises generalisees 30,63% de crises partielles et 10.70% de crises unilaterales, alors que chez ISH1DA (7) qui ne fait pas mention de crises unilaterales. nous notons 40,9% de crises generalisees et 59,1% de crises partielles.

CONCLUSION

Dans notre etude, les epilepsies du nourrisson et du jeune enfant recouvre pres de 4% de 1’incidence annuelle de patients dans notre Centre. Les garcons, les 5 premiers-nes de families de 1 a 6 enfants, surtout Ie premier et Ie deuxieme-nes paraissent plus concernes. II s’agit des epilepsies surtout secondaires, avec un taux relativement eleve d’antecedents heredo-collateraux et predominance des crises generalisees.

Plus de 5 nourrissons etjeunes enfants epileptiques recus dans notre Centre ont un handicap moteur et/ou un retard mental. Les epilepsies du nourrisson et du jeune enfant representent ainsi un aspect important de la pathologie neuro-psychiatrique dans notre Centre et dans notre milieu, et dont la prevention passe par Ie controle de la morbidite cerebrale chez les premiers-nes particulierement ceux de sexe masculin et par le controle des phenomenes epileptiques dans les trois premieres annees de la vie.


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