CLINICAL STUDIES / ETUDES CLINIQUES
INTERÊT DE L’ELECTROENCEPHALOGRAMME(EEG) DANS LE DIAGNOSTIC DE LA MALADIE DE CREUTZFELDT- JAKOB (MCJ) EN AFRIQUE. DESCRIPTION DE TROIS CAS EN CÔTE D’IVOIRE
EEG IN THE DIAGNOSIS OF CREUTZFELDT-JAKOB DISEASE IN AFRICA. DESCRIPTION OF THREE CASES OBSERVED IN IVORY COAST
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RESUME Nous rapportons trois observations de malades africains ivoiriens âgés de plus de 65 ans ayant présenté une démence avec ou sans myoclonies. Le diagnostic de MCJ était probable chez deux patients. Le diagnostic de MCJ certaine a pu être fait chez un patient grâce à l’examen anatomopathologique de la biopsie cérébrale. Nous décrivons les aspects électroencéphalographiques(EEG) qui ont permis d’évoquer le diagnostic. Nous insistons sur la place déterminante de l’EEG dans le diagnostic de la MCJ en Afrique où cet examen non traumatique, se présente actuellement comme le seul moyen diagnostique fiable malgré ses limites et les difficultés d’interprétation. Nous suggérons de répéter l’EEG en cas de suspicion de MCJ Mots clés : Activités paroxystiques périodiques, Afrique, Côte d’Ivoire, EEG, Encéphalopathie spongiforme, Maladie de Creuztfeldt- Jakob ABSTRACT We report 3 cases of CJD in African Ivorian patients more than 65 years old. They had dementia with or without myoclonias. The diagnosis was certain in one patient based on brain biopsy. In the two others patients no brain biopsy was done and the diagnosis of CJD was probable. We describe the patterns EEG that allowed evoking the diagnosis and we insist on the primordial contribution of the EEG in the diagnosis of CJD in Africa where EEG appears actually to be the only one mean of diagnosis in spite of its limits. We suggest repeating EEG in case of suspicion of CJD Key words: Africa, Ivory Coast, Creutzfeldt -Jakob disease, EEG, Periodic complexes, Subacute spongiforme encephalopathy INTRODUCTION La maladie de Creutzleldt-Jakob (MCJ) est une encéphalopathie infectieuse subaiguë qui s’accompagne classiquement d’une altération particulièrement évocatrice de l’EEG caractérisée par la présence d’activités paroxystiques périodiques courtes généralisées associées à une dégradation progressive du rythme de fond. En Côte d’Ivoire, des préjugés culturels défavorables aux autopsies rendent difficiles les nécropsies cérébrales et les conditions de réalisation des biopsies cérébrales ne sont pas toujours réunies. Les investigations sanguines et radiologiques standard étant peu contributives au diagnostic de la maladie, seul l’EEG permet dans ce contexte de suspecter une MCJ devant un tableau de démence myoclonique ou non. L’objectif de ce travail, réalisé à partir de trois observations documentées d’enregistrements EEG, est de situer la place de cet examen dans le diagnostic de la MCJ dans notre contexte de travail où l’insuffisance d’appareils d’EEG apparaît comme une difficulté supplémentaire au diagnostic de la MCJ OBSERVATIONS Observation 1 Madame K.Y.M, ivoirienne, sans antécédents notables,âgée de 67 ans a été admise dans le service de neurologie le 01-06-1988 pour des troubles mnésiques ,des troubles de l’humeur et du comportement à type d’indifférence, de prostration et de fugues qui sont apparus progressivement depuis deux mois, en l’absence de tout contexte infectieux ou traumatique. L’état de la patiente s’est aggravé rapidement d’une seul tenant et l’apparition d’une dysarthrie a motivé l’hospitalisation. L’examen montrait une patiente avec un bon état général, bradypsychique avec une désorientation temporo-spatiale. Ses réponses étaient inadaptées, brèves, gênées par une dysarthrie explosive. Il y avait une akinésie et une hypertonie extra pyramidale. Il n’y avait pas de mouvements anormaux. Les réflexes ostéo-tendineux étaient vifs et les réflexes archaïques étaient présents. Les examens sanguins(glycémie, urée, créatininémie, transaminases, hémogramme, ionogramme, calcémie et magnésémie) et le liquide céphalorachidien étaient normaux. L’examen anatomopathologique réalisé après une biopsie cérébrale frontale a objectivé une raréfaction très significative des neurones au niveau de la substance grise avec une importante spongiose de toutes les couches du cortex associée à une réaction astrocytaire. Il y avait également une discrète spongiose de la substance blanche sous-jacente. Il n’y avait aucune réaction inflammatoire. Observation 2 Madame A.E, 73 ans, ivoirienne, hypertendue, a été admise dans le service de neurologie le 03 novembre 1998, pour des troubles du comportement. Un mois auparavant elle a présenté une baisse progressive de l’acuité visuelle accompagnée d’une inversion du cycle nycthéméral, d’une réduction du langage spontané et de troubles mnésiques. L’apparition de troubles de l’humeur à type d’indifférence et de crises de larmes, a motivé