CASE REPORT / CAS CLINIQUE
CAVERNOME INTRAMEDULLAIRE: A PROPOS D’UN CAS
INTRAMEDULLARY CAVERNOMA: CASE REPORT
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RESUME Le cavernome intramédullaire, malformation vasculaire rare, représente environ 5 à 12 % des malformations vasculaires spinales et 3 % des malformations vasculaires intra-durales. Il peut être longtemps asymptomatique ou se manifester par une altération brutale ou progressive des fonctions médullaires. Le diagnostic repose sur l’imagerie par résonance magnétique (IRM) médullaire et l’anatomo-pathologie. La chirurgie représente l’essentiel de la prise en charge, néanmoins elle n’est pas dénudée de complications. Nous rapportons un cas de cavernome intramédullaire chez une patiente de 24 ans, admise dans un tableau de compression médullaire dorsale lente avec une paraparésie évoluant depuis 2 ans. L’IRM médullaire a objectivé une lésion intramédullaire en regard deT7-T8. La patiente a bénéficié d’une exérèse totale de la tumeur et l’histologie a confirmé le cavernome intramédullaire. L’évolution a été marquée par une aggravation partielle du déficit moteur. A travers cette observation, les auteurs discutent les aspects cliniques, radiologiques ainsi que la prise en charge de cette pathologie rare. Mots cléfs : Cavernome, intramédullaire, malformation vasculaire SUMMARY Intramedullary cavernoma is a rare vascular malformation. It accounts for about 5 % to 12% of spinal vascular malformations and 3% of the intradural vascular malformations. It may be asymptomatic for a long time or be responsible for a progressive or sudden alteration of marrow functions. Its diagnostic relies on a magnetic resonance imaging (MRI) of the medulla and an anatomic pathology. Surgery constitutes its main management; nevertheless, surgery is not exempted from complications. We report a case of intramedullary cavernoma in a 24 year-old female patient, admitted for a slow spinal cord compression with a paraparesis that has been progressing for two years. MRI of the medulla objectified an intramedullary lesion at T7-T8. A complete exeresis of the tumor was performed on the patient, and intramedullary cavernoma was confirmed histologically. The clinical course was characterized by a partial aggravation of motor deficit. Through this case report, the authors discuss clinical and radiological aspects, as well as management of this rare disease. Keywords: cavernoma, intramedullary, vascular malformation INTRODUCTION Le cavernome est une malformation vasculaire définie par la présence de cavités vasculaires sans interposition de tissu nerveux (11). La localisation intramédullaire est rare, elle représente environ 5 % à 12 % des malformations vasculaires spinales et 3 % de malformations vasculaires intra-durales (21). Il peut être longtemps asymptomatique, ou être responsable d’une altération progressive ou brutale des fonctions médullaires. Son diagnostic repose sur l’imagerie par résonance magnétique (IRM) et l’anatomo-pathologie. La chirurgie n’est pas toujours dénudée de complications. Nous rapportons un cas de cavernome intramédullaire dorsal et nous discuterons les aspects cliniques et radiologiques ainsi que les indications chirurgicales. CAS CLINIQUE Il s’agit d’une patiente âgée de 24 ans, sans antécédents pathologiques particuliers, qui a présenté des dorsalgies en regard de T7-T8 avec une faiblesse des deux membres inférieurs évoluant de façon progressive depuis 2 ans. Cette symptomatologie s’est compliquée de troubles sphinctériens à type d’incontinence urinaire et de constipation. L’examen clinique a relevé une paraparésie spastique cotée à 3/5, avec un niveau sensitif ombilical. Les réflexes ostéotendineux rotuliens et achilléens étaient vifs aux deux membres inférieurs. L’imagerie par résonance magnétique dorso-lombaire a visualisé la présence d’une lésion ovalaire intramédullaire en regard de T7-T8 en iso-signal en T1, hyper-signal hétérogène en T2, entouré d’un liseré en hypo-signal T1 (figure 1). Le diagnostic de cavernome a été fortement suspecté. L’indication chirurgicale a été posée devant l’aggravation progressive de la symptomatologie