AJNS
TRAUMATISME CRANIEN PENETRANT PAR CLOU ENFONCE DANS LE VERTEX : A PROPOS D’UNE OBSERVATION

INTRODUCTION

Les traumatismes crânio-cérébraux pénétrants sont relativement rares représentant environ 0,4% de tous les traumatismes crâniens (5). Leur pronostic ainsi que leur devenir dépendent de la nature de l’objet pénétrant (8). Les traumatismes par clou ont été rapportés plus rarement et surviennent essentiellement lors d’accident de travail ou de tentative de suicide et l’automutilation (contexte psychiatrique) par l’utilisation de pistolet à clou (6). Ils sont en général de bon pronostic, mais la stratégie de prise en charge doit être rapide et décisive permettant de prévenir les complications essentiellement vasculaires et infectieuses qui peuvent, lorsqu’elles surviennent, aggraver le pronostic. Nous rapportons un cas de traumatisme crânien pénétrant par clou survenu dans de circonstances non élucidées.

CAS CLINIQUE

Il s’agissait d’un patient de 34 ans, sans emploi, sans antécédent notable, référé d’un hôpital de district, pour traumatisme crânien par arme blanche remontant à 3 jours. Les circonstances du traumatisme étaient non élucidées. Selon le patient, il se rappelait avoir été réveillé, la nuit, par une sorte « d’étincelle ayant traversé ses yeux », puis s’était retrouvé baigné dans du sang provenant de sa gorge, avec une sensation de lourdeur de la tête. Il a bénéficié d’abord des soins d’urgence, d’une prévention antitétanique, puis d’une radiographie standard du crâne (Figure 1) avant d’être référé dans notre hôpital. A son admission aux urgences, l’examen clinique retrouvait un patient conscient GCS=15/15, avec des pupilles isocores et réactives, apyrétique, et de bonnes constantes hémodynamiques. Il était un peu apathique, avec une parole ralentie ; il rapportait une sensation de faiblesse généralisée. L’examen neurologique était normal. Le reste de l’examen notait au niveau crânien et sur le vertex, la tête du clou enfoncé en intracrânien qui affleurait la peau devenue noirâtre et nécrotique avec du pus sourdre au pourtour de la tête du clou (Figure 2). On notait également une plaie linéaire, horizontale, propre, déjà suturée, d’environ 4 cm de longueur, située dans la région cervicale antérieure juste au-dessus du cartilage thyroïde. En urgence un scanner cérébral sans injection de produit de contraste était réalisé permettant d’apprécier de façon plus exacte les lésions cérébrales éventuelles ainsi que la localisation, et la profondeur du clou déjà visualisé sur la radiographie standard. Le scanner cérébral montrait un clou enfoncé de façon perpendiculaire au crâne jusqu’à proximité du corps calleux. Le clou était incurvé vers la gauche et se situait sur la ligne médiane nous donnant l’impression d’avoir traversé le sinus sagittal supérieur à la partie antérieure de son 1/3 moyen. On ne notait pas de lésion cérébrale sur les coupes parenchymateuses (Figure 3). La fenêtre osseuse ne montrait pas de fragments osseux en intracrânien. Le patient était admis aussitôt au bloc opératoire pour l’extraction du clou. Dans la crainte que le clou ait traversé le sinus sagittal supérieur (Figure 4), et n’ayant pas fait d’angioscanner, nous avions décidé de réaliser un volet dans la perspective d’ouvrir la dure-mère pour le contrôle d’un saignement et la réparation d’une blessure éventuelle du sinus sagittal supérieur. Le volet était rectangulaire de part et d’autre de la ligne médiane et centré par le clou. Pour ne pas mobiliser le clou, nous réalisions un trou de trépan latéral droit à environ 2 cm de la ligne médiane en regard du clou, puis à l’aide d’une pince Kerrison, nous avions délicatement rongé l’os jusqu’à isoler le clou du volet. Après avoir réalisé l’hémostase, l’exploration nous suggérait que le clou n’aurait pas traversé le sinus sagittal supérieur qui se trouvait plus déjeter à droite par rapport à la ligne médiane. Nous avions alors procédé, sans ouverture de la dure-mère, au retrait du clou par séquences faites de petits mouvements dans la direction opposée, sans exercer de mouvement de rotation, afin d’éviter au maximum la survenue de lésions cérébrales et vasculaires notamment du sinus sagittal supérieur. A sa sortie du parenchyme le clou, d’une longueur de 7,5 cm, était incurvé, non rouillé (Figure 5). Nous notions un saignement en jet vite maitrisé par la mise en place de spongel et du surgicel puis par tamponnement et irrigation abondante au sérum salé physiologique. Devant ce saignement nous avions craint une blessure du sinus sagittal supérieur avec risque d’hémorragie intracérébrale. Néanmoins nous décidions d’attendre en surveillant les paramètres vitaux. Après plus de 5 minutes d’attente, les constantes vitales étant restées stables, nous avions procédé à la fermeture sans ouvrir la dure-mère. Le réveil du patient s’était fait dans l’heure post-opératoire sans aucun incident. Un scanner cérébral de contrôle était réalisé à environ H12 post-opératoire, il ne montrait aucune lésion intracrânienne (Figure 6). Le patient avait reçu une antibiothérapie pré et peropératoire à base de Ceftriaxone 2g/jour, qui est ensuite poursuivie pendant 10 jours. L’évolution clinique était favorable sans aucune complication, avec un recul de plus de 8 mois.

DISCUSSION

Les traumatismes crâniens pénétrants sont relativement rares. Ils représentent 0,4% de tous les traumatismes crâniens (5). Ces lésions, d’origines et de circonstances diverses, surviennent cependant dans la plupart des cas à la suite de projectiles, par coups de feu, ou d’autres objets métalliques ou en bois, lors d’accidents de travail ou de la circulation, de tentatives de suicide ou d’automutilation. Cependant les traumatismes crâniens pénétrants par clou sont très rarement rapportés dans la littérature et surviennent fréquemment de façon accidentelle au lieu de travail ou lors de tentatives de suicide (6,7). Les premiers cas de clous intracrâniens rapportés dans la littérature provenaient du Nigéria où on enfonçait de longs clous dans la tête des criminels en guise de punition (9). Une étude malienne de 2019 a répertorié, de 2006 à nos jours, 23 cas de traumatismes crâniens pénétrants par des clous dont 05 étaient secondaires à une agression physique (3). Dans notre observation, les circonstances du traumatisme crânien sont restées non élucidées. Le patient a été retrouvé avec le clou enfoncé dans le crâne, et une plaie cervicale horizontale nette qui nous a fait évoquer une tentative d’égorgement. Nous avons noté juste que le patient résidait dans une région frontalière avec le Nigeria, où les rumeurs décrivaient des scènes de punition identiques à celles rapportées du Nigeria. A notre connaissance notre patient est le premier et le seul actuellement dans ces circonstances à avoir été pris en charge au Niger.

