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CASE REPORT / CAS CLINIQUE
 
LA NEUROMYELITE OPTIQUE DE DEVIC (NMO) EN CÔTE D’IVOIRE: A PROPOS D’UN DEUXIEME CAS CONFIRME

DEVIC’S OPTICA NEUROMYELITIS (NMOSD) IN IVORY COAST: A SECOND CONFIRMED CASE REPORT


  1. Service de Neurologie, CHU de Cocody, BP V 13 Abidjan 01, Côte d’Ivoire.
  2. Service de Médecine Physique et de Réadaptation, CHU de Yopougon, 21 BP 632 Abidjan 21 Côte d’Ivoire

E-Mail Contact - KADJO Cédric : kadjo_cedric@yahoo.fr


RESUME

Introduction

La Neuromyélite optique (NMO) est une maladie inflammatoire démyélinisante du système nerveux central et fait partie d’un groupe d’affections inflammatoires dénommé NMO spectrum disorders (NMOSD). Elle cible sélectivement le nerf optique et la moelle épinière. Le diagnostic de cette affection repose sur les critères diagnostic de Wingerchuck et le profil évolutif est celui de poussées-remissions.

Objectif

Décrire le diagnostic de la NMO dans un contexte à ressources limitées.

Observation

Une jeune femme de 31 ans a été vue en hospitalisation au service de médecine physique et de réadaptation pour prise en charge d’une paraplégie associée à des troubles vésico-sphinctériens et des escarres. L’histoire a révélé trois épisodes des poussées de déficit neurologique. Devant la survenue d’une baisse de l’acuité visuelle en cours d’hospitalisation le diagnostic de NMO a été évoqué. Les explorations paracliniques notamment l’IRM thoracique et la positivité des Ac anti-NMO dans le LCS ont permis de retenir le diagnostic. L’instauration d’une corticothérapie à forte dose a permis une rémission clinique du trouble visuel.

Conclusion

La NMO est une affection rare. Cependant la suspicion clinique doit faire évoquer le diagnostic et faire rechercher les critères diagnostic. La corticothérapie reste le traitement de choix à la phase aigüe de la poussée dans notre contexte de travail.

Mots clés : Neuromyélite optique, corticothérapie, Ac anti-NMO

 


ABSTRACT

Introduction

Optic Neuromyelitis (OMN) is an inflammatory demyelinating disease of the central nervous system and is part of a group of inflammatory conditions called NMO spectrum disorders (NMOSD). It selectively targets the optic nerve and spinal cord. The diagnosis of this condition is based on the diagnostic criteria of Wingerchuck and the evolutionary profile is that of thrust-remissions.

Aim

Describe the diagnosis of NMO in a context of limited resources

Observation

A 31-year-old woman was seen in hospital in the department of physical medicine and rehabilitation for the management of paraplegia associated with vesico-sphincteric disorders and bedsores. The story revealed three episodes of motor and sensory deficit. Faced with the occurrence of a decrease in visual acuity during hospitalization, the diagnosis of NMO was mentioned. Paraclinical investigations, notably thoracic MRI and the positivity of anti-NMO Ab in the CSF, confirmed the diagnosis. The introduction of high-dose steroid led to clinical remission of visual disturbance.

Conclusion

NMO is a rare condition. However clinical suspicion must evoke the diagnosis and seek diagnostic criteria. Steroids remains the treatment of choice in the acute phase of the NMOSD in our context.

Keywords: Optic neuromyelitis, corticosteroids, anti-NMO Ab

INTRODUCTION

La Neuromyélite optique (NMO) est une maladie inflammatoire démyélinisante du système nerveux central qui cible sélectivement le nerf optique et la moelle épinière, même si elle peut également cibler certaines zones du cerveau (11). Longtemps considérée comme une variante de la sclérose en plaques, elle est aujourd’hui reconnue comme une pathologie bien distincte dont le traitement et le pronostic diffèrent (3). La découverte d’un biomarqueur spécifique, un auto-anticorps ciblant l’aquaporine-4, présent chez la majorité des patients a permis l’élargissement du spectre de la NMO (NMOSD) à des formes isolées de myélite ou de névrite optique rétrobulbaire, ainsi qu’à des formes avec atteintes encéphaliques ou du tronc cérébral. L’élargissement du spectre de la maladie a fait proposer le terme d’« aquaporinopathie auto-immune ». L’évolution clinique de NMO est dominée par des attaques aiguës (11).

L’objectif de ce travail est de présenter le second cas documenté de NMO en Côte d’Ivoire à travers l’observation d’une jeune femme ayant présenté des signes d’atteinte médullaire et optique.

OBSERVATION

Nous rapportons le cas d’une jeune femme âgée de 31 ans hospitalisée au service de médecine physique et de réadaptation pour la prise en charge rééducative d’une paraplégie d’installation progressive associée à des troubles vésico-sphinctériens et des escarres. La patiente n’avait aucun antécédent pathologique particulier. Au niveau gynéco-obstétrique elle avait fait deux épisodes d’interruption volontaire de grossesse (IVG).