neurologique. A travers une laminectomie de T7 et T8, une ouverture et suspension de la dure-mère, la tumeur est apparue sous la forme d’une voussure rouge grisâtre, ferme, non aspirable et peu hémorragique. Sous microscopie opératoire, l’ablation totale de celle-ci a été réalisée sans incident. Les suites postopératoires ont été marquées par une aggravation partielle du déficit moteur. L’IRM médullaire de contrôle réalisé 48 heures post opératoire a montré une cavité résiduelle sans résidu tumoral ni hématome (figure 2). L’examen anatomopathologique a confirmé le diagnostic de cavernome (figure 3). La patiente a été transférée dans un centre de rééducation spécialisée pour un complément de prise en charge. Après 14 mois de suivi, elle marche avec une aide. DISCUSSION Le cavernome est une agglomération bien circonscrite de pseudocapillaires. Synonyme de malformation caverneuse, d’angiome caverneux ou d’hémangiome caverneux et anciennement appelé lésion angiographiquement occulte ou “ cryptique“ (18), il entre dans le groupe des hamartomes vasculaires (15). Etiopathogénie Le cavernome est une lésion vasculaire rare, il peut se localiser n’importe où dans le système nerveux central (SNC), plus fréquemment au niveau hémisphérique (12). La localisation intramédullaire est extrêmement rare (7, 10). Depuis sa première description en 1912 (3,4), seuls quelques cas isolés ont été publiées dans la littérature (6). Il représente environ 5 à 12 % des malformations vasculaires spinales et 3 % des malformations vasculaires intra-durale (6, 9, 10, 12). Lefranc (15) dans une série de 368 tumeurs intramédullaires opérées, a noté 24 cas de cavernome intramédullaire soit 6.5% de cas. L’origine de ces malformations est mal connue, mais elles sembleraient plus fréquentes chez les femmes avec un pic de fréquence entre 30 et 60 ans, dont environ 55% des cas localisés à l’étage dorsale (12). Des formes familiales ont été décrites dans près de la moitié des cas (20). Anatomopathologie Le cavernome est une masse vasculaire, bien limitée, rougeâtre de 1 à 3 cm de diamètre, de surface polylobée, constitués de cavités juxtaposées séparées par des cloisons minces (1,5). Le tissu nerveux avoisinant peut être le siège de gliose ou de remaniements hémorragiques (5). Ces cavités sont pleines d’hématies et sont séparées par des parois recouvertes de collagène doublé d’un épithélium (5,10). Du fait de la faible circulation sanguine intra-cavitaire, des thrombus peuvent être présents et sont à l’origine des calcifications et de la fibrose (1, 3). Présentation Clinique Le tableau clinique des cavernomes intramédullaires est variable (11), ils peuvent rester longtemps asymptomatiques ou se manifester par un déficit neurologique brutal ou progressif. La manifestation aigue sous forme d’une paraplégie ou une tétraplégie est souvent en rapport avec un saignement intra-tumoral soit spontané ou à la suite d’un traumatisme minime, d’un effort physique ou au cours de la grossesse (14, 24, 26, 27). L’augmentation progressive du volume du cavernome explique le tableau clinique d’une compression médullaire lente comme dans notre cas. Les formes asymptomatiques sont découvertes à la suite d’un bilan radiologique par résonance magnétique de la colonne vertébrale (11,26). En effet près de 50% de patients présente des rachialgies chroniques, des douleurs radiculaires ou cordonale (13). Barnwell (2), à propos d’une série de 7 cas, a mis en évidence l’apparition des déficits essentiellement sensitifs et d’aggravation progressive et a noté l’apparition fréquente d’un syndrome de Brown-Séquard. La récidive hémorragique en l’absence de traitement semble être la règle, en fin L’effet toxique direct des dépôts d’hémosidérine au pourtour du cavernome ou des remaniements de la microcirculation avoisinante ont également été incriminés (25). Diagnostic radiologique Le diagnostic radiologique des cavernomes intramédullaires a connu un énorme progrès grâce à l’imagerie par résonnance magnétique. En effet, elle constitue actuellement l’examen de choix permettant d’évoquer fortement le diagnostic de cavernome dans sa forme typique (11, 22,24). Ceci explique l’augmentation