Sur le plan physiopathologique, les clous se déplacent généralement avec une vélocité inférieure à 100 m/s, et entrainent fréquemment une perturbation directe et une lacération des tissus. Ces types de forces provoquent principalement des blessures primaires localisées et conduisent souvent à un meilleur pronostic (5). Ceci se traduit sur le plan clinique par des troubles neurologiques minimes, avec conservation souvent de la conscience. La mortalité est faible ; elle serait associée à des lésions d’autres organes, ou à la pénétration d’un objet plus large ou de plus grande vélocité, ou enfin à la survenue de complications (5,6). Ces complications peuvent être classées en 3 grandes catégories : les infections, les complications vasculaires et l’épilepsie post-traumatique.

L’infection peut aggraver l’état clinique du patient et engendre un taux de morbidité et de mortalité élevé. Elle est due à la présence de fragments métalliques ou osseux intracrâniens, de fuite de liquide céphalospinal, de pneumocéphalie ou de lésions transventriculaires. Le germe le plus fréquemment retrouvé est le Staphylococcus aureus. On peut citer parmi ces infections : l’infection cutanée, l’ostéomyélite, la méningite, l’empyème cérébral, l’abcès cérébral, ou la ventriculite. Elles peuvent être prévenues par une antibioprophylaxie (4,5). L’épilepsie post-traumatique est le fait des lésions corticales dans la majorité des plaies pénétrantes. Elle survient dans 30 à 50% des traumatismes crâniens (4). L’instauration d’un traitement anticonvulsivant prophylactique a permis de réduire cette incidence (5). Quant aux complications vasculaires elles représentent un large éventail. Les complications immédiates (hémorragies sous arachnoïdiennes, hémorragies ventriculaires, infarcissements veineux) sont à l’origine d’ischémie ou d’hydrocéphalie aigue compliquant le pronostic vital (4-6,8). Les pseudoanévrismes post-traumatiques peuvent apparaître immédiatement ou plusieurs années après le traumatisme, avec une moyenne de survenue de 2-3 semaines post-traumatiques (4,8). Leur évolution défavorable dans 41% des cas incite à les rechercher par la réalisation d’une artériographie cérébrale (4).

La prise en charge des patients nécessite une imagerie en urgence. La TDM cérébrale est l’examen idéal pour déterminer la localisation et le nombre de clous mais aussi les lésions cérébrales. Couplée à l’angioscanner voire à l’angiographie cérébrale, elle permet d’évaluer avec plus de précisions les lésions vasculaires ou le risque vasculaire en fonction de la localisation plus exacte du clou par rapport aux structures vasculaires, et ainsi de mieux affiner la stratégie chirurgicale (5-7). Certains auteurs pensent que l’angioscanner, du fait des artéfacts fréquemment créés par le clou, n’est pas suffisant pour le diagnostic d’une plaie vasculaire ; en revanche il est hautement recommandé si la blessure vasculaire est patente d’autant plus qu’elle est associée à des signes cliniques (4). L’IRM a un rôle controversé car elle ne donne pas de meilleures images sur l’os et qu’elle pourrait être dangereuse en cas d’objets ferromagnétiques (5). L’imagerie permet aussi de suivre l’évolution post-opératoire des traumatismes crâniens pénétrants. La TDM reste l’examen de choix pour évaluer un saignement post-opératoire éventuel, ou le retrait complet du corps étranger. Certains auteurs recommandent de réaliser une angiographie cérébrale 1 à 2 semaines après le traumatisme à la recherche de pseudoanévrismes (4). D’autres suggèrent l’utilisation de la radiographie standard peropératoire en cas de points de pénétration multiples des corps étrangers pour s’assurer de leur extraction complète (6). En ce qui concerne notre patient seule une TDM cérébrale a été réalisée pour le diagnostic comme pour le suivi post-opératoire.

Le traitement des traumatismes crâniens pénétrants comporte un volet médical et un volet chirurgical. Sur le plan médical, le traitement comporte ainsi une prophylaxie antitétanique indispensable, même si l’incidence du tétanos est en diminution (5). Il comporte aussi une antibioprophylaxie, qui reste cependant controversée dans les traumatismes crâniens pénétrants par clou car il n’existe pas de recommandations précises dans la littérature. Pour certains auteurs l’antibioprophylaxie n’est pas du tout recommandée (2), alors que d’autres estiment qu’elle est nécessaire, car le clou n’étant pas stérile, les germes peuvent migrer le long de la cavité temporaire créée par le clou (1). La réduction de l’incidence de l’épilepsie post-traumatique passe par la mise en place d’antiépileptiques (5). Le traitement chirurgical des traumatismes crâniens pénétrants reste le gold standard. Il présente plusieurs objectifs : extraire le corps étranger, évacuer les tissus nécrotiques et les débris contaminants, évacuer un hématome dû à la lésion, assurer l’hémostase, réparer la dure-mère pour prévenir la fuite de LCS (liquide céphalospinal) et finalement prévenir les complications (5,7). Il n’existe pas de recommandations claires standardisées pour la prise en charge, de telle sorte que la stratégie chirurgicale est déterminée de façon individuelle (5). Ce traitement se décline soit en une craniotomie lorsqu’il y’a un risque de blessure vasculaire notamment d’un sinus veineux, ou pour convertir l’intervention dans le but de gérer un éventuel hématome ; soit en un retrait directe simple sans craniotomie lorsque le risque vasculaire est absent ou que l’objet n’a pas entièrement traversé l’os (4,6,7). Selon la plupart des auteurs ce traitement ne doit jamais se concevoir en dehors du bloc opératoire au risque d’entrainer de lésions secondaires vasculaires incontrôlables et potentiellement fatales (5). Quelle que soit la modalité d’extraction, le corps étranger doit être retiré avec précaution, directement dans le sens inverse à sa direction, sans réaliser de mouvements de pivotement pour prévenir des lésions secondaires (5). Dans notre observation le patient a reçu une prophylaxie antitétanique systématique et une antibioprophylaxie. La prévention antiépileptique n’a pas été instaurée devant l’absence de lésions cérébrales au scanner. Sur le plan chirurgical nous avions opté pour une craniotomie en raison de la localisation du clou et de l’absence de l’angioscanner ou de l’angiographie cérébrale, qui auraient pu nous préciser les rapports exacts du clou avec le sinus sagittal supérieur. Puis après exploration et la visualisation du clou qui nous semblait en dehors du sinus sagittal supérieur, qui se trouvait plus déjeter à droite, nous avions procédé au retrait du clou sans ouverture de la dure-mère, sous la surveillance des paramètres vitaux du patient pendant plusieurs minutes. L’utilisation de l’angiographie cérébrale peropératoire est une avancée importante permettant de contrôler les lésions vasculaires ou de se rassurer quant aux lésions vasculaires possibles (8). L’utilisation récente de l’IOCT (Intraoperative computed tomography) a aussi amélioré le pronostic des traumatismes crâniens pénétrants en permettant d’identifier très précocement les complications notamment hémorragiques mais aussi en permettant une exposition ainsi qu’une manipulation à minima du parenchyme. Ceci permet une réduction de la durée d’hospitalisation, un meilleur devenir et moins d’examens complémentaires postopératoires (2). Nous pensons qu’à défaut de tous ces examens, une surveillance stricte au niveau du bloc opératoire puis une TDM cérébrale post-opératoire précoce pourraient permettre de déceler les complications hémorragiques éventuelles. Notre patient en avait bénéficié, montrant l’absence de lésions intracrâniennes. Notre stratégie était certes risquée du fait de nos difficultés matérielles, mais elle peut constituer une alternative dans les pays disposant des moyens similaires. Le séjour hospitalier était court avec des suites simples, et le suivi ultérieur, essentiellement clinique, sur plus de 8 mois, n’a pas retrouvé de complications.

