ORIGINAL PAPERS / ARTICLES ORIGINAUX
L’HISTOIRE DE LA NEUROCHIRURGIE EN COTE D’IVOIRE D’HIER A AUJOURD’HUI
THE HISTORY OF NEUROSURGERY IN COTE D'IVOIRE FROM THE ORIGINS TO OUR DAYS
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RESUME Introduction La neurochirurgie moderne a été introduite et a commencé à se développer dans les pays africains à partir de 1951. En Côte d’Ivoire, il n’existe aucune donnée dans la littérature sur l’histoire de la neurochirurgie. Objectif Faire l’historique de la neurochirurgie en Côte d’Ivoire Méthodes Etude transversale rétro-prospective à visée descriptive de l’évolution de la neurochirurgie en Côte d’Ivoire depuis les premières pratiques jusqu’à ce jour, à partir d’une enquête, d’une revue de littérature et d’interviews. Résultats Quatre périodes ont été identifiées. La première, qui commence en 1972, s’identifie au Docteur Mélaine Kouamé KANGAH, premier neurochirurgien. La pathologie traumatique crânio-cérébrale et les méningiomes étaient alors pris en charge. La deuxième s’étend de l’ouverture du service de Neurochirurgie de Yopougon à Abidjan en 1990 jusqu’en 1998. Les Professeurs Jean Jacques Santini, Vincent BA ZEZE, « père » de la neurochirurgie ivoirienne, Gilbert DECHAMBENOIT et Guy VARLET marquent cette époque qui connait l’essor de la neurochirurgie ivoirienne. Puis la troisième période de stagnation, jusqu’en 2012, qui cependant voit se diversifier les compétences, s’ouvrir le Diplôme d’Etudes Spécialisées en 2007, se créer une unité pédiatrique en 2008, et la Société Ivoirienne de Neurochirurgie en 2009. La quatrième période est caractérisée par la reprise des progrès au niveau des ressources humaines et matérielles, avec l’ouverture des services de Bouaké puis Yamoussoukro, et l’essor de la pratique privée. Mais beaucoup reste à faire au plan de l’équipement et de la formation. Conclusion Des progrès notables ressortent de cette étude. Les perspectives se résument au projet de création d’un institut de neuroscience et d’autres services de neurochirurgie dans les grandes régions du pays. Mots clés : neurochirurgie, histoire, Côte d’Ivoire SUMMARY Introduction Modern neurosurgery was introduced and started to develop in African countries from 1951. In Côte d’Ivoire, there is no data in the literature on the history of neurosurgery. Objective To provide a history of neurosurgery in Côte d’Ivoire Methods Retro-prospective cross-sectional study with a descriptive aim of the evolution of neurosurgery in Côte d’Ivoire from the first practices to the present day, based on a survey, a literature review and interviews. Results Four periods were identified. The first, which began in 1972, is identified with Doctor Mélaine Kouamé KANGAH, the first neurosurgeon. Craniocerebral traumatic pathology and meningiomas were then treated. The second period extended from the opening of the Neurosurgery Department of Yopougon in Abidjan in 1990 until 1998. Professors Jean Jacques SANTINI, Vincent BA ZEZE, « father » of Ivorian neurosurgery, Gilbert DECHAMBENOIT and Guy VARLET marked this period which saw the development of Ivorian neurosurgery. Then the third period of stagnation, until 2012, which however saw the diversification of skills, the opening of the Diploma of Specialized Studies in 2007, the creation of a pediatric unit in 2008, and the Ivorian Society of Neurosurgery in 2009. The fourth period was characterised by the resumption of progress in terms of human and material resources, with the opening of the Bouaké and Yamoussoukro services, and the development of private practice. But much remains to be done in terms of equipment and training. Conclusion Notable progress has been made in this study. The prospects are summarised in the project to create an institute of neuroscience and other neurosurgery services in the major regions of the country. Key words: neurosurgery, history, Ivory Coast INTRODUCTION L’histoire de la neurochirurgie, considérée comme la plus