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CLINICAL STUDIES / ETUDES CLINIQUES
 
LE KYSTE HYDATIQUE CEREBRAL :A PROPOS DE 104 CAS

INTRACEREBRAL HYDATID CYST : ABOUT 104 CASES


  1. Department of neurosurgery, Ibn Rochd, University Hospital, Casablanca, Morocco

E-Mail Contact - SALAOU Oumar : oksalaou@yahoo.fr


RESUME

Description

Le kyste hydatique est une anthropozoonose causée par l’Ecchinococcus granulosis, ayant pour hôte définitif le chien. L’homme est affecté accidentellement. Sa localisation cérébrale est rare et pose de véritables problèmes thérapeutiques lorsqu’elle est multiple.

Objectifs

Mettre en lumière les particularités et les difficultés rencontrées dans la prise en charge de la localisation cérébrale de cette affection, par notre expérience basée sur 104 cas de kyste hydatique cérébral.

Résultats

La majorité des patients était âgé de moins de 15 ans, avec une prédominance masculine. La forme de présentation clinique était le syndrome d’hypertension intracrânienne et un déficit neurologique focal. L’examen paraclinique clé du diagnostic est la TDM cérébrale, qui apporte des éléments diagnostic non de certitude, mais de forte orientation. La sérologie hydatique est un autre élément orienteur, mais il est rarement positif. L’IRM cérébrale peut être utile pour faire le diagnostic différentiel avec les autres processus tumoraux cérébraux. Tous les patients ont bénéficié d’un traitement chirurgical par expulsion forcée du kyste en introduisant de solution saline hypertonique autour et sous le kyste selon la technique d’Arana-Iniguez. Les suites postopératoires ont été marqués par la récupération du déficit neurologique chez 90% des patients et 2 cas de récidive à 22 et 30 mois respectivement. 2 patients ont gardé des séquelles à type de cécité bilatérale.

Conclusion

La localisation cérébrale du kyste hydatique est rare et de bon pronostic, pour peu que la prise en charge soit précoce et qu’il n’y ait pas d’autres localisations cérébrales ou viscérales associées.

Mots clés : Kyste hydatique – localisation cérébrale – Chirurgie.

SUMMARY

Description

Hydatid cyst is an anthropozoonosis caused by Ecchinococcus Granulosis, that affect dogs. Human being is affected accidentally. It cerebral location is rare and leads to a serious therapeutic difficulties in a case of multiple location.

Goals

Highlight the particularities and difficulties encountred in managing cerebral hydatid cyst through our experience based on 104 cases of cerebral hydatid cyst.

Results

The majority of the patients were under 15 years old, with the male predominance. Clinical presentation was often increase intracranial pressure syndrome, associated with focal neurologic deficit. The main diagnostic tool was cerebral CT-scan, which permit to suspect the diagnosis in all the patients. Hydatic serology was rarely positif, and it permitted to suspect the diagnosis when associated with intracranial cystic lesion. Cerebral MRI, can be used for differential diagnosis. All the patient underwent surgical treatment by forced cyst expulsion with the introduction of hypertonic saline solution under and around the cyst, known as Arana-Iniguez technique. Postoperative course was noted down by neurologique recovery in 90% of the patients and 2 cases of reccurrences at 22 and 30 months postoperative. 2 patients remind with sequelas as bilateral blindness.

Conclusion

rare affection with good prognosis, when the diagnosis and treatment are precocious and no other cerebral or visceral locations

Keys words : Hydatid cyst – Cerebral location – Surgery

INTRODUCTION

Le kyste hydatique est une affection parasitaire causée par l’echinococcus granulosis. L’être humain est atteint accidentellement par contacte direct avec les chiens, et le cheptel animal, ou par contamination des plantes ou de l’eau. Le foie est le premier organe atteint par la maladie. Les localisations au niveau du SNC et en particulier cérébrales sont rares, elles ne représentent que 1 à 3% des cas (1, 2).

La présentation clinique de la maladie est agressive et se comporte comme une affection potentiellement maligne, surtout en cas de localisation multiple et rachidienne. La localisation cérébrale simule un syndrome tumoral cérébrale, avec les risques vitaux et fonctionnels qu’elle comporte.