L’histoire de la maladie révèle un début des signes qui remonterait à 15 mois avant son hospitalisation, marqué par la survenue de paresthésie puis d’un déficit moteur des membres inférieurs. Deux autres poussées de déficit neurologique ont été noté dans l’évolution, d’abord une aggravation du déficit moteur des membres inférieurs puis une cécité monoculaire gauche. L’examen neurologique à son admission au service de médecine physique et de réadaptation a objectivé une mydriase aréflexique gauche, une paraplégie spastique, une escarre sacrée stade III et une incontinence vésicale et anale. En cours d’hospitalisation soit à J 27, la patiente a présenté une baisse brutale et rapidement progressive de l’acuité visuelle de l’œil droit. L’examen neurologique a alors noté une mydriase réactive droite. L’examen ophtalmologique a noté une atrophie optique temporale gauche et un fond d’œil normal à droite.

L’examen cytobactériologique et chimique du LCS après la ponction lombaire a été sans anomalie. La recherche d’Ac anti NMO dans le LCS a été faiblement positive. La sérologie HIV a été négative. L’imagerie médullaire notamment l’IRM de la moelle-thoracique et cervicale (Figure 1 et Figure 2) a retrouvé un hypo signal en Echo de spin T1, un hyper signal en Echo de spin T2 médullaire en en faveur d’une myélite étendue. Aucune imagerie encéphalique n’a pu être réalisé.

Le diagnostic de Neuromyélite avec anticorps anti-aquaporine 4 positif a été retenu selon les critères diagnostic de la NMO (Figure 3). L’attitude thérapeutique ayant permis l’amélioration de l’acuité visuelle a consisté en une corticothérapie à forte dose débuté à J1 à raison de 1g/jour pendant 03 jours puis 60mg /jr pendant 01 mois.

DISCUSSION

La neuromyélite optique est une affection inflammatoire rare du système nerveux central (1). Elle a longtemps été considérée comme une forme particulière de SEP. Cependant de nouveaux critères diagnostics ont permis d’en faire une affection à part entière.

Le diagnostic repose sur les critères de Wingerchuck et al (10) qui regroupent : Neuropathie optique rétrobulbaire, une Myélite transverse aigue et au moins deux des trois critères suivants : IRM encéphalique normale (ou non évocatrice de SEP) ; une IRM médullaire avec 1 lésion étendue sur au moins 3 segments vertébraux et les NMO-IgG/AQP4Ab séropositifs.

Notre observation présente le deuxième cas confirmé de NMO en Côte d’Ivoire depuis 2015 (12). Elle révèle un double intérêt. Premièrement l’intérêt de la suspicion clinique devant l’évolution par poussée aigue d’une atteinte médullaire associée à une atteinte optique. Devant ces atteintes, le diagnostic est fortement évoqué chez une jeune femme avec antécédent d’interruption volontaire de grossesse (IVG). La NMO est plus fréquente chez les femmes et l’âge médian est de 35 à 37 ans (5). L’IVG est un facteur avec une association significative de survenue de la NMO (4). Le diagnostic positif est approché par l’IRM médullaire retrouvant une myélite longitudinale étendue supérieure à trois métamères ou segment vertébraux (10). L’IRM encéphalique lorsqu’elle est réalisée est anormale dans 60% des cas avec 6% de cas de lésion évocatrice d’une NMO (7). Dans notre cas, l’IRM encéphalique n’a pu être réalisé du fait surtout du coût financier. La positivité des Ac Anti NMO a été l’argument majeur du diagnostic. Les difficultés diagnostiques ont été décrites dans d’autres observations en Afrique noire aussi bien par Yapo-Ehounoud et al (12) et Maiga Y et al (6). Ces difficultés diagnostiques, peuvent-être dues non seulement à la méconnaissance de cette affection mais aussi à la difficulté de la réalisation du bilan paraclinique qui est à la charge du patient.

Secondairement l’intérêt de l’utilisation de la corticothérapie d’emblée à la phase aigüe de la poussée inflammatoire qui permet une rémission de la symptomatologie. Dans notre cas l’instauration de la corticothérapie à forte dose dès les premiers signes de la poussée aigue a permis la régression totale de la symptomatologie. Le consensus actuel repose en première intention sur l’utilisation d’échange plasmatique et ou corticothérapie à forte dose lors des poussées aigue suivi d’un traitement de fond reposant sur l’immunosuppression général ou sélective (l’azathioprine, le mycophénolate mofétil, le rituximab et la mitoxantrone) (9, 2). En urgence, nous avons pu instaurer dans notre cas la corticothérapie cependant, aucun traitement de fond n’a pu être instaurer du fait non seulement du manque de moyens financiers mais aussi du fait des croyances culturelles de la patiente et des accompagnants.

L’évolution de la NMO est dominée par des attaques aigues (11), comme présenté dans notre cas et celui de Yapo-Ehounoud (12). Aussi, la myélopathie dans la maladie de Devic est le plus souvent associé avec une mauvaise régression (8).

CONCLUSION

La NMO est une affection rare. Cependant la suspicion clinique devant l’association clinique de la NORB et la myélite transverse aigue doit faire évoquer le diagnostic et faire rechercher les critères diagnostic. La corticothérapie reste le traitement de choix à la phase aigüe de la poussée dans notre contexte de travail.

