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CLINICAL STUDIES / ETUDES CLINIQUES
 
HYDROCEPHALIE POST-MENINGITIQUE DU NOURRISSON A DAKAR

POST MENINGITIC HYDROCEPHALUS OF THE INFANT IN DAKAR


  1. Service de Neurochirurgie CHU de FANN, Dakar, Senegal

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RÉSUMÉ

Introduction

L’étiologie post-infectieuse de l’hydrocéphalie varie entre 7 et 48 % et reste corrélée au niveau de santé de la population du pays considéré. Elle en constitue la principale cause dans les pays sous-développés. Cependant cette prédominance des hydrocéphalies post-infectieuses à tendance à s’atténuer, surtout chez le nourrisson avec un profil étiologique qui tend vers celui des pays développés. Cette étude a pour objectif de déterminer les raisons de cette diminution.

Matériel et méthodes

Il s’agit d’une étude rétrospective de 2004 à 2008, portant sur 91 nourrissons traités pour hydrocéphalie. Parmi eux, 42 avaient une origine post-méningitique. Le diagnostic d’hydrocéphalie post-méningitique a été établi sur les antécédents de méningite, la bactériologie du LCR et sur l’imagerie (TDM, ETF).

Résultats

L’étiologie post-méningitique représentait 46% des hydrocéphalies. L’âge moyen était de 7,6 mois. La couverture vaccinale optimale était notée dans 7 cas. On notait une prédominance de la méningite à heamophilus influenza avec une forte proportion des méningites à bactériologie négative (30 cas). Nous avons retrouvé dans 32 cas une hydrocéphalie tétraventriculaire. A long terme, seuls 5 enfants ont eu un développement psychomoteur satisfaisant.

Conclusion

L’étiologie post-méningitique des hydrocéphalies reste fréquente en dépit des efforts entrepris dans le domaine de la prévention. Mais beaucoup de progrès reste à faire dans son renforcement et dans la prise en charge précoce des méningites.

Mots clés : Méningite, Hydrocéphalie, Nourrisson


ABSTRACT

Background and Purpose

Post infection aetiology of hydrocephalus varies from 7 to 48% depending on the health level of the country considered. In third world countries, post infection constitutes the most frequent cause of Hydrocephalus, however, their incidence is decreasing especially amongst infants where the aetiologies tends towards those of the developed countries. The aim of this study is to determine the reason for this decrease.

Methods

We conducted a retrospective study from 2004 to 2008 in 91 infants treated for hydrocephalus. Forty-two had a post meningitis aetiology. The diagnosis of post meningitis hydrocephalus was established based on the Past Medical history of Meningitis, CSF analysis and radiological investigations (CT Scan, Transfontannelar ultrasonography)

Results

The post meningitis aetiology accounted for 46% with a mean age of 7.6 months. Optimal vaccination cover in 7 cases. The post meningitis hydrocephalus was dominated by Haemophilus Influenza with a high proportion of sterile bacterial examination, (30 cases). Tetraventricular Hydrocephalus found in 32 cases. In the long term follow up only 5 infants had a satisfactory psychomotor development.

Conclusion

Post meningitis aetiology of hydrocephalus remains frequent regardless of the efforts made in its prevention. However, much progress remains especially in the reinforcement and early treatment of meningitis

INTRODUCTION

L’étiologie post-infectieuse de l’hydrocéphalie varie entre 7 et 48 % (10) et reste corrélée au niveau de santé de la population du pays considéré. Les méningites se compliquent d’hydrocéphalie selon plusieurs mécanismes (9). Si dans les pays occidentaux, l’origine malformative et tumorale constituent les principales causes d’hydrocéphalie, dans les pays sous-développés l’origine infectieuse reste la plus fréquente. Cette prédominance des hydrocéphalies post-infectieuses à tendance à s’atténuer dans notre pratique courante, surtout chez le nourrisson avec un profil étiologique qui tend vers celui des pays développés. Cette étude a ainsi pour objectif de déterminer les raisons de ce recul des hydrocéphalies post-méningitiques.

MATERIELS ET METHODES
Il s’agit d’une étude rétrospective de 2004 à 2008, concernant 91 nouveau-nés et nourrissons reçus pour hydrocéphalie. Le diagnostic d’hydrocéphalie post-méningitique a été établi sur les antécédents de méningite, l’examen bactériologique du LCR, l’imagerie (TDM, ETF).

