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CLINICAL STUDIES / ETUDES CLINIQUES
 
ACCIDENTS VASCULAIRES CEREBRAUX CHEZ LE SUJET JEUNE (15 A 45 ANS) DANS LE SERVICE DE NEUROLOGIE DU CHU CAMPUS DE LOME

STROKES AMONG YOUTH ( 15 TO 45 YEARS OLD) IN THE NEUROLOGICAL DEPARTMENT OF THE MEDICAL TEACHING HOSPITAL, CAMPUS-LOME.


  1. Service de Neurologie, CHU de Lome BP. 4231. Lome, Togo

E-Mail Contact - BALOGOU Agnon Ayélola Koffi : abalogou@yahoo.fr


RESUME

Introduction

En Afrique subsaharienne les accidents vasculaires cérébraux (AVC) représentent la troisième cause de mortalité et la première cause d’incapacité motrice dans les grands centres de neurologie. Ils surviennent souvent chez des sujets de plus de 50 ans. L’OMS a noté que le nombre de décès chez les adultes jeunes (15-45 ans) est relativement élevé dans les pays en voie de développement : plus de 30% contre 20% dans les pays riches.

Objectif

Notre travail avait pour buts d’étudier la fréquence, la morbidité, la mortalité des AVC et d’identifier leurs facteurs de risque chez les adultes jeunes dans le service de neurologie à Lomé.

Méthode

Il s’était agi d’une étude transversale prospective réalisée entre le 1er Janvier 1998 et le 31 Décembre 2007 chez des patients hospitalisés, âgés de 15 à 45 ans, sur des arguments cliniques et tomodensitométriques.

Résultats

Sur les 3976 patients hospitalisés, 1309 présentaient un AVC (32, 9%). Parmi eux 141 étaient âgés de 15 à 45 ans (10,8 % des AVC et 3,5 % des hospitalisations). Le déficit hémi corporel (51,1%), les troubles de la conscience (48,2%) et du langage (21,3 %) étaient les principaux motifs d’hospitalisation. L’hypertension artérielle (HTA) était observée dans 102 cas (72,3%). Le taux de mortalité globale était de 21% (18,8% pour ceux victimes d’AVC ischémique contre 24,3 % pour les AVC hémorragiques).

Conclusion

L’HTA représente le principal facteur de risque des AVC chez les sujets jeunes. Son dépistage et sa prise en charge devraient être précoces.

Mots clés : Accident vasculaire cérébral (AVC), accident vasculaire cérébral, pays en développement, sujets jeunes, Togo


SUMMARY

Introduction

According to W.H.O declaration, strokes and cardiovascular diseases will represent the main challenge of developing countries health care management systems in the incoming years. In subsaharian Africa, strokes represent the third cause of mortality and the first cause of disability in neurological departments. It occurs in patients over 50 years old. W.H.O. assumed that the rate of death in the population of young adults (15 – 45 years old) is relatively high in developing countries: more than 30% versus 20% in developed countries.

Objectives

The objectives of our research was to study the frequency, the morbidity and the mortality of strokes, to identify risk its factors among youth hospitalized in neurological department of Lomé, in order to adopt strategies to decrease its impact.

Method

We did a transversal prospective study survey from January 1st, 1998 to December 31st, 2007 on 15 – 45 years old patients. Arguments resulted from clinical examination and CT scann investigations.

Results

Among the 3976 hospitalized patients, 1309 suffered for strokes (32.9%) and 141 of them were young adults (15 – 45 years old) representing 10.8% of strokes cases and 3.5 % of hospitalizations. Hemiplegia (51,1%), conscious disorders (48,2%) and language disorders (21,3%) were the main hospitalization motives. High blood pressure was noticed in 102 cases (72,3%); 22.7% of patients presented a combination of risk factors. The whole mortality rate was 21% (18,8% for those presenting ischemic strokes versus 24,3% for the hemorrhagic strokes).

Conclusion

High blood pressure represents the main risk factor of strokes in young adults population, requiring therefore to be tracked and justifying an early take-care.

