AJNS
CLINICAL STUDIES / ETUDES CLINIQUES
 
TROUBLES COGNITIFS POST ACCIDENTS VASCULAIRES CEREBRAUX A DOUALA (CAMEROUN)

POST STROKE COGNITIVE IMPAIRMENT IN DOUALA (CAMEROON)


  1. Faculté de Médecine et des Sciences Pharmaceutiques, Université de Douala, Hôpital Général de Douala, Cameroun
  2. Département de chirurgie, Faculté de Médecine et des Sciences Biomédicales Université de Yaoundé I
  3. Faculté des Sciences de la santé, Université de Buea, Cameroun
  4. Department of Neurology, FANN Teaching Hospital, Dakar, Senegal
  5. Faculté de Médecine et des Sciences Biomédicales, Université de Yaoundé I, Hôpital Général de Douala, Cameroun

E-Mail Contact - MAPOURE NJANKOUO Yacouba : mapoureyacouba@gmail.com


RESUME

Introduction

Les troubles cognitifs peuvent être des séquelles après un accident vasculaire cérébral (AVC). Leur incidence est d’autant plus élevée avec la population vieillissante, l’augmentation de la prévalence des facteurs de risque cérébrovasculaire, et la diminution du taux de mortalité post AVC.

Objectif

Déterminer la prévalence des troubles cognitifs post AVC et les facteurs associés à l’Hôpital Général de Douala (HGD).

Méthode

Il s’agissait d’une étude transversale analytique menée à l’unité de Neurologie de l’HGD sur une période de 6 mois. Etait inclus dans l’étude tout patient âgé de plus de 15 ans, ayant eu un premier épisode d’AVC confirmé par une imagerie cérébrale et datant d’au moins 3 mois. Nous avons exclu tout patient présentant des troubles cognitifs avant l’AVC, ayant une autre cause de troubles cognitifs et aphasique. Les cas d’hémorragie sous arachnoïdienne ou de thrombose veineuse cérébrale étaient aussi exclus. Les données sociodémographiques, cliniques et d’imagerie médicale cérébrale ont été recueillies à l’aide d’un questionnaire. Le diagnostic de trouble cognitif s’est fait à l’aide du Mini Mental State Examination (MMSE). La démence était diagnostiquée chez les patients ayant des troubles cognitifs sévères à l’aide du DSM IV. Les données ont été analysées à l’aide du logiciel SPSS version 20. Le test de T de Student et le test de Khi-2 ont été utilisés pour comparer respectivement les variables quantitatives et qualitatives. L’analyse des facteurs déterminants l’apparition des troubles cognitifs post AVC a été réalisée en utilisant le modèle de régression logistique multivariée. Le seuil de signification statistique a été fixé à 0,05.

Résultats

Au total, 114 participants étaient inclus, dont 51,8% d’hommes. L’âge moyen était de 57,2 ± 9,9 ans. 51,8% des patients avaient un niveau d’instruction correspondant au secondaire. Le principal facteur de risque cérébro-vasculaire était l’hypertension artérielle (73,2%). Les AVC ischémiques représentaient 63,9%. La prévalence des troubles cognitifs était de 41,2%. Les troubles cognitifs étaient légers, modérés et sévères (démence) respectivement à 26,3%, 8,8% et 6,1%. Après analyse univariée, les facteurs associés aux troubles cognitifs étaient le sexe féminin (P = 0,02), le niveau d’instruction < 7 ans de scolarité (P <0,001), la profession (P=0,005) et les cardiopathies (P=0,04). Seul le niveau d'instruction < 7 ans de scolarité était apparu comme prédictif de la survenue des troubles cognitifs (OR: 12,42 ; IC : [3,3 - 46,6] ; P < 0,001). Conclusion

Trois patients sur cinq victimes d’AVC présentent des troubles cognitifs. La démence est rare. La prévention primaire et l’accès à l’éducation au plus grand nombre de la population pourraient réduire l’impact des troubles cognitifs post AVC.