CONCLUSION

Les traumatismes crâniens pénétrants par clou sont très rares. Ils sont souvent associés à des troubles neurologiques minimes. Cependant Leur prise en charge peut être complexe, et doit intégrer une stratégie adaptée, rapide et individualisée en tenant compte des conditions locales dans le but de prévenir les complications principales, vasculaires et infectieuses, sources d’aggravation neurologique.

CONTRIBUTION DES AUTEURS

Mahamadou Aminou SANDA a rédigé le manuscrit

Les auteurs ont participé à la prise en charge du patient

Tous les auteurs ont lu et approuvé la mention de leur nom dans le manuscrit

Figure 1 : Radiographie standard de face montrant le clou sur la ligne médiane

Figure 2 : image préopératoire : clou implanté sur le vertex

Figure 3 : TDM cérébrale montrant la localisation du clou sans lésions cérébrales mais avec des artéfacts. A : coupe sagittale, B : coupe axiale, C : coupe coronale

Figure 4 : image peropératoire : clou sur la suture sagittale

Figure 5 : clou extrait

Figure 6: TDM cérébrale de contrôle en coupe sagittale

MEDULLOBLASTOME EXTRA-AXIAL DE L’ANGLE PONTO CEREBELLEUX : A PROPOS D’UN CAS

INTRODUCTION

Le médulloblastome représente 25% de tumeurs cérébrales de l’enfant et 1% des tumeurs cérébrales de l’adulte. Son incidence annuelle est de 3 cas pour 100 000 enfants (4). La localisation habituelle est le vermis cérébelleux (10). La localisation extra axiale de l’angle ponto cérébelleux est rare (10,11). Environ 39 cas seulement ont été décrits dans la littérature (1-5,7). Les auteurs présentent un cas de médulloblastome de l’angle ponto cérébelleux et font une revue de la littérature.

OBSERVATION

Ce patient de 12 ans, de sexe masculin, droitier, présentait des céphalées et des vertiges évoluant depuis environ deux semaines.

À l’examen physique, le patient était conscient, orienté dans le temps et l’espace. Les fonctions supérieures étaient normales ; une baisse de l’audition à droite ; pas de signe cérébelleux ; un syndrome vestibulaire avec déviation vers la droite à la station debout et à la marche. Le reste de l’examen neurologique était normal.

L’IRM cérébrale montrait un processus expansif de l’angle ponto-cérébelleux mesurant 3 cm x 3 cm (figure 1), rehaussé de manière homogène par le produit de contraste (figure 2) et exerçant un effet de masse sur le cervelet avec hydrocéphalie.

Le patient subit une dérivation ventriculo-péritonéale, suivie d’une craniotomie sous occipitale rétro mastoïdienne, avec exérèse complète de la tumeur, dans la même narcose. Les suites opératoires étaient simples et marquées par une discrète parésie faciale et un discret syndrome cérébelleux cinétique droit. L’IRM du névraxe ne montrait pas de métastases ni de résidu tumoral. Le traitement adjuvant était la radiothérapie du névraxe et la chimiothérapie.

L’histopathologie montrait un médulloblastome desmoplasique/nodulaire, SNC et OMS grade IV. En immuno-histo-chimie ; les cellules tumorales exprimaient faiblement la synaptophysine, en particulier dans les îlots pâles. Le NEU-N était négatif. La prolifération (MIB1) était de 2 à 3% dans les îlots pâles, atteignant 10 à 20% dans les zones péri-nodulaires moins différenciées.

DISCUSSION

Les tumeurs de la fosse postérieure représentent 55% des tumeurs cérébrales de l’enfant. Le médulloblastome est la tumeur la plus fréquente et représente environ 1/3 des tumeurs de la fosse postérieure de l’enfant suivie de l’astrocytome pilocytique et de l’épendymome (4). La localisation est vermienne cérébelleuse dans la quasi-totalité des cas avec ou sans extension vers les hémisphères cérébelleux.

La localisation extra-axiale de l’angle ponto cérébelleux est rare. En parcourant la littérature, seuls 39 cas ont été rapportés (1-5,7).

Le diagnostic du médulloblastome est basé sur l’anatomo-pathologie qui montre une tumeur neuro épithéliale embryonnaire (6) maligne OMS grade IV (9). Les 4 sous types sont définis par l’immuno-histochimie et la biologie moléculaire. Cependant, la rareté des cas décrits dans la littérature ne permet pas d’établir de corrélation entre la localisation extra axiale de l’angle ponto-cérébelleux, l’âge du patient, le sous type histologique, la réponse aux différentes modalités thérapeutiques et le pronostic.

La prise en charge était similaire au traitement classique du médulloblastome vermien à savoir : la chirurgie avec exérèse complète, l’irradiation de tout le névraxe et la chimiothérapie. À cause de l’indisponibilité du matériel de ventriculoscopie, des risques infectieux liés aux dérivations ventriculaires externes dans notre environnement et le potentiel de récidive de la tumeur, une dérivation ventriculo péritonéale était posée dans la même narcose, avant l’exérèse tumorale.

CONCLUSION

Le médulloblastome extra axial de l’angle ponto-cérébelleux est une tumeur extrêmement rare. Il doit être évoqué dans le diagnostic différentiel des tumeurs de l’angle ponto cérébelleux. Des études supplémentaires sont nécessaires pour établir les particularités épidémiologique, thérapeutique et pronostique de la localisation extra-axiale de l’angle ponto-cérébelleux.

