CLINICAL STUDIES / ETUDES CLINIQUES
MENINGOMYELITE D’ORIGINE SYPHILITIQUE: ETUDE DE CINQ CAS
SYPHILITIC MENINGOMYELITIS: STUDY OF FIVE CASES
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RESUME Introduction Observations Conclusion Mots clés : Myélite, méningomyélite, pénicilline G, syphilis. INTRODUCTION Les manifestations neurologiques de la syphilis sont polymorphes et sont actuellement en recrudescence. La méningo-encéphalite syphilitique suivie de tabès, sont les atteintes les plus fréquentes [13]. L’atteinte médullaire reste rare [7]. En dehors du tabès, il existe 2 types d’atteinte médullaire d’origine syphilitique : la méningomyélite et la méningovascularite [7]. Les auteurs rapportent cinq cas de méningomyélites en rapport avec une neurosyphilis. OBSERVATIONS Cas 1: Dossier 136/2006 Un homme, âgé de 38 ans, ayant antécédent de chancre syphilitique non traité en 1998, fut hospitalisé en 10 juillet 2006 pour une impotence fonctionnelle d’installation progressive des 2 membres inférieurs (MI) avec trouble de la marche. L’examen neurologique montrait un syndrome de sclérose combinée de la moelle fait d’une atteinte pyramidale des 2 MI avec trouble de la sensibilité profonde arthrokinétique et vibratoire. Le signe d’Argyll Robertson était absent. L’examen neuropsychologique et le reste de l’examen clinique n’avait pas montré d’anomalies. L’IRM médullaire était normale. Les sérologies syphilitiques étaient positives dans le sang (VDRL 1/8, TPHA 1/1280) et dans le liquide céphalorachidien (LCR) (VDRL 1/4, TPHA 1/640) avec la présence d’une méningite lymphocytaire (20 lymphocytes par millimètres cube, albuminorachie à 0,60 g/l) avec glycorachie normale à 0,48 g/l. La sérologie VIH était négative. Le patient fut traité par 4 cures de pénicilline G à la dose de 30 millions d’unités par jour pendant 10 jours à 3 mois d’intervalle. L’évolution fut marquée par la récupération partielle du déficit moteur. Cas 2: Dossier n° 26 /2005 Un homme, âgé de 44 ans, sans antécédent particulier fut admis le 17 février 2005 pour une impotence fonctionnelle des 2 MI d’installation progressive entrainant une marche avec double appuie depuis le début de juillet 2004. A l’admission, l’examen neurologique montra une paraparésie spastique avec des réflexes oestéo-tendineux vifs diffusées aux deux MI et une trépidation épileptoïde des deux pieds sans troubles sensitifs ni sphinctériens. Le signe d’Argyll Robertson était présent à gauche. L’examen neuropsychologique n’avait pas montré d’anomalies. Le reste de l’examen clinique était normal. L’IRM médullaire montrait une atrophie médullaire prédominante en dorsal [Figure1]. L’étude du LCR révéla une méningite lymphocytaire (24 lymphocytes par millimètres cube, albuminorachie à 0,81 g/l) et normoglycorachie à 0,50 g/l. Les sérologies syphilitiques étaient positives dans le sang (VDRL 1/64, TPHA 1/10240) et dans le LCR (VDRL ¼ TPHA 1/2560). La sérologie VIH était négative. Le diagnostic de méningomyélite fut retenu et le patient fut traité par 4 cures de pénicilline G à forte dose à 3 mois d’intervalle. L’évolution fut marquée par une récupération partielle du déficit moteur. Le LCR était d’aspect cytochimique normal à la troisième cure avec négativation des sérologies en fin du traitement. Cas 3: Dossier 51/2004 Un homme, âgé de 42 ans, sans antécédent particulier, fut hospitalisé le 15 mars 2004, pour une impotence fonctionnelle des 2 MI d’installation progressive depuis avril 2001, avec impossibilité de marcher deux semaines avant son admission, associée à des troubles sphinctériens à type d’impériosité mictionnelle et incontinence anale. A l’admission, l’examen clinique retrouvait un syndrome de compression médullaire fait d’une paraplégie spastique avec un niveau d’hypoesthésie en D12, Babinski bilatéral et hypotonie anale. L’examen neuropsychologique ainsi que le reste de l’examen somatique étaient normaux. L’IRM médullaire n’avait pas montré d’anomalies. Les sérologies syphilitiques étaient positives dans le sang (VDRL 1/2, TPHA 1/2560) et dans le LCR (VDRL ½, TPHA 1/530) avec la présence d’une méningite lymphocytaire (128 lymphocytes par millimètres cube, albuminorachie à 0,90 g/l) et glycorachie normale à 0,50 g/l. La sérologie VIH était négative. Le patient fut traité par 4 cures de pénicilline G à forte dose. L’évolution fut marquée par la récupération partielle du déficit moteur avec une marche avec aide. Cas 4: Dossier 221/2004 Un homme, âgé de 41 ans, sans antécédent particulier, fut hospitalisé le 21 octobre 2004 pour une impotence fonctionnelle des 2 MI d’installation progressive avec troubles sphinctériens à type d’incontinence urinaire et anale. L’examen clinique retrouvait un syndrome médullaire fait d’une paraplégie spastique avec un niveau sensitif D6 et hypotonie anale. L’examen neuropsychologique ainsi que le reste de l’examen somatique étaient normal. L’IRM médullaire montrait un hypersignal en séquence T2 centro-médullaire et étendu de D1 à D3 [figure 2]. Les sérologies syphilitiques étaient positives dans le sang (VDRL 1/128, TPHA 1/20480) et dans le LCR (VDRL 1/4, TPHA 