ancienne spécialité médicale (2) est bien connue, sauf en Afrique subsaharienne. La pratique de la neurochirurgie en Afrique a commencé en Egypte depuis l’antiquité. La neurochirurgie moderne a été introduite en Egypte en 1951 et a commencé à se développer dans les autres pays africains à partir de 1960 (1,8). Mais bien avant déjà, la pratique neurochirurgicale existait suivant le développement du système de santé initié par les autorités coloniales (8). La neurochirurgie moderne était pratiquée dans les services de chirurgie générale soit par des neurochirurgiens soit par des chirurgiens généralistes, avant que la neurochirurgie devienne une spécialité indépendante (8). La discipline neurochirurgicale ivoirienne est récente. Le premier service a ouvert ses portes en 1989 (17). Le service de Neurochirurgie du CHU de Yopougon, qui a fait connaitre la neurochirurgie en Côte d’Ivoire, a été ouvert au public en 1990 (9). Mais alors que la Côte d’Ivoire réalise sa première exérèse d’une tumeur cérébrale en condition éveillée (14) il n’existe aucune donnée dans la littérature sur l’histoire de la neurochirurgie dans ce pays. C’est dans cette perspective que nous nous sommes proposés de réaliser ce travail dont l’objectif général était de préciser les circonstances de la naissance de la neurochirurgie ivoirienne et son évolution jusqu’à nos jours. MATERIEL ET METHODES Il s’agit d’une étude transversale rétrospective et prospective, à visée descriptive de l’histoire de la neurochirurgie ivoirienne depuis les premières pratiques jusqu’à nos jours. Les données ont été recueillies à partir des réponses à un questionnaire des neurochirurgiens, associées à des interviews de personnels du service de neurochirurgie et d’autres professionnels de santé des Centres Hospitaliers Universitaires (CHU) de Yopougon, Cocody et Treichville, en fonction ou à la retraite, d’une revue de littérature, de parutions de journaux, de documents fournis par le service de Neurochirurgie et les services d’information des différents CHU et de l’hôpital catholique saint Joseph Moscati de Yamoussoukro. RESULTATS ET DISCUSSION L’histoire de la neurochirurgie ivoirienne commence en 1972. Avant l’ouverture du premier service de neurochirurgie, les pathologies neurochirurgicales qui se résumaient aux traumatismes du crâne et de la colonne vertébrale étaient pris en compte par le service de chirurgie générale et de traumatologie car il n’y avait pas de spécialités, à l’instar des autres pays africains (8). Quatre périodes ont été identifiées. I- Première Période : 1972-1990 La première période s’identifie au Docteur Mélaine Kouamé KANGAH, premier neurochirurgien. Le besoin de spécialiste se faisant ressentir, Docteur Mélaine KANGAH se rend alors en Europe pour sa formation en neurochirurgie. Originaire de Dimbokro (ville du centre de la Côte d’Ivoire), docteur KANGAH a fait sa formation neurochirurgicale en Suisse et à Marseille chez le Professeur Maurice CHOUX. Dès son retour en Côte D’ivoire en 1972, il exerça comme Assistant Chef hospitalier au CHU de Treichville. Faute de service, Docteur KANGAH exerçait en tant que spécialiste de neurochirurgie dans le service du Professeur KEBE Memel Jean Baptiste (Urologie), puis dans le service de chirurgie traumatologique au neuvième étage du CHU de Cocody. La neurochirurgie avait ainsi commencé avec docteur KANGAH Kouamé Melaine, non universitaire. Il prenait en charge essentiellement la pathologie traumatique, mais également la pathologie pédiatrique. A cette période on associe également le Professeur Ba ZEZE, « père » de la neurochirurgie ivoirienne. « L’idée de neurochirurgie est née à partir du moment où la demande s’est faite grandissant, avec le développement non seulement de l’imagerie, mais aussi du trafic routier avec son lot d’accident de la voie publique. Il a en ce moment été noté l’existence des pathologies neurochirurgicales notamment les traumatismes crânio-encéphaliques et vertébro-médullaires ; et les difficultés de leur prise en charge » (Citation du Pr Vincent Ba ZEZE). La demande (existence de pathologies neurochirurgicales), le besoin (absence de spécialistes en neurochirurgie) et les difficultés de prise en charge des pathologies neurochirurgicales notamment les traumatismes crâniens persistaient, malgré l’exercice du Docteur KANGAH Kouamé Mélaine. Le Professeur Antoine Niamké YANGNI-ANGATE alors doyen de la faculté de médecine d’Abidjan, et par ailleurs chef de service de Chirurgie Générale, grand visionnaire, voulant diversifier les disciplines, décida d’envoyer, en 1983, le Professeur Vincent BA ZEZE en formation de neurochirurgie chez le Professeur ANDRE GOUAZE à Tours en France. Après cinq (05) années de formation, le professeur Vincent BA ZEZE retourne en Côte d’Ivoire en janvier 1988, et réintègre le service de chirurgie générale du Professeur YANGNI-ANGATE. Il passe Maître de Conférences agrégé en neurochirurgie la même année. La neurochirurgie prend alors un caractère universitaire. Mais dans la pratique les choses n’étaient pas faciles. « Il n’y avait pas de service de neurochirurgie, aucune structure, aucun équipement (plateau technique inexistant). La création de la neurochirurgie en Côte d’Ivoire était émaillée d’obstacles. À ses débuts, pour pouvoir travailler, le Professeur BA ZEZE a donc entrepris de s’équiper en boites d’instruments sur fonds propres et s’occupait lui-même de l’entretien et de la stérilisation. « Je lavais les boites moi-même, et j’allais les stériliser à l’Institut de Cardiologie d’Abidjan (ICA) ou à la PISAM (Polyclinique Internationale Sainte Anne-Marie) qui venait d’ouvrir. Et c’est avec ces instruments que j’opérais ». (Citation du Professeur Vincent Ba ZEZE). Il convient de rappeler le projet du Professeur Christian GIORDANO qui dans la perspective de créer un Institut des NeuroSciences dans le cadre d’une équipe pluridisciplinaire avait orienté et envoyé en formation au début des années 1980, en France et aux Etats-Unis, les assistants-chefs de clinique ivoiriens : Docteurs Ernest KOUASSI BEUGRE, Félix BOA YAPO, Gilbert DECHAMBENOIT, Thérèse SONAN, Ayé François AKANI, Paulette YAPI, Antoine AMONKOU (neuro-épidémiologie, neurochirurgie, neurophysiologie, neuro-pathologie, neuroradiologie, neuro-anesthésie réanimation, …) L’année 1989 marque le début de l’organisation et la structuration de l’activité neurochirurgicale ivoirienne. En effet, le 2 mars 1989 fut créé, par un arrêté, le premier service de Neurochirurgie au CHU de Cocody (17). Ce service de 10 lits logeait au sein du service de neurologie au neuvième étage du CHU de Cocody en contiguïté avec le service de Traumatologie et en périphérie du service de neurologie. Il était dirigé par Docteur Claude COURNIL, de nationalité française, chirurgien militaire puis neurochirurgien. Il avait pour assistant Docteur Gilbert DECHAMBENOIT, aujourd’hui neurochirurgien émérite et Professeur de neurochirurgie. D’abord neurologue, le Docteur DECHAMBENOIT était l’assistant du Professeur Christian GIORDANO. « La solide formation clinique d’une valeur inégalable qu’il nous avait transmise grâce à ses exceptionnelles qualités didactiques et pédagogiques nous avait fait intégrer avec aisance les équipes qui nous accueillaient dans la période de révolution de la neuro-imagerie rappelant la primauté fondamentale des données cliniques » (5). Mais la pratique de la neurochirurgie par le Docteur COURNIL a commencé bien avant : après avoir servi au Sénégal, Docteur Claude COURNIL s’installa à Abidjan en 1976, et exerça au CHU de Cocody (1). Il pratiquait la neurochirurgie en tant que contractuel. Le docteur Claude COURNIL a pratiqué la neurochirurgie pendant une douzaine d’année, prenant en charge les traumatismes crâniens, le rachis dégénératif, les compressions médullaires tumorales et infectieuses. II- Deuxième période : 1990-1998 En 1990, s’ouvre dans le tout nouveau CHU de Yopougon, le deuxième service de