 

Tableau 1: Critères Diagnostiques des affections du spectre NMO (NMOSD)

Tableau 1: Critères Diagnostiques des affections du spectre NMO (NMOSD)

 

ICONOGRAPHIES

Figure 1 : IRM thoracique en coupe sagittale séquence T2 montrant un hyper signal étendu intramédullaireFigure 1 : IRM thoracique en coupe sagittale séquence T2 montrant un hyper signal étendu intramédullaireFigure 1 : IRM thoracique en coupe sagittale séquence T2 montrant un hyper signal étendu intramédullaire

Figure 1 : IRM thoracique en coupe sagittale séquence T2 montrant un hyper signal étendu intramédullaire

 

Figure 2 : IRM du rachis cervical en coupe sagittale séquence T2 montrant un hyper signal intramédullaire

Figure 2 : IRM du rachis cervical en coupe sagittale séquence T2 montrant un hyper signal intramédullaire

 


RÉFÉRENCES

 

    1. BERNARD-VALNET R, MARIGNIER R. Évolution du spectre de la neuromyélite optique de Devic. La Presse Médicale [en ligne] 2015 Avril [consulté le 10/03/2018] ; (44) 401-10. Consultable à l’URL : http://www.sciencedirect.com
    2. CABRE P, OLINDO S, MARIGNIER R, JEANNIN S, MERLE H, SMADJA D. Efficacy of mitoxantrone in neuromyelitis optica spectrum: clinical and Study.J Neurol Neurosurg Psychiatry. 2013 ; (84) 511-16.
    3. DERAL-STEPHANT V, ROUX-LELIEVRE C, VIGNAL R, STEPHANT E., FAIVRE A.,ALLA P. Neuromyélite optique de Devic : discussion diagnostique après dix ans d’évolution d’une neuropathie optique bilatérale sévère. Journal Français d’Ophtalmologie [en ligne] Septembre 2008 [consulté le10/03/2018] ; (31)705-9. Consultable à l’URL : http://www.sciencedirect.com
    4. ESKANDARIEH S, NEDJAT S. Facteurs de risque environnementaux dans le trouble du spectre neuromyélite optique: une étude cas-témoin. Acta Neurol Belg 2018 juin; 118: 277-87.
    5. FLANAGAN EP, CABRE P, WEINSHENKER BG, SAUVER JS, JACOBSON DJ, MAJED M1, LENNON VA, LUCCHINETTI CF, MCKEON A, MATIELLO M, KALE N, WINGERCHUK DM, MANDREKAR J, SAGEN JA, FRYER JP, ROBINSON AB, PITTOCK SJ. Epidemiology of aquaporin-4 autoimmunity and neuromyelitis optica spectrum.Ann of Neurol 2016 ; 79 : 775-83.
    6. MAIGA Y, TRAORE I, DIALLO SH, MAIGA A, CAMARA M, DAOU M. La Neuromyélite optique (NMO) au Mali : quelle réalité ? Revue neurologique. 2016 ; 172(S1) : 79.
    7. PITTOCK S.J, VA LENNON , KRECKE K , DM WINGERCHUK , LUCCHINETTI CF , WEINSHENKER BG .Brain Abnormalities in Neuromyelitis Optica.Archives of Neurology 2006; 63: 390-6. https://doi.org/10.1001/archneur.63.3.390.
    8. ROCCA MA, AGOSTA F, MEZZAPEZA DM, MARTINELLI V, SALVI F, GHEZZI A ,BERGAMASCHI R , COMI G , FILIPPI M .Magnetization Transfer and Diffusion Tensor MRI Show Gray Matter Damage in Neuromyelitis Optica.Neurology.2004 ;62 :476-8
    9. WARABI Y, MATSUMOTO Y, HAYASHI H. Interferon beta-1b exacerbate sclerosis with severe optic nerve and spinal cord demyelination Journal of Neurological Sciences, 2007 ; 252 : 57-61.
    10. WINGERCHUCK DM, BANWELL B, BENNETT JL , CABRE P, CARROLL W, CHITNIS T, DE SEZE J, FUJIHARA K, GREENBERG B, JACOB A, JARIUS S2, LANA-PEIXOTO M, LEVY M, SIMON JH, TENEMBAUM S, TRABOULSEE AL, WATERS P, WELLIK KE, WEINSHENKER BG. International consensus diagnostic criteria for neuromyelitis optica spectrum disorders. Neurology 2015 ; 85 : 177-89.
    11. WINGERCHUCK DM, HOGANCAMP WF, O’BRIEN PC, WEINSHENKER BG. The clinical course of neuromyelitis optica (Devic’s syndrome). Neurology, 1999;53:1107-14.
    12. YAPO-EHOUNOUD C, JOINGO TIAGO EE AMON-TANOH MT, TANOH AC, KADJO CC, BENE YR, AKA-ANGHUI DIARRA E, ASSI B. Devic’s Optical Neuromyelitis: A Case Report in Ivory Coast.International Journal of Science and Engineering Investigations 2017 August; 6: 43-6.



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