1/2560) avec la présence d’une méningite lymphocytaire (200 lymphocytes par millimètres cube, albuminorachie à 1,36g/l) et glycorachie normale à 0,48 g/l. La sérologie VIH était négative. Le patient fut traité par 4 cures de pénicilline G à forte dose. L’évolution fut marquée par la récupération partielle du déficit moteur. Cas 5: Dossier 229/2003 Un homme, âgé de 40 ans, sans antécédent particulier, fut hospitalisé le 6 novembre 2003 pour une impotence fonctionnelle des 2 MI d’aggravation progressive depuis avril 2003. L’examen neurologique trouvait un syndrome de sclérose combinée de la moelle. Le reste de l’examen somatique ne montrait pas d’anomalies. L’IRM médullaire était normale. Les sérologies syphilitiques étaient positives dans le sang (VDRL 1/16, TPHA 1/1280). L’étude du LCR montra une méningite lymphocytaire (350 lymphocytes par millimètres cube, une albuminorachie à 0,77 g/l) avec hypoglycorachie à 0,30 g/l et des sérologies syphilitiques positives (TPHA 1/5120, VDRL 1/32). Les sérologies borrélienne, recketsienne et VIH étaient négatives. Le patient fut traité par 4 cures de pénicilline G à forte dose. L’évolution fut marquée par l’amélioration du déficit moteur avec une marche autonome sans aide. Tous les patients ont bénéficié d’un examen ophtalmologique, électroencéphalogramme et écho-cardiaque, qui se sont revélés sans anomalies. DISCUSSION Les myélites syphilitiques sont assez rares. Aucun cas n’a été rapporté dans la série de 241 patients de Hooschmand et al [6] ni dans la série d’El Alaoui Faris de 53 cas [2]. Luxon estime leur fréquence entre 5 et 30 % [4]. Oubejji dans sa série de 7 cas de neurosyphilis a enregistré 3 cas, soit 42,85 % [9]. Six cas ont été enregistrés dans la série de 201 patients de Yahyaoui, soit (3 %) [13]. Les myélites peuvent êtres aigues, elles peuvent survenir au cours de la syphilis méningovasculaire par artérite des artères spinales antérieure ou postérieure [14]. Les méningomyélites sont d’installation plus progressive. Sur une durée de 14 ans, nous avons colligé cinq cas de myélites qui sont tous des méningomyélites parmi 108 cas de neurosyphilis, non encore publié, ce qui représente 4,6%. Au stade clinique, La myélite syphilitique pose un diagnostic différentiel avec les tumeurs intramédullaires, hernie du disque intervertébral, abcès, sclérose en plaques, VIH entrainant une myélopathie et autres [7]. L’IRM permet d’éliminer une compression médullaire. Dans la syphilis, de rares cas ont été étudié par l’IRM dans la littérature. L’anomalie la plus fréquente est la présence d’un ou de plusieurs hypersignaux sur les séquences pondérées en T2, trouvés plus fréquemment au niveau de la moelle thoracique comme ce fut dans notre cas 2. Un hypersignal diffus de la moelle thoracique en dorsal a été rapporté dans 1 cas par Tsui et al [11]. Sur les séquences pondérées en T1, un hyposignal peut être vu et peut parfois être rehaussé après injection de gadolinium [8]. A distance peut s’observer une atrophie sévère [10]. La ponction lombaire est habituellement d’une aide précieuse pour le diagnostic de la neurosyphilis. Elle montre une méningite lymphocytaire, avec hyper-protéinorachie, comme ce fut le cas chez tous nos patients, parfois hypoglycorachie peut être constatée comme dans le cas 5 [5]. La ponction lombaire permet également et surtout de pratiquer les différents tests sérologiques (VDRL, TPHA, FTA et Ig M SPHA). Différentes études ont tenté d’analyser la sensibilité des différents tests. Ainsi, Davis et Schmitt [1] insistent sur la grande sensibilité du test FTAabs (fluorescent treponemal antibody absorption) ; ce test reste, cependant, moins spécifique que le Venereal Disease Research Laboratory (VDRL) pour la distinction entre une syphilis ancienne et une neurosyphilis active. Timmermans et Carr [12] insistent, en cas de tableau clinique évocateur de neurosyphilis et de négativité de VDRL, sur la positivité du FTA-abs associée à une réaction cellulaire, une hyperprotéinorachie ou une augmentation de l’index IgG. Sur le plan thérapeutique, tous les auteurs s’accordent sur l’efficacité de la pénicilline G à forte dose. Toutefois, des désaccords persistent concernant les modalités thérapeutiques, à savoir la posologie, la durée du traitement et le nombre de cures. Chez ces cinq patients, des cures de pénicilline G à forte dose avec des contrôles du LCR ont été effectués. Sur le plan évolutif, Les séquelles sont habituelles même si des régressions ont été rapportées dans la littérature. Cinq cas dans la série de Yahyaoui ont gardé des séquelles motrices. En effet, la dégénérescence des faisceaux pyramidaux fait que l’évolution se fait lentement vers un état grabataire en 10 à 15 ans [3]. CONCLUSION Les méningomyélites syphilitiques ne présentent pas de caractères cliniques ou neuroradiologiques spécifiques. Seule la pratique des sérologies syphilitiques systématiques devant une myélopathie non compressive permet de poser le diagnostic et d’instaurer un traitement précoce et spécifique afin de prévenir les séquelles neurologiques. REFERENCES
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