des cas décrits dans littérature ses dernières années. Le cavernome se présente comme une lésion focale dont l’aspect est plus caractéristique en IRM qu’en tomodensitométrie (TDM) (27,28). En TDM, la lésion est une hyperdensité intra-canalaire se rehaussant modérément après contraste ; très rarement, on retrouve des calcifications. En IRM médullaire, le diagnostic de cavernome peut prendre plusieurs aspects. Zabramski (28) a décrit en 1994 une classification IRM des cavernomes en quatre types. Le type I correspond à des hyper signaux en Tl et T2 liés à une hémorragie récente et à des phénomènes de thrombose subaiguë riche en méthémoglobine. Le type II est le plus caractéristique de ces lésions est représenté en T2 par un hyper et un hyposignal entouré par un halo périphérique d’hypo signal ; aspect dit « popcorn ou niche d’abeille». Le type III correspond à une lésion hypointense en T1et T2. Le type IV se manifeste par une lésion en isosignal T1 et T2, visible uniquement en écho de gradient. Néanmoins des problèmes de diagnostic différentiel peuvent se présenter avec une MAV thrombosée, une télangiectasie ou un hémangioblastome; dans ces deux derniers diagnostics, l’angiographie apporte la solution, elle est constamment normale dans le cavernome car le débit y est trop lent (22). Le diagnostic différentiel peut encore se poser avec une tumeur intramédullaire, surtout lorsqu’elle est hémorragique (métastase de mélanome) (25,27). Dans ce cas, l’utilisation de gadolinium permet de les différencier ; les tumeurs médullaires se renforçant nettement, alors que le cavernome peu ou pas (22). L’imagerie par résonance magnétique dorso-lombaire dans notre cas a visualisé la présence d’une lésion ovalaire intramédullaire en regard de T7-T8 en iso-signal en T1, hyper-signal hétérogène en T2, entouré d’un liseré en hypo-signal T1 classée type II selon la classification de Zabramski (28) TRAITEMENT La prise en charge des cavernomes est essentiellement chirurgicale dès que le patient présente une symptomatologie clinique avec un déficit neurologique incomplet. En cas de paraplégie brutale, il est parfois préférable de différer l’intervention pour éviter une agression supplémentaire de la moelle par l’acte chirurgical (4,9). En cas de découverte fortuite ou de simple rachialgies, un traitement médical et une surveillance clinique et radiologique semble plus approprié. La technique chirurgicale est la même que pour les processus tumoraux intramédullaires. Après une laminectomie et ouverture durale centrée sur la zone pathologique, il faut évacuer l’hématome et exciser la malformation sous microscope opératoire; l’abord chirurgical a de plus l’avantage de permettre une confirmation histologique du diagnostic suspecté (1, 16, 20,21). Les formes cliniques d’évolution progressive doivent également bénéficier d’un traitement chirurgical en raison du risque de survenue d’une détérioration clinique brutale. Comme dans notre cas, la majorité des auteurs insiste sur la possibilité d’aggravation postopératoire transitoire liée au geste chirurgical (23,25). Le problème du repérage préopératoire de la lésion peut se poser. Il faut rechercher sur la surface médullaire un aspect de voussure souvent ocre. De même que dans les cavernomes cérébraux, l’utilisation de l’échographie préopératoire peut être d’un grand secours(17). La réalisation des potentiels évoqués somesthésiques peropératoires permet de quantifier de façon instantanée les risques neurologiques du geste. La radiothérapie a été suggérée comme un traitement des cavernomes intramédullaires, puisqu’elle a donné de bons résultats sur le cavernomes hémisphériques et du tronc cérébral, mais elle ne fait pas l’unanimité actuellement (14). CONCLUSION Le cavernome intramédullaire est une pathologie rare. Il n’a pas une expression clinique pathognomonique, mais son diagnostic peut actuellement être très fortement suggéré par l’IRM. Le traitement chirurgical est seul garant d’une guérison définitive, néanmoins les indications doivent être codifiées et les risques opératoires clairement expliqués aux patients. REFERENCES
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