Mots- clés: Accident vasculaire cérébral, Cameroun, Douala, Troubles cognitifs,


ABSTRACT

Background

Cognitive impairment (CI) are possible sequelae after stroke. Data on post stroke CI in Sub Saharan Africa are scarce.

Objective

To assess post stroke CI at the Douala General Hospital (DGH).

Method

We carried out a cross-sectional study at the Neurology Unit of the DGH over a period of 6 months. Were included in the study, all patients above 15 years old with a first episode of stroke confirmed by brain imaging since at least 3 months back, and followed at the DGH. We excluded any patient with prior CI before the stroke onset, or/and with any other condition which may explain CI. Patients with subarachnoid haemorrhage or cerebral venous thrombosis were also excluded. Diagnosis of CI was made using the MMSE and the DSM IV criteria was used to confirm dementia. Data was analyzed using SPSS Version 20. The Student T test and the Chi-2 test were used to compare quantitative and qualitative variables, respectively. Factors associated and predicted of CI post stroke were identifying using logistic regression. The statistical significance was set at p < 0.05. Results

A total of 114 stroke patients were included with 51.8% being male and the mean age was 57.2 ± 9.9 years. The major cerebrovascular risk factor was hypertension (73.2%) and 51.8% of patients had attended at least secondary school. Ischemic stroke accounted for 63.9%. The prevalence of CI was 41.2%. Cognitive disorders were categorized as mild (26.3%), moderate (8.8%), and severe (dementia) (6.1%). Factors associated with CI were female gender (P = 0.02), education level < 7 years (P<0.001), lack of occupation (P=0.005) and cardiopathy (P=0.04). After multivariate analysis, only the educational level < 7 years was independently associated with CI (OR 12.42, CI [3.3 to 46.6]; P < 0.001). Conclusion

The prevalence of post stroke CI at the DGH is high. Only the low level of education appeared to be an independent predictor of post stroke CI in this study.

Keys word: Stroke, Cameroon, Cognitive impairment, Douala.


INTRODUCTION

Les AVC constituent la deuxième cause de mortalité dans le monde et seraient responsables de 6, 2 millions de décès en 2008 [17]. Ils représentent la première cause d’handicap physique de l’adulte, une cause fréquente de dépression chez les patients et leurs proches [10], et sont responsables de troubles cognitifs. En effet, les AVC représentent la seconde cause de démence, qui touche environ 7% de la population mondiale de plus de 65 ans, et 30% des personnes âgées de plus de 80 ans [16]. En Afrique Subsaharienne, une étude menée sur les démences incluant le Benin, la République Centrafricaine et la République du Congo note que les démences vasculaires représentent 21.5% des démences de la population d’étude [11]. Les troubles cognitifs et la démence post-AVC sont observés chez environ 50 % des patients victimes d’AVC [5]. Ils compromettent la récupération fonctionnelle, le maintien au domicile et majorent le risque de décès [4]. On note que 15 à 20% des patients décèdent au terme du premier mois après un AVC, et des séquelles fonctionnelles sont observées chez 60 à 75% des survivants, manifestées par troubles moteurs et locomoteurs, les syndromes anxio-dépressifs et les troubles cognitifs et comportementaux [8].

Au Cameroun, la mortalité hospitalière due aux AVC est élevée, et estimée entre 24 et 27% [12, 14]. Par ailleurs, les coûts de soins de santé des patients victimes d’AVC sont onéreux ayant ainsi un impact sur la qualité de vie et la survie des patients [13]. Cette survie est estimée au troisième et au douzième mois respectivement à 30,8%, et à 22,8%, la récupération fonctionnelle étant meilleure pour les tranches d’âge inferieures à 45 ans [14]. A ce jour, les données concernant les troubles cognitifs post AVC sont rares en Afrique subsaharienne d’où l’intérêt de notre étude menée à l’Hôpital Général de Douala (HGD).