Le Maroc est situé dans une zone géographique endémique pour le parasite; et la loi y stipule que tout cas d’hydatidose diagnostiqué doit être déclaré.
Nous présentons notre expérience dans la prise en charge de la localisation cérébrale du kyste hydatique.

PATIENTS ET METHODES

Nous rapportons une étude rétrospective de 104 cas de kyste hydatique cérébral prise en charge au sain de notre unité durant une période de 25 ans (de 1977 à 2003).
Le déficit neurologique est quantifié chez les patients à l’admission par un examen clinique qui est répété en postopératoire pour évaluer l’évolution.
Le but de cette étude est d’analyser les facteurs épidémiologiques, cliniques; thérapeutiques, et le profil évolutif des patients pris en charge.

RESULTATS

Epidémiologie

La localisation cérébrale du kyste hydatique a représentée 17% de toutes les infections cérébrales prises en charge dans notre unité durant la même période. Il y avait une prédominance masculine (58,6%). La majorité des patients était d’origine rurale (76%), et 66% des patients étaient âgés de moins de 15 ans.

Examen clinique

La durée moyenne des symptômes avant le diagnostic était de 4 mois. Le symptôme le plus fréquent était le syndrome d’hypertension intracrânienne (retrouvé chez 97% des patients), dont 2 patients étaient en cécité bilatérale; suivit du déficit neurologique focal, noté chez 83 patients (80%), dont 79 patients (76%) avaient une hémiparésie, 5 patients avaient une aphasie, et 7 patients une épilepsie; 14% des patients avaient été admis avec des troubles de conscience.

Paraclinique

La sérologie hydatide réalisée chez tous les patients n’était positive que dans 4 cas (3,8%). La TDM cérébrale avant et après injection de produit de contraste, réalisée chez tous les patients, était l’examen clé du diagnostic (Photo 1). Elle a permis de retrouver une localisation fronto-pariétale dans 69% des cas (localisation la plus fréquente); le kyste était unique dans la majorité des cas (93,2% des cas) et multiple dans 3,4% des cas (Photo 2); il était multivésiculaire dans 3,4% des cas.
Le kyste hydatique était calcifié dans 1 cas (Photo 3).

Traitement

Tous les patients ont bénéficié d’un traitement chirurgical par accouchement forcé du kyste à l’aide d’une solution saline hypertonique introduite sous et autour du kyste, selon la technique d’ARANA-INIGUEZ (Photo 4). Les suites postopératoires étaient marquées par la survenue d’une méningite à Staphylocoque épidermidis chez 2 patients, dont un était décédé, dans le deuxième cas, la méningite a été jugulée par l’antibiothérapie. La mortalité opératoire était donc de 0,1%.

Evolution

Nous avons noté une récupération totale du déficit neurologique dans 75 cas (90%), 7,5% des patients ont gardé leur déficit neurologique, dont 2 des patients qui avaient une aphasie initialement et 4 des patients qui avait une hémiparésie. Le délai moyen de la récupération du déficit neurologique était de 6 mois (2 à 15 mois). 2 patients (2,5%) ont gardé des séquelles à type de cécité bilatérale.
Nous avons noté 2 cas de récidives à 22 et à 30 mois de la première intervention; les deux patients ont été repris avec succès et sans séquelle postopératoire.

DISCUSSION

Le kyste hydatique cérébral est une affection rare, il représente environ 1 et 3% des processus occupant expansif intracrâniens (1, 2). Il affecte beaucoup plus l’enfant que l’adulte, avec un âge moyen de survenue de 15 ans. L’origine rurale des patients infestés est retrouvée dans la majorité des cas (1, 2, 4, 5, 8, 9). La prédominance masculine est criante (4, 6).

Les symptômes dépendent de la localisation et peuvent aller de simples céphalées à l’engagement temporal. La forme de présentation la plus fréquente est le syndrome d’hypertension intracrânienne (4).