Conflit d’intérêt :

Les auteurs de ce manuscrit ne déclarent aucun conflit d’intérêt.

 

Figure 1 : IRM encéphalique T1 sans contraste

 

Figure 2 : IRM encéphalique T1 avec produit de contraste

HÉMATOME INTRACÉRÉBRAL ASSOCIÉ À UNE HÉMORRAGIE SOUS ARACHNOÏDIENNE COMPLIQUANT UNE MALADIE DE TAKAYASU : À PROPOS D’UN CAS

INTRODUCTION

L’artérite de Takayasu (AT) est une maladie inflammatoire idiopathique des grosses artères élastiques chez les jeunes, principalement l’aorte, l’artère pulmonaire et leurs branches.

Les manifestations cérébro-vasculaires sont rares, dominées par les infarctus cérébraux et les hémorragies méningées. Les hématomes cérébraux intra-parenchymateux restent rares dans l’AT.

C’est la plus fréquente des artériopathies inflammatoires du sujet jeune, débutant le plussouvent entre 20 et 40 ans avec une prévalence féminine. L’incidence en Occident, incluant les Etats Unis et l’Europe, est établie à 1-3 cas/millions d’habitants/ an (13).

L’AT est encore appelée « maladie de femmes sans pouls », « aortopathie thrombotique », « syndrome de l’arche aortique », « coarctation inversée » et « aortoartérite aspécifique ».

Le diagnostic est retenu devant l’âge jeune, le sexe féminin, l’abolition des pouls et l’aspect radiologique : atteinte des vaisseaux de gros et moyen calibre, rarement de petit calibre. L’incidence des manifestations cérébro-vasculaires dans l’AT varie de 57% à 80% (7). L’hémorragie méningée et l’accident vasculaire ischémique transitoire ou constitué, décrits par la littérature, les plus fréquents, la survenue d’un hématome intra-parenchymateux est rare et demeure une entité méconnue.

OBSERVATION

Il s’agit d’une patiente âgée de 49 ans, suivie pour maladie de Takayasu (occlusion de l’artère sous-clavière gauche) sous corticothérapie orale (prédnisolone : 40mg/j) depuis 4 ans.

La patiente s’est présentée aux urgences pour une hémiplégie droite avec une aphasie globale d’’installation brutale, score NIHSS :12. Le scanner cérébral (figure 1) a montré la présence d’une hypodensité du noyau lenticulaire gauche en rapport avec un accident vasculaire cérébral ischémique sylvien profond gauche récent. L’angio-TDM des troncs supra-aortiques était sans anomalies.

L’éléctro-cardiogramme a objectivé un rythme régulier sinusal, le bilan biologique initial standard (NFS, ionogramme sanguin, CRP) était sans anomalies.

Une insuffisance mitrale minime a été retenue à l’échographie trans-thoracique.

Le diagnostic d’AVCI sylvien profond gauche sur une maladie de Takayasu a été retenu. La patiente a été mise sous acide acétylsalicylique : 100mg/j avec le maintien de la corticothérapie orale (prédnisolone : 40mg/j).

Deux mois plus tard, elle présente un déficit moteur et des clonies intéressant l’hémicorps gauche. Examen clinique : TA : 140/ 80 mmHg avec un score NIHSS à 10 (séquelles du 1er AVCI). La TDM cérébrale (figure 2) a montré un hématome fronto-pariétal droit avec un œdème péri lésionnel, le tout exerçant un effet de masse sur la corne occipitale du ventricule homolatéral (volume : 5.6 ml) avec contamination des espaces sous arachnoidiens en regard de l’hématome.

L’échographie des troncs supra-aortiques était en faveur de spectres démodulés de l’artère sous clavière gauche et l’artériographie (figure 3) a révélé des sténoses des artères de gros, moyens et petits calibres avec absence d’anévrysmes.

L’échographie-Doppler des artères rénales était sans anomalies.

Le bilan biologique a objectivé une anémie inflammatoire (Hb : 9.7 g/dl).

La patiente a été mise sous benzodiazépine (Clobazam) à 15 mg/j, HBPM 4000UI/0,4 ml avec arrêt de l’anti-agrégant plaquettaire pendant 48h, associés à un traitement anti-hypertenseur (Inhibteur calcique : Amlodipine à 5mg/j). Un bolus de méthylprédnisolone (1g/j) pendant 3 jours a été administré puis un relais par corticothérapie orale (1mg/kg/j). Un traitement par Méthoréxate (injection de 12.5 mg/semaine) a été instauré et la patiente a été déclarée sortante avec une bonne amélioration clinique. Les crises épileptiques symptomatiques ont été traitées par Lamotrigine (100mg/j).

Deux semaines plus tard, la patiente a été admise aux urgences pour un trouble de conscience survenu après plusieurs crises épileptiques tonico-cloniques généralisées. L’examen clinique a trouvé une patiente inconsciente avec un GCS à 8/15, apyrétique, pupilles égales et réactives, nuque souple, chute asymétrique des 4 membres au dépends du côté droit. Le diagnostic d’état de mal épileptique a été retenu. La patiente a été mise sous protocole de Clonazépam dose de charge et dose d’entretien.

La TDM cérébrale (figure 4) a montré une augmentation importante du volume de l’hématome pariéto-frontal droit (volume : 51,23 ml), responsable d’une inondation quadri ventriculaire massive et d’un engagement sous falcoriel. L’indication opératoire n’a pas été posée.

La patiente est décédée dans les 48 heures qui suivaient son admission aux urgences.

DISCUSSION

Historiquement décrite la première fois au Japon en 1905 par deux ophtalmologistes japonais : Takayasu et Onishi, l’artérite de Takayasu a une prévalence très variable d’une région à une autre : de 7,85/100.000 habitants au Japon à 1-3/millions hab en Europe et aux Etats Unis (13).

L’AT est plus fréquente chez l’adulte jeune avec un pic de fréquence au cours de la 2- 3ème décennie. Au Japon, 90% des patients atteints de Takayasu sont des femmes jeunes. Le sexe ratio retrouvé en Europe, Etats Unis et Japon est de 8-9/1; seule l’Afrique retrouve à plusieurs reprises un rapport de 1,5/1 (13).

Une classification clinico-radiologique largement utilisée se basant sur la distribution artérielle des lésions, décrit 3 groupes : AT isolée à l’aorte et ses branches, AT avec sténose de la circulation artérielle pulmonaire et rarement AT avec une atteinte des vaisseaux plus périphériques (16).

Le délai de découverte de la maladie est très variable. Ishikawa k. retrouve un délai diagnostic de 5 mois chez l’adulte. Certaines études reconnaissent des extrêmes allant de quelques semaines à quelques années.