Key words : Stroke, youth, developing country, Togo

INTRODUCTION

L’organisation mondiale de la santé (OMS) définit l’accident vasculaire cérébrale (AVC) comme la survenue brutale de signes cliniques localisés ou globaux de dysfonction cérébrale avec des symptômes durant plus de 24 heures, pouvant conduire à la mort sans autre cause apparente qu’une origine vasculaire (14). Dans les pays occidentaux, les AVC représentent la troisième cause de mortalité après les affections cardiaques et les cancers, la deuxième cause de démence et la première cause de handicap chez l’adulte (11). En Afrique subsaharienne, les AVC représentent la troisième cause de mortalité et d’incapacité motrice dans les centres de neurologie (18), avec 45 % des hospitalisations dans les services de neurologie du CHU de Fann à Dakar (23) ; et 32,9% dans le service de neurologie du CHU campus de Lomé au Togo (2). Les différents travaux en population générale et en milieu hospitalier montrent que l’AVC est l’apanage du sujet âgé au-delà de 50 ans (1). Selon l’OMS, les AVC et les maladies cardiovasculaires vont constituer dans les années à venir le principal défi des systèmes de santé dans les pays en voie de développement (15). L’OMS (16) a noté que le nombre de décès chez les adultes jeunes (15-45 ans) est relativement élevé dans les pays en voie de développement. Un peu plus de 30% des décès surviennent à ces âges contre 20% dans les pays riches. Ce grand nombre de décès prématurés dans les pays pauvres constitue un sérieux problème de santé publique. L’AVC est l’une des causes de ces décès prématurés dans les pays en voie de développement (18).
Notre travail avait pour buts d’étudier la fréquence, la morbidité, la mortalité des AVC et d’identifier les différents facteurs de risque chez les adultes jeunes dans le service de neurologie à Lomé.

METHODOLOGIE

Notre étude s’est déroulée dans le service de neurologie du CHU Campus de Lomé. Le CHU Campus constitue un centre national de référence pour certaines spécialités médicales (cardiovasculaire, ORL, stomatologie, ophtalmologie, pédiatrie, hépato gastro-entérologie). Le service de neurologie du CHU Campus dispose de 28 lits répartis dans 6 salles communes, 4 cabines individuelles et une salle d’urgence neurovasculaire. Ce service dispose d’un plateau technique composé d’une unité d’électroencéphalographie (EEG), d’électromyographie (EMG) et de biopsie neuromusculaire.

Il s’agit d’une étude transversale prospective réalisée entre le 1er Janvier 1998 et le 31 Décembre 2007 chez des patients âgés de 15 à 45 ans, considérés comme adulte jeune, admis pour AVC.
Nous avons retenu ceux qui répondaient aux critères de certitude : critères cliniques de l’OMS pour le diagnostic des AVC (24) et confirmation par tomodensitométrie cérébrale ou par la ponction lombaire exploratrice. La ponction lombaire exploratrice était faite chez des sujets qui avaient un score de Glasgow au dessous de 7 et ne pouvaient supporter le transfert au centre du scanner le plus proche situé à 2 km du service.

Le handicap a été évalué à l’entrée et à la sortie à l’aide du score de Rankin modifié (SRm). C’est un score international simple, facile à utiliser qui permet de coter le handicap fonctionnel. Il est codifié de 0 à 6 (7).
Les patients présentant une perte de connaissance avec incertitude sur des signes de localisation, des crises épileptiques partielles avec déficit post critique, une hospitalisation pour déficit neurologique focalisé totalement régressif en moins de 24 heures et les patients avec un diagnostic de présomption d’accident vasculaire cérébral (critères cliniques seuls) ont été exclus.
La collecte des données comprenait les données démographiques (âge et sexe) ; la filière des soins à partir des premiers symptômes ; le mode de transport vers l’hôpital ; le motif d’hospitalisation ; la nature du premier contact médical (médecin, personnel paramédical ).
Les antécédents personnels avaient été étudiés. Il s’agissait d’antécédents neurologiques (AVC, épilepsie, traumatisme crânien, accident ischémique transitoire ou AIT) ; cardiaques (hypertension artérielle ou HTA, valvulopathies, infarctus du myocarde ou IDM, malformations vasculaires, artérite, arythmie cardiaque/ fibrillation auriculaire) ; antécédents infectieux. Les autres facteurs de risque : obésité, sédentarité, diabète, alcoolisme, tabagisme, contraception orale, les traitements en cours avant l’hospitalisation dans le service de neurologie ont été également notés. Nous nous étions intéressés aux antécédents familiaux des patients.
Certains examens complémentaires (glycémie, triglycéridémie, cholestérolémie ; hématocrite, tomodensitométrie cérébrale, électrocardiogramme, et échographie cardiaque) étaient demandés chez les patients.
L’évolution du patient en cours d’hospitalisation de même que la durée d’hospitalisation avaient été étudiées.