neurochirurgie (17). C’est le Professeur Frédéric François Alain EKRA, alors Ministre de la santé et de la protection sociale (1989 à 1992) qui a pris la décision de créer ce service de neurochirurgie au préalable dédié à l’urologie (Citation du Professeur DECHAMBENOIT). Le service compte alors 30 lits d’hospitalisation, une salle de consultation, un bloc opératoire équipé, avec microscope, moteur pneumatique, différentes boites d’instruments dont une boite hypophyse, une boite crâne. Un neuro-anesthésiste y est affecté. Professeur d’anatomie à la faculté de Tours, et compagnon de route du professeur André GOUAZE, qui a formé le Professeur Vincent BA ZEZE, le Professeur Jean Jacques SANTINI, détaché par le ministère des Affaires étrangères français qui le met à la disposition de la Côte d’Ivoire est alors le chef du Service de Neurochirurgie du CHU de Yopougon. Ces collaborateurs sont le Professeur Vincent BA ZEZE et le docteur Gilbert DECHAMBENOIT, qui venait du service de neurochirurgie du CHU de Cocody. Le Professeur Vincent BA ZEZE « recrute » Docteur Boni N’GUESSAN et Docteur Médard KAKOU. Les premiers acteurs de la neurochirurgie universitaire ivoirienne étaient Professeur Jean Jacques SANTINI, Professeur Vincent BA ZEZE, Professeur Gilbert DECHAMBENOIT, Docteur Boni N’GUESSAN, Docteur Médard KAKOU. Ils composaient ainsi le « G5 » de l’origine de la neurochirurgie universitaire de Côte d’Ivoire. C’est l’essor de la neurochirurgie ivoirienne. Ils sont rejoints par le Docteur Guy Gervais VARLET, au retour de sa formation à Grenoble. Le Professeur Vincent BA ZEZE qui avait exercé avec lui au service du Professeur YANGNI-ANGATE lui fait appel. Ils forment ainsi la première génération de neurochirurgiens universitaires (Figures 1, 2). Très rapidement le Professeur Vincent Ba ZEZE définit des axes d’orientation : ainsi les Docteurs BONI et VARLET se destinent à la chirurgie rachidienne tandis que Docteur KAKOU et lui-même s’orientent vers la chirurgie crânienne. C’est la période de l’essor de la neurochirurgie ivoirienne. Le service reçoit et prend en charge des patients de toute l’Afrique de l’ouest. En 1992, le Professeur Vincent Ba ZEZE est nommé Chef de Service (Arrêté n° 385 MSPS. DESS. Du 30 novembre 1992, portant nomination de M. BA ZEZE Vincent, chef du service de Neurochirurgie au Centre Hospitalier et Universitaire de Yopougon). (11) III- Troisième période : 1998-2012 Période tumultueuse de l’acticité neurochirurgicale avec les nombreuses crises socio-politiques ; mais tout de même marquée par l’affirmation de la neurochirurgie ivoirienne et la diversification des compétences : neurochirurgie rachidienne (ostéosynthèse, vertébroplastie, kyphoplastie…), pédiatrique, fonctionnelle …, avec la deuxième génération de neurochirurgiens (Figure 3). Cette période est en effet marquée par le départ du Docteur ZUNON-KIPRE pour la chirurgie vasculaire, du Docteur HAIDARA à Bruxelles puis à Amiens qui se perfectionne dans la chirurgie du rachis. On assiste à la création du Diplôme d’Etudes Spécialisés (DES) de neurochirurgie en 2007, à la création d’une unité de neurochirurgie pédiatrique en 2008, administrée par le Docteur Espérance BROALET, destinée à la neurochirurgie pédiatrique, et à la création de la Société Ivoirienne de Neurochirurgie (SINC) en 2009 (10). L’accès au DES se fait par voie de concours au mois d’octobre chaque année. Depuis sa création trente-trois (33) neurochirurgiens venant de divers pays africains ont été formés, dont 10 ivoiriens, 4 nigériens, 5 maliens, 7 camerounais, 3 béninois, 2 congolais, 2 burkinabés. La formation se fait en 6 ans dont la dernière année est pour le mémoire. La 5ème année se fait lorsque c’est possible dans un service de neurochirurgie en Europe : Bruxelles, Amiens, Grenoble, Lyon, Caen, Bordeaux… Il a été créé des conventions d’échanges entre les services de Neurochirurgie de ces hôpitaux et le service de Neurochirurgie d’Amiens en France ; IV- Quatrième période : 2012 