Les symptômes neurologiques au cours de l’AT sont le plus souvent non focaux : sensation vertigineuse, lipothymie, syncope, diplopie binoculaire transitoire. Les céphalées sont fréquentes, répondant ou non aux critères de migraine sans aura, elles pourraient être notamment secondaires à un hyper-débit compensateur dans le territoire de la carotide externe. Les infarctus cérébraux transitoires ou constitués sont rares, même lorsque plusieurs artères à destination cérébrale sont atteintes.

L’AVCI peut être inaugural de la maladie, avec un pourcentage variable allant de 9 à 93% (4). Les événements cérébrovasculaires sont révélateurs d’une AT dans 53% des cas. Parmi ces cas, le diagnostic d’AT a été confirmé avec un délai moyen de 2 ans, ce qui peut avoir entraîné un retard du traitement de l’artérite (4). En Tunisie, certains auteurs avaient retrouvé un cas révélé par un infarctus cérébral sur 27 patients atteints de maladie de Takayasu (2). Dans une étude coréenne, les accidents vasculaires ischémiques étaient notés dans 17.6% et représentaient fréquemment le motif initial de consultation, précédant le diagnostic du Takayasu (8).

Une étude rétrospective française a décrit que les patients du Maghreb présentaient plus d’infarctus cérébraux que les patients européens (3). Ringleb et coll. a également suggéré que les signes cérébrovasculaires lies à l’AT étaient plus fréquents en Europe et au Japon (15).

Le mécanisme de survenue de l’infarctus cérébral dans cette affection diffère selon la phase d’évolution de la maladie. Pendant la phase pré-occlusive, un épaississement inflammatoire de la paroi artérielle des troncs supra-aortiques se forme avec constitution de micro-emboles inflammatoires qui vont se détacher et être responsables d’atteintes ischémiques au niveau cérébral. Tandis que, la phase occlusive est caractérisée par une installation de fibrose qui va aboutir à des lésions sténo-occlusives. Ces dernières constituent une source de complications neurologiques en particulier la diplopie, perte de connaissance et rarement un infarctus cérébral (2).

Un accident vasculaire ischémique mineur ou transitoire est plus fréquemment observé au stade précoce de l’artérite de Takayasu (dans un délai d’un à deux ans après le développement de l’artérite), ce qui peut être lié à une mauvaise collatéralité. L’hémodynamique cérébrale peut également être chroniquement affectée dans l’artérite de Takayasu et une légère réduction de la pression artérielle peut développer une ischémie cérébrale même au stade chronique de la maladie (17).

Bien que les saignements intracrâniens ou la rupture anévrysmale puissent être la cause de mortalité dans l’artérite de Takayasu (10), l’accident vasculaire cérébral hémorragique et l’hémorragie sous arachnoidienne (HSA), n’ont pas été fréquemment rapportés par rapport à l’accident ischémique cérébral. Dans une étude américaine incluant 79 patients ayant l’AT, 11,4% de patients ont présenté un accident vasculaire cérébral ischémique aigu ; 6,3% un AIT et 1,3% une hémorragie intracrânienne symptomatique dont 3.9% avaient des anévrysmes intracrâniens, 3,9% des occlusions des gros vaisseaux, 7,6% une vascularite intracrânienne et 1,3% un syndrome de vasoconstriction cérébrale réversible (1).

Une série chinoise a trouvé que 10.9% des patients suivis pour AT ont présenté un accident vasculaire cérébral, des lésions sténo-occlusives de l’artère sous-clavière et l’artère carotide commune ont été fréquemment observées chez les patients avec AVC ischémique, tandis que les lésions sténo-occlusives de l’aorte descendante, de l’aorte abdominale et / ou des artères rénales étaient plus fréquemment observées chez ceux ayant présenté un AVC hémorragique. L’hypertension artérielle résistante était l’un des principaux facteurs de risque d’AVC hémorragique, la pression artérielle doit être maintenue au dessous de 140/90 mmHg. Chez les patients avec sténose carotidienne extra-crânienne symptomatique, un traitement antihypertenseur est indiqué pendant la poussée d’AT, des étourdissements ou même une syncope peuvent survenir après son instauration (20).

Aaron Ngamolane et al. ont décrit le cas d’une jeune patiente de 13 ans, diagnostiquée atteinte de l’AT après avoir présenté un important hématome lobaire, secondaire à un pic hypertensif (TA était élevée à 192/118 mmHg) (12), contrairement au cas de notre patiente, dont la pression artérielle n’a pas dépassé 140/90 mmHg, la survenue de l’hématome intra-parenchymateux serait liée probablement à l’atteinte des vaisseaux de petit calibre (retrouvée à l’artériographie), chose qui est inhabituelle dans l’AT. Une étude a objectivé une atteinte des petits vaisseaux sous forme de lésions oculaires ou de manifestations cutanées qui précèdent la maladie. Les cas décrits dans la littérature concernent essentiellement les vaisseaux rétiniens, les vascularites nécrosantes des petits vaisseaux cutanés et les myocardites (7).

La plupart des cas d’hémorragies sous-archnoidiennes dans l’AT ont été rapportés comme étant liés à une rupture anévrysmale cérébrale. Sur la base d’une revue de la littérature, le nombre total d’HSA dûes à une rupture anévrysmale intra-cérébrale était de 25 anévrysmes chez 16 patients (6). Quatre patients sur seize atteints d’HSA dûes à une rupture d’un anévrysme intracrânien avaient une maladie cérébro-vasculaire occlusive (10). Shigemori et al. ont souligné l’importance des troubles hémodynamiques sur le cercle du polygone de Willis produits par l’agénésie de l’artère carotide interne comme principal facteur causal de la formation d’anévrysmes (18). Masuzawa et coll. ont rapporté deux cas d’anévrysmes intra-cérébraux concordant avec l’artérite de Takayasu. Cependant, aucun signe d’artérite des vaisseaux intracrâniens ni de modification pathologique des artères intra-crâniennes adjacentes à l’anévrysme n’a été rapporté dans l’artérite de Takayasu. Une nécrose de la paroi vasculaire avec rupture et hémorragie peut également survenir, responsable rarement d’hématome intra-parenchymateux (10).

La relation entre le développement d’un anévrysme cérébral et l’artérite de Takayasu n’a pas encore été clairement définie. L’origne hémodynamique, la destruction immunitaire avec nécrose de la lame élastique des artères cérébrales et l’hypertension artérielle peuvent être la cause (9).