METHODOLOGIE

Cadre de l’étude

Elle s’est déroulée dans l’unité de Neurologie du service de Médecine Interne de l’HGD, à vocation universitaire située au sommet de la pyramide sanitaire camerounaise. L’Unité de Neurologie comporte quatre neurologues et est dotée de deux appareils d’électro-encéphalographie et d’un appareil d’électromyographie. Le service de radiologie dispose d’un scanner qui fonctionne 24 heures sur 24 et est doté depuis janvier 2015 d’une IRM 0,4 tesla.

Type d’étude

Il s’agissait d’une étude transversale analytique à l’Unité de Neurologie d’Octobre 2014 à Avril 2015. La technique d’échantillonnage utilisée était non probabiliste, basée sur le recrutement exhaustif en consultation externe des personnes ayant eu un AVC et obéissant aux critères d’inclusion.

Critère d’inclusion

Etaient inclus dans l’étude tout patient âgé de plus de 15 ans, ayant eu un premier épisode d’AVC confirmé par une imagerie cérébrale, datant d’au moins 3 mois et suivi à l’HGD.

Critère d’exclusion

Nous avons exclu :
– tout patient présentant des troubles cognitifs avant l’AVC,
– tout patient ayant une autre cause de troubles cognitifs au moment de l’AVC
– les patients aphasiques,
– les cas d’hémorragie sous arachnoïdienne et
– de thrombose veineuse cérébrale.

Collecte de données

La collecte des données s’est déroulée au travers d’un recensement des patients suivis à l’HGD avant le 31 Janvier 2015. Nous avons procédé au recrutement des patients venus en consultation externe dans le cadre d’un suivi post AVC. Les patients n’ayant pas honoré à leur rendez-vous trimestriel en consultation ont été contactés par appel téléphonique. Les données sociodémographiques, cliniques et d’imagerie médicale cérébrale ont été recueillies à l’aide d’un questionnaire en utilisant le dossier médical des patients. Le diagnostic de trouble cognitif s’est fait à l’aide du MMSE effectué en langue française ou anglaise avec la nécessité d’un traducteur de langue locale (autre personnel médical ou tuteur) si le participant ne s’exprimait pas dans les deux langues officielles.

L’interprétation du MMSE s’est faite comme suit :

  • Score de 25 à 30 : Pas de troubles cognitifs
  • Score de 20 à 24 : Troubles cognitifs légers
  • Score de 15 à 19 : Troubles cognitifs modérés
  • Score < 15 : Troubles cognitifs sévères (démence)

Pour les patients ayants un MME < 15 (déments), nous confirmions le diagnostic de démence en utilisant les critères de DSM IV. Analyse de données

Les données du questionnaire ont été analysées grâce au logiciel d’analyse statistique SPSS version 20. Les variables quantitatives ont été présentées sous forme de moyenne, et d’écart type, accompagnés des extrêmes. Les variables qualitatives ont été présentées sous forme de fréquence et de pourcentage. L’association entre 2 variables qualitatives a été évaluée par le test de Khi-2 ou celui de Fischer. Le test T de Student a été utilisé pour évaluer l’association entre 2 variables quantitatives. La recherche facteurs indépendant déterminant l’apparition des troubles cognitifs post AVC a été faite dans un premier temps par une analyse univariée grâce au test de Khi-2. Les variables pour lesquelles le seuil de signification statistique était inférieur à 0,20 en analyse univariée ont été introduites dans un modèle de régression logistique pour une analyse multivariée. Le seuil de signification statistique a été inférieur à 0,05, et l’écart de confiance à 95%.

Considérations éthiques

Ce travail a reçu l’approbation du Comité Institutionnel d’Ethique de l’Université de Douala. La confidentialité des données et l’identité des patients étaient préservés.