à nos jours En 2011, la Côte d’Ivoire connait une crise socio-militaro-politique sans précédent. C’est au décours de cette crise que se situe cette quatrième période. Elle est caractérisée par la reprise des progrès avec l’accroissement des ressources humaines, matérielles et structurelles. Cette période est marquée par l’ouverture du deuxième service de neurochirurgie à Bouaké, deuxième ville de Côte d’Ivoire, au Centre Hospitalier Universitaire, fin 2015, puis celui de Yamoussoukro, capitale économique, à l’Hôpital Catholique Saint Joseph Moscati, en Octobre 2019, et l’essor de la pratique neurochirurgicale dans les structures privées qui acquièrent des équipements modernes de pointe. On assiste au départ en stage de perfectionnement du Docteur DROGBA à Bruxelles pour la neurochirurgie fonctionnelle, Docteur NDA au CHU d’Amiens puis à l’hôpital neurologique de Lyon pour la chirurgie rachidienne (Voies antérieures, scolioses), Docteur TOKPA à l’hôpital neurologique de Lyon pour l’embolisation. (Figures 4, 5). La capacité litière passe alors à 60 lits. Nous assistons à une amélioration des techniques opératoires : « nous réalisons la chirurgie des scolioses, nous avons de nouvelles techniques d’ostéosynthèse (voies antérieures thoraco-lombales, pose de vis en percutané dont la première a eu lieu en 2016 au service de neurochirurgie du CHU de Yopougon…). Nous réalisons des embolisations intracrâniennes en pathologie vasculaire, l’endoscopie notamment des ventriculo-cisternostomies ; nous réalisons des drézotomies. Cette ère est également marquée par l’avènement de la neuronavigation et du neuro-monitoring en structure privée. De nombreux centres d’imagerie acquièrent des appareils d’IRM de 1,5 Tesla. De même, l’équipe neurochirurgicale s’est enrichie de neuro-anesthésistes formés en France et en Belgique. En 2019, la Côte d’Ivoire réalise sa première exérèse tumorale cérébrale par chirurgie éveillée par le Professeur Landry DROGBA (14). La recherche et la formation sont également en plein essor. La SINC réalise son premier puis son deuxième Congrès, respectivement en octobre 2017 à Grand Bassam et en Octobre 2019 à Yamoussoukro. Pour l’année universitaire 2020-2021 sont inscrits cinquante-cinq (55) médecins en DES. V- Perspectives « C’est bien dommage qu’aujourd’hui la neurochirurgie privée arrache la vedette aux services de neurochirurgie des Centres Hospitaliers et Universitaires (CHU). Cela s’explique par le fait que le privé offre un plateau technique de pointe. Le CHU est le terrain de formation et d’expérience pour les jeunes. Il est le troisième palier de la pyramide sanitaire. A cet égard les matériels les plus performants doivent s’y trouver. C’est le cas en France. Il appartient à l’État de veiller à la formation » (Citation de Professeur Vincent Ba ZEZE) L’activité neurochirurgicale ivoirienne se fait aussi bien au public qu’au privé. Cependant le plateau technique faible du public limite de façon significative le nombre et le type d’interventions qui y sont pratiquées. « Certes, il y a eu dégradation du point de vue matériel. Cependant, grâce aux personnels qualifiés, naissent régulièrement de nouvelles techniques de prise en charges des différentes pathologies neurochirurgicales. La recherche, la formation et les ressources humaines connaissent une croissance exponentielle. Cette croissance est sans doute le résultat de la volonté du personnel enseignant à parfaire le service par la création de la Société Ivoirienne de Neurochirurgie (SINC) et le Diplôme d’Etude Spécialisé (DES) ». (Citation de Professeur KAKOU Médard) Il convient de noter qu’il y a un retard au développement de la neurochirurgie en Afrique, particulièrement en Afrique subsaharienne. Deux raisons principales l’expliquent. La première raison en est le manque de moyens financiers, les ressources disponibles étant d’abord appliquées aux soins de santé primaire. La deuxième raison concerne le système de santé en Afrique, fondé sur