L’hémorragie sous-arachnoïdienne spontanée en l’absence d’anévrysme intra-crânien est une manifestation inhabituelle de l’AT, et il n’y a que trois cas rapportés décrivant cette association dans la littérature (5), comme le cas de notre patiente. L’hypothèse d’une augmentation de la perfusion cérébrale existe, la cause n’est pas claire, initialement présumée secondaire à une reperfusion après une ischémie cérébrale, une augmentation du flux sanguin due à une inflammation active ou une activité épileptique subclinique due à l’HSA. Pour évaluer cela, le spin artériel a été utilisé, une technique d’IRM qui marque magnétiquement le sang artériel entrant pour mesurer la perfusion cérébrale et ne nécessite pas l’utilisation de produit de contraste. Une telle hyperperfusion chronique et une perte d’autorégulation cérébro-vasculaire entraînent des lésions vasculaires pouvant expliquer l’hémorragie sous-arachnoïdienne. (5)

L’association d’une hémorragie sous arachnoïdienne à un hématome lobaire compliquant une maladie de Takayasu retrouvée chez notre patiente, n’a jamais été décrite dans la littérature.

Les traitements de l’AT comprennent généralement de l’aspirine à faible dose, des médicaments anti-inflammatoires (corticostéroïdes, fréquemment associés à des médicaments immunosuppresseurs). D’autres traitements médicaux alternatifs (tocilizumab, infliximab…) sont de plus en plus utilisés, en particulier dans les cas d’accidents vasculaires cérébraux. En raison de la rareté des accidents vasculaires cérébraux associés à l’AT, il est difficile de formuler des recommandations sur la prescription de ces produits dans cette entité (14).

Lors de l’instauration d’un traitement anti-hypertenseur, il faut s’assurer d’une bonne perfusion cérébrale, en particulier en cas d’atteinte des branches de l’arc aortique, en mesurant la pression artérielle des membres inférieurs (20).

Les procédures chirurgicales et endovasculaires se sont révélées prometteuses comme modalités de traitement des manifestations cérébro-vasculaires de l’AT, les corticostéroïdes en ont un rôle palliatif (19).

L’angioplastie percutanée et la chirurgie de revascularisation restent des options thérapeutiques sur des indications particulières, doivent être mûrement réfléchies et systématiquement discutées avec un centre expert de neuro-radiologie entraîné. La pression artérielle doit être soigneusement surveillée après revascularisation (20).

Les interventions chirurgicales sont recommandées lorsque la maladie est en rémission. La mise en place d’un stent peut également être utilisée, bien qu’une thrombose intra-stent puisse survenir, probablement due à une infammation accrue de la paroi artérielle.

L’artérite de Takayasu est une pathologie chronique qui évolue par poussées inflammatoires vasculaires, l’évolution est très variable. Malgré les traitements actuels, environ 50% des patients rechutent ou développent une complication vasculaire ou cérébro-vasculaire dans les 10 ans qui suivent le diagnostic de maladie de Takayasu. Les lésions vasculaires peuvent progresser de façon totalement silencieuse menant parfois à des manifestations cérébro-vasculaires importantes. Il est recommandé d’établir une surveillance par combinaison doppler trans-crânien et TEP-scanner pour dépister les manifestions cérébro-vasculaires de la maladie de Takayasu. Les anomalies retrouvées à l’imagerie fonctionnelle soutiennent les causes hémodynamiques responsables des symptômes cérébraux. Cela peut aider à quantifier les atteintes, à ajouter des critères pour les procédures de revascularisation chez certains de ces patients (19).

Les traitements actuels de la maladie de takayasu ont notablement amélioré la survie des patients. Le taux de mortalité globale varie de 2 à 35% à 5 ans. En l’absence de complications majeures, le taux de survie à 5 ans est > 95%. En cas de complications majeures (insuffisance cardiaque, infarctus cérébral, HTA sévère, anévrysme), il est de l’ordre de 50 à 70%. Les décès sont principalement d’origine cardio et neuro-vasculaire (accidents vasculaires cérébraux, insuffisance cardiaque) (11).

Une identification précoce des patients présentant des anomalies vasculaires susceptibles de causer des symptômes cérébro-vasculaires pourrait aider à prévenir ces décès.

CONCLUSION

Les publications évaluant isolément les atteintes cérébro-vasculaires dans la maladie de Takayasu manquent dans la littérature, les différentes études entreprises évaluent le risque cardio-vasculaire général, pourtant cette atteinte n’est pas très rare et mérite d’être étudiée à part.

L’hémorragie sous arachnoidienne non anévrysmale survient rarement chez les patients atteints d’artérite de Takayasu, mais ce cas souligne la rareté de survenue d’un hématome cérébral intra-parenchymateux concomittant probablement secondaire à l’atteinte des vaisseaux de petit calibre, cette dernière non décrite par la littérature, qui peut être silencieuse évoluant à bas bruit. L’association HSA non anévrysmale, hématome intra-parenchymateux suite à une atteinte des petits vaisseaux dans la maladie de Takayasu n’a jamais été décrite à notre connaissance. Elle a été d’évolution fatale chez notre patiente.

CONFLITS D’INTERETS 

Les auteurs ne déclarent aucun conflit d’intérêts.

CONTRIBUTIONS DES AUTEURS

Dr SARA DIOURI a réalisé une recherche bibliographique et a rédigé le manuscrit.

Pr NAIMA CHTAOU a participé à la prise en charge diagnostique et thérapeutique de la patiente et à l’encadrement et la correction du manuscrit.

Pr SIHAM BOUCHAL, Pr AOUATEF EL MIDAOUI et Pr ZOUHAYR SOUIRTI ont contribué à la prise en charge médicale de la patiente.

Pr MOHAMMED FAOUZI BELAHSEN a encadré la prise en charge diagnostique et thérapeutique de la patiente et a corrigé le manuscrit.

 

Figures:

 

Figure 1: TDM cérébrale initiale objectivant un AVCI sylvien profond gauche

 

Figure 2: TDM cérébrale de contrôle: Présence d’un hématome fronto-pariétal droit avec un œdème péri lésionnel. Hémorragie méningée para sagittale en regard de l’hématome

 

Figure 3: Images d’artériographie (A+B+C): Flèches rouges: Sténose des branches de la carotide interne droite, Flèche jaune : sténose de l’artère sous clavière droite

 

 

Figure 4: TDM cérébrale (A+B) objectivant un volumineux hématome fronto-pariétal droit avec inondation ventriculaire et engagement sous falcoriel

NEVRALGIES CERVICO BRACHIALES COMMUNES DANS LE SERVICE DE NEUROCHIRURGIE DE L’HOPITAL PRINCIPAL DE DAKAR : ASPECTS EPIDEMIOLOGIQUES, CLINIQUES ET THERAPEUTIQUES.