RESULTATS

Pendant la période d’étude, 3976 malades avaient été hospitalisés dans le service de neurologie du CHU Campus. Le diagnostic d’AVC a été retenu 1309 fois, ce qui correspondait à 32,9% des hospitalisations. Le diagnostic d’AVC avait été retenu pour la tranche d’âge de 15-45 ans dans 251 cas (19,2% des AVC). Cent dix dossiers ont été exclus (absence de diagnostic de certitude). Notre analyse a porté sur 141 patients (10,8 % des AVC et 3,5 % des hospitalisations).
Nous avons rapporté sur la figure 1, la répartition par âge et par sexe de la population étudiée. L’âge moyen dans notre étude a été de 38,5 ± 6,8 ans avec des âges extrêmes de 16 et 45 ans et un sex-ratio de 1,2. Cinquante trois pour cent de la population étudiée appartenait à la tranche d’âge de 40 à 45 ans.

Le tableau 1 montre les principaux motifs d’hospitalisation. Le déficit hémi corporel (51,1%), les troubles de la conscience (48,2%) et les troubles du langage (21,3 %) ont été les principaux motifs d’hospitalisation.
Le transport des malades du domicile vers l’hôpital a été fait dans la grande majorité des cas par des véhicules non médicalisés (99%). Certains malades ont même été amenés sur taxi moto. Au total 80 patients (56,7%) ont été directement admis alors que 61 patients (43,3%) ont été référés d’une autre formation sanitaire. Parmi ces 61 patients référés, 37 soit 60,7% ont eu un médecin comme premier contact avec le système de santé, alors que 24 patients (39,3%) ont été vus par un personnel paramédical.

Les traitements reçus avant l’admission dans le service de neurologie ont été précisés chez 55 patients (90,1%). Un antihypertenseur avait été administré dans 32 cas (58,2%), l’acide acétylsalicylique dans 8 cas (14,6%) et un antidiabétique dans 5 cas (9,1%). Dans 10 cas (18,2%) les patients avaient reçu d’autres soins. Comme antihypertenseurs, les patients référés ont reçu soit de la clonidine (Catapressan® injectable), soit du furosémide (Lasilix® injectable), ou les deux. Certains patients ont bénéficié de la nifédipine sublinguale (Adalate®). L’acide acétylsalicylique a été donné sans tenir compte du type d’AVC. Aucun de ces patients n’avait un scanner cérébral à l’entrée. Le médicament antidiabétique principalement prescrit était l’insuline ordinaire.

Environ 70% des 141 patients ont été admis dans les 24 premières heures suivant l’installation du syndrome neurologique quel que soit le circuit des patients.
L’HTA, un antécédent d’AVC, le diabète, l’alcoolisme et le tabagisme représentaient les principaux facteurs de risque connus à l’admission (tableau 2).

