CASE REPORT / CAS CLINIQUE
EXTRADURAL EMPYEMA OF TUBERCULAR ORIGIN IN A YOUNG IMMUNOCOMPETENT SUBJECT: A CASE REPORT
EMPYEME EXTRADURAL D’ORIGINE TUBERCULEUSE CHEZ UN SUJET JEUNE IMMUNOCOMPETENT : A PROPOS D’UN CAS
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RESUME L’empyème intracrânien est une infection du système nerveux central caractérisée par la présence de pus dans une cavité virtuelle intracrânienne. Cette infection est habituellement due à des germes banaux de la sphère ORL. Cependant le Bacille de Koch (BK) bien que rare, peut également coloniser l’encéphale. Dans cette situation, il est généralement la cause de méningite voire méningoencéphalite, d’abcès intra parenchymateux ou de tuberculome. L’empyème extradural d’origine tuberculeuse est exceptionnel. Nous rapportons un cas d’empyème extradural à Bacille de Koch (BK) et discutons à travers une revue de la littérature les différents aspects cliniques et les modalités de la prise en charge. SUMMARY Intracranial empyema is an infection of the central nervous system characterized by the presence of pus in a virtual intracranial cavity. This infection is usually due to common germs from the ENT sphere. However, Koch’s Bacillus (BK), although rare, can also colonize the brain. In this situation, it is generally the cause of meningitis or even meningoencephalitis, intraparenchymal abscess or tuberculoma. Extradural empyema of tuberculous origin is exceptional. We report a case of extradural empyema caused by Koch’s Bacillus (BK) and discuss through a review of the literature the different clinical aspects and the modalities of management.
Mots clés : Adénopathies, Empyème, Extradural, Tuberculose INTRODUCTION L’empyème intracrânien est une collection suppurée développée dans des espaces virtuels extradural ou sous dural (3). C’est une infection de l’encéphale due à des germes aérobies et anaérobies parmi lesquels les plus fréquents sont les streptocoques, les germes à gram négatif, les entérobactéries et les staphylocoques dorés. Ces infections parenchymateuses sont souvent secondaires à des infections de voisinage (otite, sinusite, mastoïdite) à des traumatismes crâniens ou faciaux, à la migration d’emboles septiques. Le diagnostic de cette pathologie a été rendu facile grâce au développement des techniques d’imagerie cérébrale (TDM, IRM). Elle reste une pathologie rare mais dont la mortalité et la morbidité demeurent préoccupantes (14). Le traitement d’un empyème est une urgence absolue. Le retard de prise en charge thérapeutique reste le principal facteur de mauvais pronostic (13). Ce traitement est médico-chirurgical associant une antibiothérapie à la réalisation d’une craniotomie permettant une évacuation plus complète de la collection et, ainsi, une réduction plus importante de l’inoculum bactérien (14). La tuberculose est une maladie infectieuse due au Bacille de Koch, elle est fréquemment retrouvée au niveau des poumons. Néanmoins des formes extrapulmonaires sont retrouvées ; elles représentent 15 à 30 % des cas (1) et sont souvent rencontrées chez les patients séropositifs au VIH/SIDA (5,11). Les ganglions et la plèvre constituent les localisations extrapulmonaires les plus fréquentes suivies par les formes ostéo-articulaires et uro-génitales (6,7). Les formes neuromeningées et digestives sont très rarement retrouvées (2). L’empyème extra dural d’origine tuberculeuse chez un sujet jeune immunocompétent est le 1er cas rencontré dans notre expérience, et nous permet de discuter les aspects cliniques et thérapeutiques de cette localisation. OBSERVATION Un patient mélanoderme âgé de 33 ans, sans antécédent médico-chirurgicaux particuliers avait consulté pour tuméfaction pariétale gauche évoluant depuis six (6) mois. L’interrogatoire ne retrouvait pas de notion de contage tuberculeux mais la réalisation 9 mois plus tôt d’une biopsie d’adénopathie cervicale droite dont l’analyse anatomopathologique avait conclu à une adénite d’origine tuberculeuse. Le patient n’aurait bénéficié d’aucune prise en charge. L’examen physique retrouvait un état général conservé, une apyrexie, une tuméfaction pariétale gauche d’environ 6 cm de grand diamètre avec un pertuis laissant sourdre du pus. Cette tuméfaction était non inflammatoire ferme avec absence d’écoulement du pus à la pression. Par ailleurs on notait la présence de multiples adénopathies cervicales au niveau latéral supérieur gauche abcédées, postérieur gauche en voie de cicatrisation et également au niveau sus-claviculaire gauche et droit non fistulisées (Fig 1). L’examen des autres appareils était normal. Le bilan radiologique notamment l’IRM cranio-encéphalique et cervicale en coupes axiales, sagittales et coronales en T1 et T2 avant et après injection de Gadolinum objectivait au niveau cérébral en pondération T1 un hypersignal extra axial pariétal gauche bien limité se prolongeant en extra crânien par un défect osseux (Fig 2), en pondération T2 un hyposignal entouré d’un hypersignal (Fig 3). Au niveau cervical une image hétérogène bien limitée bilatérale (Fig 4). Le bilan biologique ne trouvait pas de syndrome infectieux, la sérologie rétrovirale était négative. Le diagnostic de tuberculose extra-pulmonaire a été