INTRODUCTION

La névralgie cervico-brachiale (NCB) se définit comme une douleur du membre supérieur dont l’origine est le rachis cervical. Cette douleur résulte de la souffrance d’une ou de plusieurs racines nerveuses constitutives du plexus brachial (racines C5 à T1), au niveau du rachis cervical. On distingue les NCB mécaniques et les NCB symptomatiques d’une affection tumorale ou infectieuse. Les NCB mécaniques se subdivisent en NCB dites communes par uncodiscarthrose et en NCB par hernie discale molle (16). Les NCB communes surviennent surtout après 40 ans et touchent en grande partie les hommes (7,10,13) Cette pathologie est relativement fréquente dans la pratique courante et son incidence annuelle, ajustée est estimée à 83 pour 100.000 personnes (6). Cependant, malgré sa fréquence, cette pathologie reste très peu rapportée dans la littérature. Ainsi en France, elle est nettement moins étudiée que la névralgie sciatique (5). La rareté des études sur la NCB en Afrique, en général et au Sénégal en particulier, a motivé la réalisation de cette étude. Le but de notre étude était donc d’étudier les aspects épidémiologiques, cliniques et thérapeutiques des NCB dans notre contexte.

MATERIELS ET METHODE

Il s’agissait d’une étude rétrospective de type descriptif d’une durée de 5 ans (1er Janvier 2012 au 31 Décembre 2016) portant sur les dossiers de patients ayants une NCB commune. Etaient inclus tous les patients qui présentaient une NCB de cause commune vus en consultation externe dans le service, ayant bénéficié au moins d’une radiographie standard et pris en charge dans notre service durant cette période. Les paramètres étudiés ont été appréciés sur la base de la symptomatologie douloureuse, tout en tenant compte de l’évolution et de la régression des signes cliniques. Ils étaient classés satisfaisants, moyens ou mauvais selon l’intensité de la douleur. La saisie et l’analyse des données ont été faites à l’aide des logiciels Word, Excel du pack Office 2016, et Epi info version 7.2.

RESULTATS

Pendant cette étude, 3190 patients étaient reçus en consultation externe dans le service dont 182 (5,70%) pour une NCB commune. La population masculine s’est avérée la plus touchée (116 hommes/66 femmes) avec un sex-ratio de 1,76. La figure 1 résume la répartition des patients selon les tranches d’âge. Les retraités étaient les plus touchés (44 cas) soit 24,18%. Plus de deux tiers des patients soit 122 (67,03%) n’avaient pas d’antécédent médical et 171 (93,96%) n’avaient pas d’antécédent chirurgical. La NCB gauche était la plus fréquente (77 cas) soit 42,31%. Le tableau I résume la répartition des patients selon le délai de prise en charge. La totalité des patients avaient une douleur et avaient tous bénéficié d’une radiographie cervicale, d’une IRM cervicale dans 29,67% des cas et d’un scanner cervical dans 18,13% des cas.

Le tableau II résume la répartition des patients selon la topographie de la racine atteinte. La cervicarthrose était la principale étiologie des NCB communes et impliquait 121 cas (66,48%) suivie de la hernie discale qui impliquait 49 cas (26,92%). L’absence de pathologie associée a été notée dans 130 cas (71,43%), les lomboradiculalgies étaient associées dans 43 cas (23,63%). La figure 2 résume la répartition des patients selon le type de traitement médical. La rééducation était pratiquée chez 48 patients (26, 37%). La chirurgie était réalisée chez 9 patients (4,94%) parmi lesquels six discectomies par voie antérieure avec des bons résultats postopératoires et trois laminectomies par voie postérieure avec deux bons résultats et une tétraplégie au 32ième jour post opératoire. Nos résultats après la prise en charge ont été jugés satisfaisants chez 107 (58,79%) patients, moyens chez 53 (29,12%) patients et mauvais chez 22 (12,09%) patients.

DISCUSSION

Cette étude a donc essayé de déterminer les aspects épidémiologiques, cliniques et thérapeutiques des NCB communes dans notre contexte. L´incidence observée (5,70%) concorde avec la moyenne retrouvée dans la littérature : 3,19% (1) ; 5% (14). L’amélioration des moyens diagnostics de cette NCB peut expliquer en partie son incidence considérable. Cependant il faut noter qu’elle reste une pathologie beaucoup moins fréquente que la sciatique (5). La moyenne d’âge de notre population d’étude (58,2 ans) est plus élevée que celle retrouvée dans la littérature (5,14). Cela s’explique par le fait que les retraités (sujets âgés) étaient les plus nombreux dans notre échantillon et par l’augmentation des lésions dégénératives avec l’âge. Nous avons noté une prédominance masculine (116 hommes/66 femmes) avec un sex-ratio de 1,75 qui n’est pas systématiquement retrouvée dans la littérature. Au Mali on note une prédominance féminine et en France pas de différence significative entre les deux sexes (5). Cette prédominance masculine dans notre étude peut être due à la nature des travaux (travail de force) qu’exercent les hommes et l’utilisation du segment cervical pour des efforts répétitifs. Les retraités étaient les plus nombreux dans notre étude contrairement à Maiga et al au Mali (12) qui avaient trouvé une plus grande proportion des ménagères. Cela s’expliquerait par le fait que la NCB est une maladie du sujet âgé et que la tranche d’âge la plus atteinte (60-69 ans) dans notre série est l’âge de la retraite au Sénégal. Dans notre série, 122 (67,03%) patients n’avaient pas d’antécédent médical et 171 (93,96%) n’avaient pas d’antécédent chirurgical. Ces données sont conformes à celles de Bouvier (5) qui affirme que la plupart du temps la NCB n’a pas de rapport avec l’antécédent du patient. La topographie de la névralgie prédominait à gauche, soit 77 cas (42,31%). Ce résultat confirme celui de Bentaleb (4) mais diffère de celui de Bouvier (5) qui note une répartition équivalente entre les deux cotés et la rareté des formes bilatérales soit 2,0%. Nos patients ont été le plus souvent consultés dans les trois mois suivant le début de leur symptomatologie, ce qui est relativement tôt comparé à 9 mois (17) et 10 mois (2). Cette différence pourrait s’expliquer par la fréquentation de plus en plus précoce des structures sanitaires par nos populations, notamment les fonctionnaires pour lesquels l’accès dans notre structure est encore plus facile. La douleur rachidienne cervicale, principal signe fonctionnel était présente chez tous les patients. Ce constat est largement retrouvé dans la littérature (1,6,9) et serait en rapport avec les lésions inflammatoires sous-jacentes. Les examens complémentaires ont été demandés en fonction de la clinique du patient. Ainsi, la totalité de nos patients a bénéficié d’une radiographie standard révélant une cervicarthrose dans 121 (66,48%) cas. Ce résultat est comparable à ceux de la littérature (3,5,6,9) qui rapporte chez 80% de ses patients une NCB de type disco-vertébrale dégénérative. Une IRM cervicale a été réalisée dans 29,67% des cas et un scanner cervical dans 18,13% des cas. Nous avons noté une souffrance radiculaire concernant essentiellement les racines C7 et C6. Des résultats similaires sont rapportés dans la littérature (5,11,15). Les causes de cette atteinte préférentielle de racines C7 et C6 ne sont pas bien connues. La NCB commune était isolée dans 130 (71,43%) cas. Cela s’expliquerait par le fait qu’en dehors de l’arthrose, (entrainant également des lomboradiculalgies : 43 (23,63%) cas dans notre série) la NCB n’est dépendante d’aucune autre pathologie. Le traitement médical reste de nos jours la pierre angulaire du traitement des NCB commune, ainsi notre approche a été d’associer un antalgique (90,66% des cas), un AINS (87,37% des cas), un antalgique + AINS (84,62% des cas), un complexe de vitamines B (0,02% des cas) et un myorelaxant (9,34% des cas). Nous n’avons pas utilisé des corticoïdes ou des infiltrations car la plupart de nos patients répondaient bien au traitement. Dans les cas d’échec du traitement médical, on a associé une rééducation fonctionnelle chez plus d’un quart des patients (26, 37%) ; et la chirurgie chez 9 (4,94%) patients, en réalisant donc chez 6 patients une discectomie par voie antérieure avec des bons résultats postopératoires, et chez 3 patients une laminectomie par voie postérieure avec deux bons résultats et une tétraplégie au 32ième jour post opératoire. Ces résultats s’accordent à la série de Dubuisson (8). La grande majorité de nos patients (58,79%) ont eu une évolution satisfaisante après prise en charge, (29,12%) avaient un résultat jugé moyen et (12,09%) avaient un mauvais résultat. Ces résultats sont similaires à ceux déjà publiés en Europe et en Afrique (5,6,12) et pourraient être liés au fait que les patients étaient pris en charge par différents praticiens. En pratique, devant un mauvais résultat après prise en charge adaptée des NCB, le clinicien doit évoquer l’hypothèse d’une NCB secondaire.