Au total, 127 patients avaient fait un scanner cérébral. Cet examen a été réalisé par 10% des patients dans moins de 24 heures suivant l’admission, dans 22% des cas entre 24 et 48 heures, dans 15% entre 48 et 72 heures, dans 10% des cas entre 72 et 96 heures et dans 43 % des cas au delà de 96 heures. La ponction lombaire avait mis en évidence une hémorragie méningée ou cérébro-méningée dans 14 cas. Nous avons noté 88 cas (62,4%) d’AVCI, 50 cas (35,5 %) d’AVCH et 3 cas (21%) d’association. Ces 3 derniers cas ont été considérés comme AVCH car la tomodensitométrie montrait un saignement cérébral récent. La fréquence de l’AVCH était de 37,6% (tableau 2). Deux des 8 patients ayant reçu de l’acide acétylsalicylique avant admission, avaient fait un AVCH.
L’âge moyen des patients de 15 à 45 ans présentant un AVCI a été de 39 ± 6,1ans avec des âges extrêmes de 25 et 45 ans et un ratio de 1,3. Dans les AVCH, l’âge moyen était de 36,5 ±7,5 ans avec des âges extrêmes de 16 et 45 ans et un ratio de 0,9. Nous avons noté une contamination ventriculaire chez 15 patients (26,3% des AVCH) et un effet de masse chez 32 patients (56,1% des AVCH).

Une HTA a été observée chez 102 patients (72,3%). Les chiffres tensionnels les plus élevés étaient 270 mmhg pour la systolique et 170 mmhg pour la diastolique. L’HTA était retrouvée chez 67,9% des patients victimes d’AVCI soit 55,9% des 102 patients hypertendus. Elle était retrouvée chez 79,9% des patients victimes d’AVCH soit 44,1% des patients hypertendus.

Chez 14 patients ayant réalisé une échographie cardiaque, 9 (64,3%) avaient des anomalies. Les principales anomalies ont été une dilatation des cavités cardiaques, les troubles d’éjection et de relaxation. Nous avons retrouvé une polyglobulie chez 11 patients victimes d’AVCI soit 12,5%. Au total 32 des 141 patients (22,7%) présentaient une association de facteurs de risque. L’HTA et le diabète constituaient l’association la plus fréquente : 15 patients (10,6%) ; suivie de l’HTA et la dyslipidémie 9 cas (6,4%). L’hémoglobinopathie SS avait été retrouvée chez 2 patients : 1,4%. Ces deux avaient présenté un AVCI. La sérologie VIH réalisée chez 18 patients, était positive dans 3 cas (16,7%). Aucune infection syphilitique n’a été retrouvée.
La durée moyenne du séjour (DMS) a été de 19,9 ±13,5 jours. Elle était de 13,9 ±7,5 jours avec des extrêmes de 2 et 30 jours chez les patients présentant un AVCI. Celle des patients victimes d’AVCH a été de 24 ±15,9 jours avec des extrêmes de 6 et 81 jours.

Le taux de mortalité globale a été de 21% ; soit 18,8% pour ceux victimes d’AVCI contre 24,3% pour ceux victimes d’AVCH.
Lorsqu’on considère les patients ayant survécu à l’AVC ; 95,5% (n=84) des malades victimes d’AVCI avaient besoin de l’aide d’une tierce personne pour les tâches quotidiennes (SRm>2) à l’entrée contre 79,5% (n=70) à la sortie. Pour les patients victimes d’AVCH, 48 (90,5%) avaient besoin d’une aide d’une tierce personne pour les tâches quotidiennes à l’entrée contre 36 (67,9%) à la sortie.

DISCUSSION

Il s’agit d’une étude prospective chez les patients jeunes (15-45 ans) répondant aux critères cliniques de l’OMS pour le diagnostic des AVC (24), avec une confirmation soit par tomodensitométrie ou par la ponction lombaire dans de rares cas d’hémorragies cérébro-méningées. La ponction lombaire ne permet pas le diagnostic des AVCI et des hématomes intracérébraux sans contamination ventriculaire et des espaces méningés. Certains patients présentant des AVCI, avec de gros troubles de la conscience ne pouvant pas supporter le transport au centre du scanner et décédés dès les premiers jours d’hospitalisation, n’ont pas été pris en compte. Par contre tous les patients mêmes dans un état grave au début avaient bénéficié d’un scanner cérébral dés que leur état le permettait.

Les AVC ont représenté pendant la période d’étude, 32,9 % des hospitalisations dans le service. Les AVC de l’adulte jeune dans notre étude ont représenté 10,8 % de l’ensemble des AVC durant la même période. Bogousslavsky (4) avait signalé que plus d’un patient sur dix des patients présentant un AVC était âgé de moins de 45 ans.

