CLINICAL STUDIES / ETUDES CLINIQUES
MYELOPATHIES CERVICARTHROSIQUES INVALIDANTES. RESULTATS A LONG TERME DE 18 PATIENTS OPERES PAR VOIE ANTERIEURE AU GABON
CERVICAL SPONDYLOTIC MYELOPATHY WITH FUNCTIONAL DISABILITY. LONG TERM RESULTS CONCERNING 18 PATIENTS OPERATED ON BY ANTERIOR APPROACH IN GABON
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RESUME Objectif Patients et méthodes Resultats Conclusion Mots cles: Afrique, Cervicarthrose, Gabon, Myélopathie cervicarthrosique SUMMARY Objective Patients and methods Results Conclusion Keywords : cervical spondylotic myelopathy, surgical treatment, anterior approach, Gabon INTRODUCTION La myélopathie est la complication la plus redoutable de l’arthrose cervicale : sans traitement, l’évolution vers la tétraplégie est inéluctable [7, 8, 11]. Aussi, la chirurgie a bénéficié du développement de l’imagerie médicale moderne [1, 5, 7, 13] et des abords antérieurs qui se sont considérablement simplifiés [1, 3, 4, 6, 8, 9, 10]. Dans le cas de myélopathies cervicathrosiques intéressant deux ou trois niveaux adjacents, la corporectomie vertébrale associée à une fusion antérieure nous a paru simple et éfficiente. Le but de cette étude est de rapporter les résultats à long terme (4 à 15 ans) de 18 patients opérés pour une myélopathie cervicathrosique invalidante dans le service de Neurochirurgie de la Fondation Jeanne Ebori (FJE) (Libreville, Gabon). PATIENTS ET METHODES – Cadre et type d’étude Les critères d’inclusion étaient les suivants : importantes difficultés à la marche (Grade III-IV de Nurick) [11] voire état grabataire (Grade V) ; diagnostic positif d’une myélopathie ou myéloradiculopathie cervicarthrosique ; patients ayant bénéficié d’une voie d’abord cervicale antéro-latérale droite ; suivi d’au moins quatre ans. Les critères d’exclusion étaient : marche normale (Grade 0 et I de Nurick) ; patients opérés par voie postérieure ; autres affections neurologiques ; suivi de moins de quatre ans. – Méthodes Le receuil de données avait été fait à partir des dossiers d’hospitalisation et de consultations externes. RESULTATS 1. Généralités Tous les dix huit malades présentaient un handicap fonctionnel majeur. L’âge moyen était de 55 ans avec des extrêmes allant de 31 à 80 ans ; 12 d’entre eux avaient plus de 50 ans. Le sexe ratio était de 17. Certaines activités professionnelles sollicitant la mobilité rachidienne (ouvriers : 9, cultivateurs : 1, militaire : 1, chauffeurs : 3) constituaient des facteurs favorisants. 2. Présentation clinique Le début de la maladie a été progressif (14 cas) ou aiguë (4 cas). Douze malades avaient initialement consulté un tradi-praticien. A l’admission, treize patients se plaignaient de : cervicalgie 8 cas, brachialgie/cervico-brachialgie 3 cas ou de paresthésies 2 cas, en dehors de leur impotence fonctionnelle. La durée d’évolution des douleurs rachidiennes variait de 2 mois à 60 mois (moyenne : 25,7 mois ); tandis que celle des signes de déficit moteur allait de 3 à 8 semaines ( moyenne : 4 semaines ). A l’examen neurologique, il existait une prédominance des signes pyramidaux avec des déficits moteurs : tétraparésie 13 cas, paraparésie 4 cas, tétraplégie 1cas. La spasticité était constante. La gravité du handicap avant l’intervention chirurgicale avait été appréciée selon l’échelle fonctionnelle proposée par Nurick (Tableau I) qui tient compte essentiellement des troubles de la marche : grade III 9 cas, grade IV 6 cas, grade V 3 cas. Le tableau II résume la présentation clinique. 