Les moyens diagnostiques de nos jours sont représentés par la TDM et l’IRM cérébrales (1, 8). L’imagerie aide le chirurgien à programmer l’intervention. Le kyste hydatique est souvent une lésion unique, intraparenchymateuse, sus-tentorielle, bien limitée, souvent sphérique, avec une densité identique à celle du liquide céphalo-rachidien, sa paroi est fine et n’est pas rehaussée par le produit de contraste, il n’existe pas d’oedème périlésionnel (4, 6, 9). Les localisations sous-tentorielles, notamment cérébelleuses sont rares. L’imagerie permet en outre d’apprécier la taille du kyste et de mesurer ainsi le risque de rupture peropératoire. La croissance du kyste hydatique cérébral serait de 4,5 cm tous les 6 mois (5). Les calcifications intra kystiques et de la paroi du kyste sont rares. L’IRM cérébrale pourrait être indispensable en cas de kyste remanié, elle permettra alors d’éliminer les diagnostics différentiels. Les problèmes de diagnostic différentiel peuvent se poser surtout dans les cas de remaniement du kyste; ces diagnostic différentiels sont : les gliomes kystiques, les kystes arachnoïdiens, les autres processus infectieux; la paroi du kyste est épaisse dans ces cas avec ou sans prise de contraste (1, 8). Une image IRM de kyste isointense par rapport au liquide céphalo-spinal en T1 et en T2, avec une paroi hypointense en T2, et sans œdème périlésionnel associé, sera caractérisée de kyste hydatique cérébral sain, c’est le cas dans 75% des cas (4). Par contre lorsqu’il existe une œdème périlésionnel, hyperintense en T2, avec une prise de contraste de la paroi, le kyste hydatique est dit compliqué, et se pose alors le problème de diagnostic différentiel (4). L’IRM cérébrale permettrait de mieux localiser et caractériser le kyste hydatique cérébral que la TDM (7). D’autres localisations peuvent être associées dans environ 30% des cas (3), dont hépatique et pulmonaire particulièrement, il faudra les rechercher systématiquement.

La chirurgie est la première et efficace option thérapeutique dans la localisation cérébrale du kyste hydatique, le but est l’ablation complète du kyste sans rupture; par une expulsion hydrostatique forcée, à l’aide de solution saline hypertonique introduite autour et sous le kyste. Cette technique est connue sous le nom de technique de Dowling (1, 7, 8, 9). La localisation et la multiplicité du kyste représentent les deux problèmes rencontrés par le chirurgien dans la prise en charge de cette affection; entraînant un risque élevé de rupture peropératoire du kyste, qui survient dans 8 à 17% des cas (8, 9). 2 types de complications sont associés à la rupture du kyste hydatique cérébral: le développement de kyste hydatique cérébral multiple (10) et le choc anaphylactique. D’autres complications peropératoires, mais non spécifiques peuvent se rencontrer à type d’hématome sous-dural, de pneumocéphalie, d’hémorragie intraparenchymateuse ou d’hydrocéphalie (3, 9). Le risque de récidive est d’environ 19%, et il est corrélé avec le taux de rupture peropératoire du kyste, plus il y a de rupture, plus le risque de récidive est élevé (3, 4). La mortalité associée au kyste hydatique cérébral est de 10,12%, la morbidité de 9,52% et la mortalité opératoire de 8,48% (7, 8). Les séquelles sont souvent à type d’épilepsie, de cécité secondaire au syndrome d’hypertension intracrânienne (lié au retard diagnostic) et de déficit moteur (3).

CONCLUSION

Le kyste hydatique cérébral est une affection rare, qui survient chez l’adulte jeune souvent d’origine rural, avec des antécédents de contacts avec les chiens. Il se manifeste le plus souvent par un syndrome d’hypertension intracrânienne, avec des crises convulsives et un déficit neurologique focal, qui est fonction de la localisation. Le diagnostic est fortement suspecté à la TDM cérébrale, l’IRM cérébrale est surtout utile en cas de kyste hydatique remanié, pour faire le diagnostic différentiel avec les autres processus kystiques intracrâniens. La sérologie hydatique positive n’est que suggestive. Le traitement de premier choix est la chirurgie. Le pronostic est généralement bon en cas de diagnostic précoce et en dehors des localisations cérébrales multiples qui posent un sérieux problème thérapeutique.

Photo 1

Photo 2

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Photo 3

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Photo 4

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BIBLIOGRAPHIE

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