RESULTATS

Au total, 114 participants répondaient aux critères d’inclusion. Le sexe ratio hommes/femmes était de 1,1. L’âge moyen des participants était de 57,2 ± 9,9 ans [IC95% :55,4 – 59] avec des extrêmes allant de 30 à 83 ans. L’âge moyen des hommes était de 55,4 ± 10 ans contre 59,1 ± 9,6 ans chez les femmes, avec une différence significative (P = 0,04). Les autres caractéristiques socio-démographiques sont contenues dans le tableau I. Le principal facteur de risque cérébro-vasculaire avant l’AVC était l’HTA (73,2%) (Tableau II). A l’admission, 19,4% des patients présentaient une hyperthermie et 4,4% étaient comateux (Tableau III). Les AVC ischémiques étaient retrouvés chez 63,9% de patients contre 36,1% d’AVC hémorragiques. L’hémisphère cérébral le plus atteint était l’hémisphère gauche (64,9%).

Les troubles cognitifs étaient retrouvés chez 41,2% des participants. Les troubles cognitifs légers étaient retrouvés chez 26,3% participants contre 8,8% participants pour les troubles modérés. La démence était retrouvée chez 6,1% des participants. La prévalence des troubles cognitifs, respectivement à M3, M6, M12, M24, M36 et M48 et plus était estimée respectivement à 60%, 45%, 45,5%, 47%, 33,3% et 29,6%. (Figure 1). Par ailleurs, il n’existait pas de différence significative entre les patients évalués à M3 et les autres (P= 0,2). Les troubles cognitifs ont été retrouvés chez les patients de sexe féminin dans une proportion de 66%, contre 34% chez les hommes, avec une différence significative : P= 0,02. L’âge moyen des participants avec troubles cognitifs était de 60,1 ± 9,6 ans. Les extrêmes étant de 30 à 80 ans. Le niveau d’instruction le plus incriminé dans l’apparition des troubles cognitifs était le primaire, soit 46,8%. Outre le niveau d’instruction < 7ans de scolarité et l'âge, l'existence d'une profession et de cardiopathies étaient associées aux troubles cognitifs. L'AVC ischémique était retrouvé chez 40,6% des patients avec troubles cognitifs. Il n'existait pas de différence significative avec les patients sans troubles cognitifs. Après analyse multi variée, seul le niveau d'instruction < 7 ans était prédictif de la survenue troubles cognitifs (OR: 12,42; IC 3,3 - 46,6 ; P < 0,001) (Tableau IV).


Tableau I : Répartition des caractéristiques sociodémographiques

Caractéristiques sociodémographiques Effectifs (n) Pourcentage (%)
Sexe
Féminin 55 48,2
Masculin 59 51,8
Niveau d’instruction
Analphabète 3 2,6
Primaire 27 23,7
Secondaire 59 51,8
Universitaire 25 21,9
Etat civil
Célibataire 11 10,2
Marié 77 71,3
Divorcé 5 4,6
Veuf 15 13,9
Profession
Travailleurs 58 53,7
Non travailleurs 50 46,3
Prise en charge des coûts de soins
Assurance 19 16,7
Personnel/Famille 95 83,3

Tableau II : Répartition des facteurs de risque cérébro-vasculaire

Facteurs de risque Effectif (n) Pourcentage (%)
HTA
Non hypertendus 29 26,8
Hypertendus 79 73,2
Diabète
Non diabétiques 92 85,2
Diabétiques 16 14,8
Dyslipidémie
Non dyslipidémiques 99 91,7
Dyslipidémiques 9 08,3
Tabagisme
Non tabagiques 89 82,4
tabagiques 19 17,6
Alcoolisme
Non alcooliques 64 59,3
Alcooliques 44 40,7
IMC (kg.m2)
18,5 – 24,9 56 51,8
≥25 52 48,2
Sédentarité
Non sédentaires 31 28,7
Sédentaires 77 71,3
Cardiopathie
Pas de cardiopathie 70 64,8
HVG 21 19,4
ACFA 6 5,6
Insuffisance valvulaire 5 4,6
Les autres 6 5,6