l’hospitalisation. Un premier EEG réalisé environ deux mois après le début de la symptomatologie a objectivé une activité de base ralentie, constituée par un rythme thêta à quatre cycles/secondes, bilatéral et des décharges généralisées de pointes ondes lentes périodiques courtes à un cycle seconde. l’HPN et la SLI étaient sans effet (figure 2).Le deuxième EEG réalisé environ un mois après le premier et trois semaines avant le décès de la patiente a montré une dégradation accentuée de l’activité de fond constituée par un rythme très lent delta bilatéral et symétrique et des complexes paroxystiques lents biphasiques voir triphasiques à périodicité plus longue d’environ deux cycles/secondes (figure 3). Observation 3 Monsieur D.A.J. 65 ans, ivoirien a été hospitalisé dans le service de neurologie en août 1998 pour la prise en charge d’une triplégie. La maladie s’est installée progressivement sur environ 4 mois avec une aggravation régulière des troubles moteurs. Parallèlement sont apparues une obnubilation et une crise convulsive tonico-clonique généralisée d’emblée. Dans ses antécédents on notait une hypertrophie bénigne prostatique. L’examen clinique a mis en évidence un patient amaigri, un ralentissement idéomoteur, un syndrome pyramidal de trois membres associant une hémiparésie gauche et une monoparésie crurale droite.Les réflexes ostéotendineux étaient vifs et les réflexes archaïques étaient présents. Un EEG réalisé quatre mois après le début de la symptomatologie, a objectivé une asymétrie du rythme de fond qui avait disparu à droite et était discrètement ralenti à gauche. Cette activité de base anormale était surchargée par des décharges permanentes paroxystiques de pointes triphasiques périodiques courtes à environ une seconde, bihémiphériques généralisées mais prédominant à droite. L’HPN et la SLI étaient sans effet.(figure 4 ). COMMENTAIRES La première observation est un cas typique de MCJ certaine chez un sujet de race noire. Elle réunit les critères classiques d’une MCJ qui sont la démence myoclonique, les activités paroxystiques périodiques généralisées courtes à l’EEG (3.10)et la spongiose du tissu cérébral sans aucun stigmate inflammatoire. Les deux dernières observations présentaient des atypies cliniques. Dans un cas il s’agissait d’une forme à début visuel et dans l’autre cas la symptomatologie motrice sous forme d’un syndrome pyramidal était au premier plan. Dans ces 2 cas, en l’absence d’examens anatomopathologiques, c’est l’EEG qui a fait évoquer le diagnostic de MCJ probable Dans nos deux premières observations l’EEG avait un aspect typiquement évocateur de MCJ puisqu’il montrait des activités paroxystiques périodiques bilatérales courtes et une dégradation progressive du rythme de fond. Les épreuves d’activation ne modifiaient pas le tracé (3.7 ) La fréquence des activités paroxystiques périodiques dans la MCJ est évaluée à 67 % par Steinhoff (7), à 82 %par Gaches (3) l’EEG peut aussi monter des aspects atypiques et déroutants qui rendent difficile la démarche diagnostique. En effet comme dans l’observation N°3,les complexes paroxystiques peuvent être strictement asymétriques tels que décrits par Neufeld (5) et Heye (4) Des activités pseudo rythmiques non triphasiques sous forme d’îlots d’activités lentes, delta, monomorphes pseudo périodiques généralisées ou focales, ont même été décrites par Schenska (6) chez trois patients à un stade précis de la maladie. Gaches (3) les considère comme une modalité évolutive de l’EEG. L’EEG peut être normal dans les formes familiales et dans la nouvelle variante de la MCJ et même dans d’authentiques cas de MCJ sporadiques (6) L’absence d’anomalies électriques ne doit donc pas faire rejeter le diagnostic de MCJ.(10) Par ailleurs les activités périodiques courtes triphasiques généralisées ne sont pas spécifiques de la MCJ car elles peuvent se rencontrer dans d’autres démences, vasculaires ou type Alzheimer (3), et dans d’autres affections telles que les encéphalopathies porto cave de la cirrhose, les encéphalopathies post anoxiques et les insuffisances circulatoires,(5) ce qui réduit la spécificité de l’EEG à 86 % (2) Cependant si l’on s’en tient aux critères stricts de définition de la périodicité et de la stéréotypie, une analyse électroclinique fine devrait permettre d’éliminer ces différentes affections. CONCLUSION Dans notre contexte de travail la réalisation de l’EEG doit être systématique devant un tableau de démence myoclonique ou non du sujet âgé. Même s’il a des limites cet examen a l’avantage d’être peu coûteux non traumatique et facile à réaliser. Sa répétition chez un même patient pourrait augmenter sa sensibilité. Mais son interprétation doit tenir compte du tableau clinique car il peut être normal ou atypique et déroutant. RÉFÉRENCES
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