RESULTATS

Epidémiologie

L’étiologie post-méningitique représentait 42 cas sur les 92 hydrocéphalies prises en charge dans cette tranche d’âge et pendant la même période. On notait une légère prédominance masculine avec un sexe ratio de 1,3 (figure 1). Seuls 7 nourrissons avaient une couverture vaccinale optimale pour les vaccins du programme élargi de vaccination (Tableau 1).

La tranche d’âge de 6 à 12 mois était la plus touchées (11 cas/42). L’âge moyen était de 7,6 mois (Tableau 2).
On notait une prédominance de la méningite à heamophilus influenza avec une forte proportion des méningites à bactériologie négative (30 cas) (Tableau 3).
Dans la majorité des cas l’hydrocéphalie était survenue dans les 2 mois qui ont suivi le début de la méningite (29 cas) (figure 2).

Clinique.

La macrocrânie (28 cas) a été le signe d’alerte associée ou non à des signes neurologiques. La cécité n’a été retrouvée que dans 2 cas. Les principaux signes cliniques sont résumés dans les tableaux 4, 5 et la figure 3.

Paraclinique

L’ETF et/ou la TDM cérébrales ont permis de confirmer le diagnostic d’hydrocéphalie avec quelques fois des signes indirects d’infections du système nerveux central. Le tableau 6 résume les différents types d’hydrocéphalie retrouvés à l’imagerie. L’analyse bactériologique et chimique du LCR a été réalisée après ponction ventriculaire (35 cas) ou ponction lombaire.

Traitement

Dans 37 cas, les patients ont bénéficié d’un traitement chirurgical fait essentiellement d’une dérivation ventriculo-péritonéale après stérilisation du LCR. Quatre enfants n’ont pas pu être dérivés pour des raisons suivantes : un cas d’hydrocéphalie modérée non évolutive, deux décédés avant l’intervention, un cas d’évasion. Les patients ont été opérés après un délai moyen de 3 mois.

Evolution

L’évolution postopératoire immédiate a été simple dans 35 cas. Nous avons eu des complications à type d’infection postopératoire (méningite) dans 5 des cas et de troubles trophiques (escarres pariétales) dans 2 cas.
A long terme, seuls 14 enfants ont été revus en consultation. Parmi eux, seulement 5 enfants ont eu un développement psychomoteur satisfaisant. Les autres présentaient des séquelles à type de retard psychomoteur, d’hypertonie, d’épilepsie, de surdité et de cécité.

DISCUSSION

La fréquence de survenue d’une hydrocéphalie au cours de l’évolution de la méningite est très variable allant de 5 % (2) à 62,5% (5). Dans notre série, 20 % des méningites se sont compliquées d’hydrocéphalie, taux relativement faible si on le compare aux séries sub-sahariennes à savoir : au Cameroun (7), en Côte d’ivoire (6) et au Nigeria (14) qui ont retrouvés respectivement 30% ; 54 % et 28%. Cependant ces taux restent élevés par rapport aux séries européenne et magrébine du faite de la qualité de leur prise en charge (consultation précoce, antibiothérapie bien conduite sans fenêtre thérapeutique) des méningites, qui reste endémique dans plusieurs régions tropicales. Cette fréquence est même sous estimée car beaucoup de cas sont taxés de « neuropaludisme ». Depuis quelques années cette prédominance des hydrocéphalies post-infectieuses commence à s’atténuer grâce à l’efficacité de la prévention, notamment des programmes élargis de vaccination qui sont systématiques et qui touchent actuellement une grande partie de la population (Plus de 77 % à Dakar selon le Ministère de la Santé). Le délai « d’apparition » de l’hydrocéphalie par rapport au début de la méningite est variable et dépend du mécanisme de l’hydrocéphalie. Mais dans la majorité des cas, l’hydrocéphalie survient au cours de la phase aigue de la méningite (1,8), ce qui s’est confirmée dans notre série. Dans notre pratique, ce diagnostic se fait plus précocement, du fait de la réalisation systématique de l’ETF ou de la tomodensitométrie cérébrales dans la surveillance des méningites. L’heamophilus influenzae et le streptocoque pneumoniae sont les germes les plus rencontrés dans de nombreuses séries africaines (1,6), même si on note des proportions importantes de bactériologies négatives (71,4 % dans notre série). Ceci n’est pas surprenant du fait des méningites décapitées par l’automédication et surtout de la proportion non négligeable des méningites virales, car dans la majorité des cas, la recherche étiologique se limite à la bactériologie. En effet le diagnostic virologique des méningites n’est pas de routine dans de nombreux pays africains. Le mécanisme de survenue de l’hydrocéphalie au cours de la méningite peut être obstructif, ou par l’intermédiaire d’une fibrose des villosités arachnoïdiennes (4,6). L’hydrocéphalie obstructive post-méningitique était considérée comme l’apanage de la méningite tuberculeuse (11), mais d’autres germes ont été également incriminés à savoir le Streptocoque Pneumoniae, le Klebsiella Pneumoniae, le Viridans Streptococci, le Listeria Monocytogenes, l’herpes simplex type 1 et 2 (8,9). C’est la fibrose des villosités qui a été retenue dans notre série, pour expliquer les 76,19% d’hydrocéphalies tétraventiculaires. Ceci concorde avec les données de la littérature (3,6). Dans notre série la mortalité (4.76%) est comparable à la mortalité des autres hydrocéphalies non tumorale (13,15). Cependant les hydrocéphalies néonatales post méningitiques et post-hémorragiques sont souvent considérées comme ayant le pronostic intellectuel le plus péjoratif (12). Ce pronostic dépend essentiellement de la qualité de la prise en charge initiale de la méningite et de la rapidité de la dérivation, qui n’est pas systématique si l’hydrocéphalie n’est plus évolutive. On s’est aidée dans certains cas, d’une dérivation ventriculaire externe lorsque l’hydrocéphalie était menaçante ; mais dans la majorité des cas, une surveillance clinique était instituée pour apprécier de l’évolutivité de cette hydrocéphalie avant de décider de la dérivation.