Tableau III : Caractéristiques cliniques des patients à l’admission

Paramètres Effectif (n) Pourcentage (%)
Température (°C)
T°<38,5 87 80,6
T°>38,5 20 19,4
Coma
Glasgow>9 109 95,6
Glasgow<9 5 4,4
Score de NIHSS (/42)
<14 57 82,6
>14 12 17,4
Sa O2
<94% 111 98,1
>94% 2 1,9
Glycémie capillaire (g/l)
<1,26 57 62
>1,26 35 38
Complications
Aucune 86 75,4
Infection urinaire 09 7,9
Veinite 07 6,1
Paludisme 06 5,3
Autres 06 5,3

Figure1-2.png


Tableau IV : Facteurs associés aux troubles cognitifs en post AVC

Variable Odd Ratio ajusté IC 95% P-value
Age (≤ 65 ans / > 65 ans) 1,46 0,4 – 5,5 0,6
Sexe (Féminin / Masculin) 1,74 0,6 – 4,9 0,3
Niveau d’instruction (0-6 ans / 7 ans et plus) 12,42 3,3 – 46,6 <0,001
Statut matrimonial (Marié / Non marié) 1,38 0,4 – 4,6 0,6
Profession (Oui / Non) 2,15 0,6 – 6,9 0,2
HTA (Oui / Non) 0,65 0,2 – 1,9 0,4
IMC (IMC normal / IMC anormal) 2,56 0,9 – 7 0,06
Cardiopathie (Oui / Non) 2,88 0,9 – 8,7 0,06
Complication (Oui / Non) 0,34 0,1 – 1,02 0,05