3. Examens complémentaires – Examens biologiques – Examens radiologiques 4. Traitement L’indication chirurgicale a été posée devant l’inefficacité du traitement médical et kinésiologique ou l’aggravation de la symptomatologie en tenant compte, bien entendu, de la corrélation des signes cliniques et radiologiques. Dans cette étude la voie d’abord cervicale antéro-latérale, pré-stérno-cléido mastoïdienne droite [3]a été la seule utilisée (Tableau III). La corporectomie associée à une fusion antérieure a été pratiquée dans 11 cas intéressant principalement 2 niveaux (10 patients) ou 3 niveaux adjacents (1 patient). La plaque vissée a été posée chez 9 patients. La dissectomie-ostéophytectomie isolée à été pratiquée chez 3 patients présentant une sténose par complexe disco-ostéophytique intéressant un espace intersomatique. Une somatotomie, ostéophytectomie associée ou non à une greffe iliaque autogène a été réalisée chez 4 patients présentant une sténose canalaire à deux et trois niveaux adjacents. Il n’a pas été noté de complications durant les interventions chirurgicales. Le port d’une minerve et l’abstention de tout effort ont été imposés à tous les patients pendant au moins trois mois. 5. Evolution Aucune complication septique ni neurologique n’a été notée après l’intervention chirurgicale. La durée d’hospitalisation a varié de 15 à 30 jours, celle de kinésithérapie de 21 à 90 jours. A court et moyen termes, trois ré-interventions ont été jugées nécessaires : éjection du greffon à J13 ; installation de signes de compression médullaire associée à une instabilité rachidienne (subluxation) à l’étage sous-jacent à la corporectomie ; sténose canalaire à l’étage sus-jacent au site opératoire à 4 mois de l’intervention. Au plan fonctionnel, toutes les plaintes douloureuses (cervicalgies, cervico- brachialgies, paresthésies) chez les treize patients qui en étaient porteurs avaient disparu. Toutes les lésions ont consolidé radiologiquement entre 3 et 5 mois (Figure 2). Le suivi des patients a varié de quatre à quinze ans (suivi moyen de 6,9 ans). La récupération neurologique a été complète (Grade 0) : 1 cas, quasi-complète (Grade I ) : 9, incomplète (Grade II-III) : 7 ou inchangée (Grade IV) : 1 (Tableau IV). DISCUSSION Dans cette étude nous avons voulu rapporter notre expérience portant sur le suivi à long terme de 18 patients porteurs d’une myélopathie cervicarthrosique (MPCA) invalidante et ayant bénéficié d’un traitement chirurgical (par voie antéro-latérale droite) associé à la kinésithérapie. La MPCA, bien que courante en Afrique, paraît une entité clinique peu étudiée, probablement du fait des difficultés diagnostiques et thérapeutiques rencontrées. La nette prédominance masculine en Afrique n’a pas trouvée d’explication convaincante (9). Le diagnostic exige à ce jour des moyens radiologiques onéreux et le traitement associant souvent la chirurgie à la kinésithérapie , nécessite une équipe pluridisciplinaire. Au Nigeria [12], la MPCA constitue la première cause de compression médullaire tandis qu’en Ethiopie [16] et au Cameroun [15], elle occupe respectivement la seconde et la quatrième position. Dans notre service, elle représente la deuxième cause après la spondylodiscite tuberculeuse (Mal de Pott). L’âge moyen de nos 18 patients (55 ans) et la prédominance masculine (17 hommes et 1 femme) corroborent les données de la littérature. Trois patients présentaient une myéloradiculopathie et quinze une MPCA, toutes invalidantes. C’est en dessous de 400 mètres (grade III de Nurick) que la gène fonctionnelle nécessite classiquement un traitement chirurgical [11]. Depuis six ans, nous disposons d’une TDM et d’une imagerie par résonance magnétique (IRM). Le second examen permet d’apprécier davantage l’importance de la sténose, de la stase veineuse, et l’état de la moelle [5, 13]. Malheureusement, il n’est accessible qu’à une minorité de patients. Toutefois, les résultats de la TDM et de l’IRM donnent des renseignements complémentaires qui orientent en toute sérénité le neurochirurgien dans le choix de la voie d’abord. Une des difficultés majeure se rapportant aux myélopathies cervicarthrosiques