Plus de la moitié des AVC (53,2%) étaient survenus dans le groupe d’âge de 40 à 45 ans. La fréquence des AVC augmente avec l’âge (24).

L’âge moyen de survenue de l’AVCH est plus tôt que celui de l’AVCI : 36,5±7,5 ans contre 39±6,1 ans. Bogousslavsky (4) avait signalé 35 ans pour l’AVCH et 38 ans pour l’AVCI.
Environ 43,3% des patients victimes d’AVC ont transité par un centre de soins avant d’être référé au CHU Campus. Les antihypertenseurs ont été majoritairement prescrits (52,5 % des patients référés) avant le transfert. La prise en charge de l’ HTA dans les AVC suit un protocole bien codifié sans la nifédipine sublinguale (3). Dans les AVC, l’élévation initiale de la tension artérielle (TA) est physiologique et contribue à l’allongement de la période de pénombre ischémique, ce qui améliore le pronostic évolutif (12).
La plupart des patients (99 %) ont été amenés à l’hôpital par des véhicules non médicalisés à cause de l’absence de services d’aides médicales d’urgence (SAMU). Or l’utilisation des moyens de transport médicalisés pour l’acheminement des patients victimes d’AVC améliore de façon significative leur chance de survie (8).

Dans notre série, 55 % des malades ont été admis au CHU Campus avant la 6ème heure après le début des signes ; 70% avant la 24ème heure. Osserman et al. (17) dans leur étude ont obtenu 55 % d’admission avant la 6ème heure et 98 % avant 24 heures. Selon Rimetz et al. (20), la précocité d’instauration du traitement adéquat améliore le pronostic vital et fonctionnel.

Au total, 39,7% de patients étaient connus hypertendus dans notre travail. Le monitorage de la tension artérielle dans le service avait permis de porter ce taux à 72,3 %. Pour certains l’AVC a été le révélateur de l’HTA méconnue. Selon l’OMS (13) ; WHO (24), près de 62 % des affections vasculaires cérébrales sont attribuées à une tension artérielle élevée. Psaty et al.(19) ont montré que le contrôle de la pression artérielle par le traitement antihypertenseur diminue de façon significative le risque d’AVC, quelle que soit la sévérité de l’HTA.

La prévalence de l’éthylisme a été de 20,6% et celle du tabagisme de 17 %. Wollaert (25), pour tous les âges, avait rapporté 9% de tabagismes et 8 % d’éthylisme dans sa série. Cette discordance dénoterait le taux important d’éthylisme et de tabagisme dans la population jeune. Shinton et al. (22) avaient démontré que le tabagisme chronique augmente le risque de survenue d’AVC. Ce risque s’amenuise de façon significative après l’arrêt de l’intoxication. Sacco et al.(21) avaient montré qu’il existe une association entre la quantité d’alcool absorbée et le risque relatif d’AVC.
Dans notre série, seulement 8 patients (5,7 %) étaient connus diabétiques. Le bilan glycémique avait permis de retrouver 22 patients diabétiques (15,6 %). Bwala (6) au Nigeria a obtenu un résultat similaire (8 %). Selon Mas et Zuber (11), le diabète augmente le risque d’AVC et sa prise en charge ne peut être que bénéfique dans la prévention de l’AVC.

Nous avons noté dans notre étude que 4,9 % des patients ont été victimes d’un AVC antérieur. Burn et al. (5) avaient noté dans une étude qu’il y a 30 % de risque de récidive dans les 5 années qui suivent un premier AVC. L’accident ischémique transitoire (AIT) est un facteur de risque déterminant dans la survenue de l’AVCI.