DISCUSSION

Après évaluation des participants ayant eu un premier AVC datant d’au moins 3 mois, la prévalence des troubles cognitifs dans notre étude était de 41,2%, avec une prévalence à 3 mois et 6 mois respectivement de 60 et 45%. Trois mois après l’AVC, Akinyemi et al [1] au Nigeria en 2014 rapportaient une prévalence de 35% sur 217 patients. D’autres études en Afrique Subsaharienne utilisant aussi le MMSE ont rapporté des résultats divergents. Ainsi, Gnonlonfoun et al [5] au Benin en 2014 ont trouvé une prévalence de 20% à 6 mois, dans un échantillon de 100 patients, tandis que Mukisa et al [15] en Ouganda en 2011 rapportaient une prévalence de 63% dans un échantillon de 85 patients. Aux Etats Unis, Patel et al [18] en 2002 utilisant le MMSE rapportent une prévalence de 38% à 3 mois post AVC sur un échantillon de 645 patients, alors que Arauz et al [2] au Mexique en 2014 utilisant le IQCODE (Informant Questionnaire of Cognitive Decline in the Elderly) trouvaient 41% de patients avec une déficience cognitive 3 mois post AVC dans une population de 110 patients. En Europe et en Asie, l’on recueille des prévalences plus élevées. En Finlande, Pohjasvaara et al [19] en 1997 utilisant le MMSE trouvaient une prévalence de troubles cognitifs à 61% post AVC. Récemment en France, Garcia et al en 2013 en France [4], ont rapporté une prévalence de 77% de troubles cognitifs après une hémorragie cérébrale en utilisant des tests neuropsychologiques. En 2014, Jacquin et al [9] trouvaient une prévalence de 47,3% à 3 mois en utilisant à la fois le MMSE et le MoCA (Montreal Cognitive Assessement). En Asie, Tang et al [20] en 2011 en Chine rapportent une prévalence de troubles cognitifs post AVC de 54,8%, avec le MMSE tandis que Tham et al. [21] à Singapour en 2002 trouvaient 40% de troubles cognitifs et 4% de démence 6 mois après un AVC utilisant les mêmes critères que notre étude. Les différences entre les prévalences des troubles cognitifs pourraient être liés à l’outil diagnostic utilisé mais surtout des facteurs associés ou prédictifs. Si le MMSE reste l’outil de dépistage simple, facile d’utilisation en consultation de routine notamment dans les contextes où le taux de scolarisation est bas, il possède néanmoins des limites qui avaient fait introduire le MoCA comme outil alternatif au diagnostic des troubles cognitifs post AVC. Seulement, en 2011, Godefroy et al. comparent le MMSE et le MoCA dans le diagnostic des troubles cognitifs post AVC. Il en ressortait que le MoCA avait une sensibilité élevée (94%) mais une spécificité faible (42%) contre 66% et 97% respectivement pour le MMSE. Après ajustement, l’aire sous la courbe était supérieure à 88% et montrait que les tests pouvaient s’utiliser [6]. C’est ainsi que d’autres tests plus élaborés ont été mis au point pour mieux diagnostiquer la démence vasculaire :la National Institute of Neurological Disorder and Stroke-Association Internationale pour la Recherche et l’Enseignement en Neurosciences (NINDS-AIREN) [7] avec d’autres outils en cours de validation pour le diagnostic de troubles cognitifs vasculaires sans démence. Plusieurs facteurs étaient associés à la présence de troubles cognitifs post AVC dans notre série et seul le niveau d’instruction < 7 ans de scolarité est apparu comme facteur prédictif des troubles cognitifs post AVC. Le faible niveau d'instruction, l'insuffisance de consommation de poisson [1], l'âge avancé [15] et les convulsions [5] ont été rapportés par d'autres auteurs africains comme facteurs prédictifs des troubles cognitifs post AVC. Dans les pays occidentaux, en dehors de l'âge avancé, du bas niveau d'instruction, les auteurs ont rapporté le bas niveau socio-économique, l'atteinte hémisphérique gauche [18] notamment les sites stratégiques, l'atteinte sévère de la substance blanche et la sévérité de l'AVC à l'admission [3] comme facteurs prédictifs de l'existence de troubles cognitifs. Concernant la sévérité des troubles cognitifs, la démence vasculaire était retrouvée chez 7 patients (6,1%) contre 20% en Ouganda [15], absence de cas dans la série nigériane [1] et 7,3% en France [9]. La disparité entre nos trouvailles et celle de la série Ougandaise ne trouve pas d'explication car ayant utilisé le même outil diagnostic. Seulement, leur article ne précise par les comorbidités cérébro-vasculaires de leurs patients qui nous auraient permis de comparer d'autres facteurs pouvant influencer cette prévalence tels que l'hypertension artérielle, le diabète et la dyslipidémie. La série nigériane a utilisé les critères du guideline de l'American Heart Association et American Stroke Association couplés au DSM IV qui représentent les méthodes plus spécifiques pour le diagnostic de la démence. Les limites de ce travail résident sur l'outil diagnostic utilisé (MMSE) qui mérite d'être adapté au mode de vie du sujet africain dans son milieu et peut-être la taille de l'échantillon quoi que supérieure à la plupart des travaux cités. Touré et al. ont développé un outil appelé Test du Sénégal qui évalue l'orientation, la mémoire, l'attention/calcul, la praxie et le langage avec un score qui va de 0 à 39 points. Ce test permet d'identifier les cas de démence avec une sensibilité et une spécificité de 93,1% et 89,6%. L'âge et l'éducation (contrairement au MMSE) n'ont pas d'influence sur la performance au Test du Sénégal. CONCLUSION

Trois patients sur cinq victimes d’AVC présentent des troubles cognitifs. La démence est rare. La prévention primaire et l’accès à l’éducation au plus grand nombre de la population pourraient réduire les troubles cognitifs post AVC.



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