retenu devant les adénopathies multiples, le résultat anatomopathologique de la biopsie faite plus tôt et l’absence de traitement spécifique. Le patient a été mis sous quadrithérapie antituberculeuse puis opéré une semaine plus tard. Sous anesthésie générale, au niveau crânien nous avons fait une exérèse des tissus nécrotiques sous cutanés à l’aide de la monopolaire (Fig 5) et à travers le défect osseux, élargie à l’aide de Kérisson nous avons évacué le pus enkysté par curetage (Fig 6). Au niveau cervical nous avons fait un curage des ganglions abcédés. Les suites opératoires immédiates étaient simples. L’évolution était marquée par la disparition de l’abcès pariétal, des adénopathies cervicales et une cicatrisation des plaies (Fig 7 et 8). Nous avons réalisé un scanner crânio-encéphalique de contrôle qui est revenu normal. Le patient a été déclaré guéri et le traitement arrêté huit (8) mois plus tard. Les examens histopathologiques des différents prélèvements réalisés au bloc opératoire ont conclu à une granulomatose nécrosante encéphalique et à des adénites tuberculeuses en cervical. DISCUSSION Il s’agit d’un cas rare de tuberculose extra pulmonaire qui s’est présenté sous la forme d’un empyème extradural chez un sujet jeune immunocompétent. La tuberculose extra pulmonaire est une pathologie de plus en plus fréquente (6,7) qui a connu une résurgence avec la pandémie à VIH (5,11). La plèvre, les ganglions, les os, les articulations et les organes génito-urinaires seraient les plus touchés et très rarement le système digestif et neuroméningé (2). Au niveau neuroméningé, le bacille de Koch est souvent responsable soit d’une méningite tuberculeuse, d’u abcès intra parenchymateux, d’un tuberculome isolé ou associé à une méningite (4). Nous n’avons pas retrouvé de cas d’empyème intracrânien dans la littérature, il s’agit donc du premier cas décrit. Dans notre cas, l’hypothèse la plus probable de cette localisation serait une contamination locorégionale à partir des adénopathies cervicales par embole septique. Le BK aurait regagné la zone pariétale via l’artère carotide externe et ses terminaisons. Puis par contiguïté, il aurait infiltré l’os, créé une lyse osseuse et pénétré en intra crânien. Sur le plan clinique, ce patient n’a présenté aucun signe généralement retrouvé dans les empyèmes : fièvre, troubles de la conscience, signes de localisation, crises comitiales (12). Cela pourrait être le résultat de plusieurs facteurs mis ensemble, à savoir l’évolution lente sur plusieurs mois de la maladie, l’automédication systématique généralement observée, la localisation extra-durale et l’aspect enkysté du pus. Le retard de la mise en route du traitement de la tuberculose ganglionnaire initialement diagnostiquée chez ce patient serait dû à la survenue de la maladie lors de la pandémie à SARS COV 2. Pendant cette période, les hôpitaux étaient réquisitionnés, reléguant au second plan la prise en charge des pathologies non urgente. Avant l’avènement des antituberculeux spécifiques, la chirurgie était l’outil thérapeutique de base des formes extra pulmonaires de la tuberculose (8), il se pose ici le problème de la place de la chirurgie dans ces formes surtout avec la résurgence de cette maladie et l’émergence de la tuberculose multirésistante. La tuberculose reste cependant avant tout une maladie médicale dont le traitement, bien codifié, comporte deux phases. Une phase initiale de deux mois comprenant quatre molécules : isoniazide (4–6 mg/kg une fois par jour), rifampicine (8–12 mg/kg une fois par jour), pyrazinamide (20–30 mg/kg une fois par jour), éthambutol (15–25 mg/kg une fois par jour) et une phase d’entretien de durée variable comprenant deux molécules (isoniazide, rifampicine). La durée du traitement dépend de la localisation (9,10). Cependant le recours à la chirurgie est parfois nécessaire dans les suppurations intracrâniennes avec une collection importante pour faciliter la guérison. Pour cette forme extra-durale de la tuberculose neuroméningée, nous préconisons systématiquement un traitement chirurgical associé au traitement médical. Nous avons réalisé une craniectomie au lieu d’une craniotomie par élargissement du défect osseux existant. Ce patient a bénéficié d’une quadrithérapie antituberculeuse pendant deux mois puis d’une bithérapie six mois supplémentaires avec des contrôles scannographiques en post opératoire immédiat et à la fin du traitement antituberculeux. Le patient n’a présenté aucun effet secondaire lié au traitement. L’évolution était favorable et la guérison déclarée à la fin du huitième mois de traitement anti tuberculeux. CONCLUSION L’empyème extra dural, chez un patient jeune immunocompétent associé à des adénopathies cervicales ayant un caractère chronique doit faire penser à une tuberculose neuroméningée de localisation extra durale bien que rare. Cette étiologie sera par la suite confirmée par les examens histopathologiques. La tuberculose même dans cette forme très rare d’empyème extra dural reste une maladie médicale dont le traitement est bien codifié. Cependant le nettoyage chirurgical garde une place primordiale dans la prise en charge.
REFERENCES
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