A l’interrogatoire une notion de cardiopathie a été retrouvée seulement chez 4 patients (2.8 %). A l’ECG, nous avons obtenu 24,1 % de troubles de conduction et 28,9 % de signes d’ischémie. Le taux de 53 % de patients présentant des signes d’une cardiopathie emboligène, montre que très peu de jeunes font des bilans médicaux systématiques au moins une fois l’an. Dans l’étude faite par Bogousslavsky (4) les phénomènes cardio-emboliques ont été évoqués entre 12 % et 1/3 des infarctus cérébraux du jeune adulte.
Nous avons compté dans notre étude 9,2 % d’hypercholestérolémie et 7,1 % d’hypertriglycéridémie. L’OMS (13) estime que dans le monde, l’hypercholestérolémie cause 18 % des AVC. La réduction du taux de cholestérol s’accompagne d’une réduction significative d’AVC mortels (21;23). La réduction de l’hypertriglycéridémie diminue également le risque de survenue des AVC (23).
Les AVCI étaient majoritaires dans notre étude 62,4% contre 37,6% d’AVCH. Bogousslavsky (4) avait obtenu respectivement 82 % et 18 %. D’une façon générale, la plupart des AVC du sujet jeune sont, comme chez les personnes âgées, de nature ischémique (4).

La durée moyenne de séjour (DMS) des AVC a été de 19,9 jours avec des extrêmes de 2 et 56 jours. Balogou et al. (2) avaient déjà rapporté une DMS de 23,1 jours. La DMS des AVCI a été de 13,9 jours avec des extrêmes de 2 et 30 jours ; celle des AVCH a été de 24,3 jours avec des extrêmes de 3 et 56 jours. La différence de la durée de séjour entre les AVCI et les AVCH est due au fait que dans le service de neurologie du CHU Campus, les patients présentant un AVCH sont hospitalisés pour une durée minimum de 30 jours à cause des risques de récidives foudroyantes des 30 premiers jours. Grimmonprez (10) en France a obtenu 11,1 jours comme DMS.
Le taux de mortalité des patients victimes d’AVCH 24,3% est plus élevé que celui de ceux victimes d’AVCI 18,8%. Par contre le taux de dépendance à la sortie est meilleur chez les patients victimes d’AVCH que chez ceux victimes d’AVCI. Bougousslavsky (4) a obtenu un taux de mortalité entre 1,5% et 7,3%. Frih et al. (9) avaient obtenu un taux de mortalité de 8,5% pour l’AVCI. Le taux de mortalité dans notre série et dans les autres travaux africains est plus élevé que dans les séries européennes du fait d’un transfert médicalisé dans le service spécialisé avec un plateau technique de bon niveau, et une prise en charge précoce et adéquate dans les pays européens.

CONCLUSION

La prévention de l’AVC chez l’adulte jeune passe par le dépistage des facteurs de risque. Le dépistage de l’HTA doit être précoce. Celui des autres facteurs de risque doit être généralisé. Le recyclage du personnel médical est indispensable pour éviter la iatrogénie. Nos pays devraient se doter de moyens de transports médicaux qui sont utiles dans toutes les pathologies et surtout dans les urgences neurovasculaires.

Tableau 1 : Répartition des principaux motifs d’hospitalisation

Motifs d’hospitalisation Effectif Pourcentage
Déficit hémi corporel 72 51,1
Troubles de la conscience 68 48,2
Dysarthrie / Aphasie 30 21,3
Vertiges / Troubles de l’équilibre 8 5,7
Syndrome démentiel 3 2,1
Signes méningés 23 16,3

Tableau 2: Tableau récapitulatif comparant les AVCI aux AVCH.

Paramètres AVCI AVCH Total
Nombre 88 (62,4%) 53* (37,6%) 141
Age moyen (ans) 39±7,4 37±6,7 38,4±6,8
Sex- ratio 1,3 0,9 1,2
Admission directe 42 38 80
HTA 57 45 102
Alcoolisme 15 14 29
Tabagisme 14 10 24
Diabète 13 9 22
Cardiopathies 17 7 24
Dyslipidémies 15 8 23
DMS (jours) 13,9 24,3 19,9
Taux de mortalité (%) 18,8 24,3 21

AVCI=accident vasculaire cérébral ischémique ;

AVCH=accident vasculaire cérébral hémorragique ;

HTA= hypertension artérielle ;

DMS= durée moyenne de séjour

* 3 patients ayant présenté un hématome intracérébral récent et des lacunes ischémiques ont été classés dans les AVCH

Figure1

Figure1


REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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