concerne le type de traitement à proposer, les facteurs pronostics étant diversement appréciés dans la littérature [1, 2, 7, 8, 9, 10, 14]. Le choix entre les voies d’abord antérieure et postérieure objectivé par des résultats quelque peu discordants, souvent imprévisibles et par des complications inhérentes à chacune d’elles, restent relativement complexe. Le traitement conservateur (médical et kinésithérapie) donnait une amélioration dans 20 à 40% de cas [11]. C’est pourquoi, de nos jours, celui-ci nous paraît indiqué chez les patients de grades I-II pour escompter de meilleurs résultats. Pour les abords postérieurs, les résultats s’échelonnent de 43 à 83% [10] ; tandis que ceux de la voie antérieure varient entre 17% et 100% [ 2, 4, 9 ]. Toutefois, à long terme, les résultats opératoires ne dépendent guère de la voie d’abord utilisée ; le seul problème semble être de proposer au bon moment l’intervention en période d’aggravation, malgré l’immobilisation temporaire [1, 7, 8]. Depuis plus d’une décennie, de nombreux auteurs [1, 2, 8, 9, 10] préconisent une chirurgie précoce au grade II de Nurick, en raison de l’aggravation fréquente du déficit moteur au cours du traitement conservateur [8, 10]. Par ailleurs, dans les pays sous-médicalisés, le traitement conservateur exclusif est en général préféré au traitement chirurgical, pour des raisons d’infrastructures essentiellement. C’est pourquoi, il importe d’insister sur la nécessité de lier les indications opératoires aux structures humaines et matérielles de chaque hôpital. Au regard des données de la littérature [1, 8, 10, 14] et de notre expérience [9], la survenue d’une compression radiculo-médullaire, progressive ou brutale par cervicarthrose justifie une intervention chirurgicale, pour soulager rapidement la moelle et stabiliser le rachis cervical. Notre préférence va pour la voie antéro-latérale droite car simple, plus sûre et évite tout sacrifice musculaire [2, 3, 9, 14]. Certes, comme toute voie d’abord cette dernière n’est pas dénudée de risques. Des règles simples, maintenant bien établies, doivent cependant être respectées pour obtenir les meilleurs résultats au prix d’une faible morbidité [3, 4]. L’efficacité de la corporectomie, dépend cependant de la résection complète des ostéophytes. Il s’agit d’une intervention simple, radicale et peu iatrogéne amenant plusieurs auteurs à élargir ses indications [4, 7]. Elle devient une alternative avantageuse aux deux greffons cylindriques proposés par Cloward [6] même si la somatotomie médiane est préférée par d’autres [14]. A notre avis, la corporectomie fragilise les masses latéralervicales et ainsi la vertèbre concernée, surtout chez le patient âgé, de ce fait, un greffon iliaque autogène nous paraît indiqué. En revanche, la somatotomie ne fragilise pas habituellement la vertèbre, et une greffe n’est pas toujours nécessaire. A long terme, l’évolution clinique et radiologique de ces dix huit (18) patients a été jugée satisfaisante. Nous pensons que la prise en charge sociale de ces derniers par l’Etat peut expliquer en partie ces résultats encourageants. CONCLUSION La myélopathie cervicarthrosique nécessite une prise en charge précoce et un suivi à court, moyen et long termes adéquat. Cela permet d’escompter de meilleurs résultats particulièrement au plan neurologique et de réinsertion social. En outre, Nous pensons que les patients de Grade II devraient également en bénéficier. Tableau I: Répartition préopératoire des 18 patients selon la classification de NURICK
Tableau II : Résumé de la présentation clinique
Tableau III : Techniques opératoires en fonction du niveau lésionnel (n = 18)
Tableau IV : Evolution post-opératoire selon la classification fonctionnelle de Nurick (suivi moyen : 6,9 ans).
REFERENCES
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