les priorités de santé publique dans lesquelles la neurochirurgie a une très petite place ou pas du tout (7) La capacité litière ivoirienne en neurochirurgie est estimée à 60 lits. Ce qui est insuffisant pour 26 millions d’Habitants. El Kamar au Maroc a révélé une meilleure capacité litière dans 21 hôpitaux, dont 50 lits pour 577 827 habitants à Rabat (19). La Côte d’Ivoire compte dix-sept (17) neurochirurgiens pour une population de 25 716 544 habitants (3), soit 1 neurochirurgien pour 1 512 737 habitants. Selon l’OMS la moyenne à l’échelle internationale est de 1 neurochirurgien pour 230 000 habitants. Abidjan seule compte 11 neurochirurgiens (67%) pour une population estimée à 4 707 404 habitants. Le centre de la Côte d’Ivoire avec ses deux services compte 4 neurochirurgiens. Le reste du territoire constitue un désert médical avec un manque d’expertise. Les patients de ces localités sont obligés de faire le déplacement à Abidjan, Bouaké ou Yamoussoukro. On note une insuffisance de ressources humaines de la santé spécialisées en Côte d’Ivoire (15). Rabiu (16), au Nigeria évoque le ratio d’un neurochirurgien pour 6 300 000 habitants, et Dechambenoit (6), un ratio d’un neurochirurgien pour 6 400 000 habitants en Afrique Subsaharienne en général. La Côte d’Ivoire semble donc mieux nantie. Cependant nous notons, un ratio d’un neurochirurgien pour 290 000 habitants au Maroc et dans les pays développés notamment en France, un ratio d’un neurochirurgien pour 125 000 habitants (20). Il existe une prédominance masculine des neurochirurgiens ivoiriens avec 87% d’hommes. Le même constat a été fait en France avec 85,5% d’hommes (4). Ce manque d’intérêt de la gent féminine pour la neurochirurgie pourrait s’expliquer par les contraintes physiques, familiales et domestiques (13). La neurochirurgie ivoirienne est pluridisciplinaire regroupant les sous-unités : base du crâne, vasculaire, rachidienne, pédiatrique, endovasculaire, fonctionnelle, interventionnelle. Bien que le plateau technique soit insuffisant, l’équipe neurochirurgicale ivoirienne, s’octroie tous les moyens possibles pour prendre en charge toutes les pathologies neurochirurgicales. Les techniques neurochirurgicales ont évolué ; ce qui permet aujourd’hui une meilleure prise en charge des patients. « La Côte d’Ivoire dispose de ressources humaines de qualité en matière de neurochirurgie ». Cependant le plateau technique constitue un véritable obstacle dans la prise en charge des patients dans les CHU, déficit compensé par le privé, mais malheureusement inaccessible à une grande frange de la population. « Aujourd’hui, en Côte d’Ivoire, l’équipement neurochirurgical du privé répond mieux aux normes internationales » (citation de Professeur Médard KAKOU). Au Maroc par contre, les CHU disposent de nouvelles technologies telles que la neuronavigation, l’endoscopie, un bistouri à ultrasons, la stéréotaxie et la microscopie opératoire (9). La politique d’extension très difficile à envisager car dépendant exclusivement de la volonté politique, vise les objectifs suivants :
CONCLUSION La neurochirurgie ivoirienne est née devant les besoins hospitaliers et universitaires. Son histoire est émaillée de hauts et de bas, ponctuée par les différentes crises socio-politiques. Mais au-delà des moments de léthargie, et des difficultés, elle est marquée par une évolution satisfaisante, même si encore insuffisante. En effet, nous avons noté : la croissance exponentielle de la recherche et de la formation, des ressources humaines de qualité, une bonne évolution des techniques neurochirurgicales, une neurochirurgie pluridisciplinaire. Les perspectives se résument au projet de création de services de neurochirurgie dans chaque région et d’un institut de neurosciences. CONFLITS D’INTERET : aucun REMERCIEMENTS ; Au Professeur GNANANZAN N’Guessan Gabriel Au Professeur KOUASSI Beugré Au Professeur DECHAMBENOIT Gilbert
REFERENCES
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