La quasi totalité des patients opérés ont bénéficié d’une dérivation ventriculo-péritonéale. Le coût encore élevé des shunts, leurs complications fréquentes devront sans doute nous conduire à réviser notre procédure. L’endoscopie, disponible à Dakar semble être une alternative intéressante .Des facteurs prédictifs de réussite de cette technique ont été isolés : l’âge, la perméabilité de l’aqueduc du mésencéphale (16). Des études prospectives dans d’autres régions africaines devraient pouvoir lever les dernières équivoques.

CONCLUSION

L’étiologie post-méningitique des hydrocéphalies reste fréquente en dépit des efforts entrepris dans le domaine de la prévention par la généralisation des programmes élargis de vaccination, même si l’écart se réduit entre les pays développés et sous-développés. Beaucoup reste cependant à faire dans sensibilisation des populations pour adhérer au programme et dans le renforcement des moyens diagnostiques et thérapeutiques.


Tableau 1 : répartition des patients selon la couverture vaccinale (PEV).

Nombre Pourcentage
CV totale 7 16,67 %
CV partielle 13 30,95 %
CV absente* 22 52,38 %
Total 42 100

Dans la majorité des cas l’information concernant la couverture vaccinale est donnée par les parents


Tableau 2 : Répartition des malades en fonction de la tranche d’âge

Nouveau – Né 4 9,5 %
1-3 Mois 8 19,1 %
3-6 Mois 9 21,4 %
6 mois à 1 an 11 26,2 %
1-2 ans 10 23,8 %
Total 42 100 %

Tableau 3 : Bactériologie du LCR

Nombre Pourcentage
Heamophilus influenza 4 9,5 %
Entérobacter 3 7,1 %
Streptocoque B 2 4,8 %
Streptococcus pneumonia 2 4,8 %
Bacille gram négatif 1 2,4 %
Non identifié ou décapité 30 71,4 %
Total 42 100 %

Tableau 4 : Répartition des patients selon le périmètre crânien.

Nombre de cas Pourcentage
+ 3 DS* 28 66,7 %
+2 DS 7 16,7 %
+1 DS 3 7,1 %
Normal 4 9,5 %
Total 42 100 %

* Dérivation Standard.


Tableau 5 : répartition des patients selon le type d’hydrocéphalie.

Patients Pourcentage
H*. Monoventriculaire 1 2,38 %
H. Diventriculaire 1 2,38 %
H. Triventriculaire 8 19,04 %
H. Tétraventiculaire 32 76,19 %
Total 42 100 %

* Hydrocéphalie.


Figure 1

Figure 1


Figure 2

Figure 2


Figure 3



BIBLIOGRAPHIE.

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