CONCLUSION

Le diagnostic de la NCB commune est clinique et survient généralement après 40 ans avec une prédominance masculine. Les cervicarthroses constituent les principales étiologies et  le traitement médical à base d’antalgiques, d’anti-inflammatoires, de complex de vitamines B, de myorelaxants est le plus utilisé dans notre contexte parfois associée à la rééducation et à la chirurgie. L’évolution de cette pathologie est liée à la précocité du diagnostic et l’adaptation de la prise en charge. La grande fréquence de la NCB commune ne doit pas faire méconnaître la possibilité des NCB symptomatiques révélatrices d’autres affections plus graves.

 

Figure 1 : Répartition des patients selon l’âge

 

Figure 2 : Répartition des patients selon le type de traitement médical

 

Tableau I : Répartition des patients selon le délai de prise en charge

Délai de prise en charge Phases Effectif %
≤ 3 mois Aigue 76 41,76
3 à 6 mois Subaiguë 15 8,24
≥ 6 mois Chronique 36 19,78
Indéterminé Indéterminé 55 30,22
TOTAL 182 100

 

Tableau II : Répartition des patients selon la topographie de la racine atteinte

Atteinte mono-radiculaire C4 C5 C6 C7 C8 TOTAL
6,04% 13,74% 27,47% 29,12% 3,84% 80,21%
Atteinte bi-radiculaire C4-C5-C6 C5-C6 C5-C6-C7 C5-C6-C7-C8 TOTAL
0,55% 3,30% 6,04% 9,90% 19,79%

 

IMPACT FAMILIAL ET PERCEPTION PARENTALE DE L’EPILEPSIE INFANTILE A DAKAR

INTRODUCTION

L’épilepsie est un dysfonctionnement cérébral caractérisé par une prédisposition chronique à la génération de crises épileptiques et par les conséquences neurobiologiques cognitives, psychologiques et sociales de cet état (9). Le nombre de personnes souffrant d’épilepsie dans le monde est estimé à 50 millions, dont les trois-quarts résident dans les pays en développement (6). Sa prévalence moyenne est d’environ 0,9% de la population mondiale (1). En Afrique sa prévalence varie de 3,43 à 49‰ (7). Au Sénégal, la prévalence varie de 8 à 14‰ (18).

L’épilepsie peut devenir un frein pour les développements intellectuel, psychologique et affectif, et avoir un impact sur la réussite scolaire et l’épanouissement général des enfants et des adolescents. Les crises d’épilepsie constituent un handicap souvent synonyme d’exclusion sociale. L’épilepsie a un retentissement direct sur la santé, l’activité professionnelle, la qualité et le niveau de vie des parents. A la fois victimes indirectes de la maladie et acteurs de son traitement, ils souhaitent pour eux-mêmes, et pour l’avenir de leur enfant, davantage d’informations sur la pathologie, son traitement et sur les chances réelles de rémission des crises (11).

Les familles d’enfants atteints d’épilepsie dans les pays en développement sont confrontées à l’accroissement du fardeau de la pauvreté, l’ignorance, les fausses croyances et pratiques socioculturelles qui posent des défis supplémentaires pour faire face à la maladie (4). L’épilepsie est une réelle préoccupation dans notre milieu, elle suscite encore crainte et rejet dans la population, constituant ainsi un réel problème de santé publique. Selon plusieurs auteurs l’épilepsie est plus mal perçue que diverses pathologies chroniques (cancer, diabète, asthme) (16) et les principales inquiétudes des parents sont la fréquence des crises, les effets secondaires et contraintes du traitement, les consultations chez le médecin et d’éventuelles hospitalisations, l’évolution de la maladie, l’avenir de leur enfant, l’autonomie (épilepsies sévères) et les lésions cérébrales que peuvent causer les crises (19). Les frères des patients épileptiques peuvent se sentir délaissés et moins aimés, quant aux patients eux-mêmes ils peuvent présenter plusieurs soucis dont : la scolarisation, l’adaptation sociale (amis, emploi, sports, conduite), et les effets secondaires du traitement (21).

Le but de ce travail était d’étudier l’impact familial et la perception parentale de l’épilepsie infantile au service de neurologie du Centre Hospitalier National et Universitaire de Dakar.

PATIENTS ET METHODES

Il s’agissait d’une étude transversale et descriptive ayant duré 12 mois, du 1er juillet 2012 au 30 juin 2013 au Service de Neurologie du Centre Hospitalier National et Universitaire de Dakar. Tous les parents d’enfants et adolescents (2-16 ans) vivant avec l’épilepsie venant consulter au service de neurologie du Centre Hospitalier et Universitaire National de Dakar. Etaient inclus, tout parent consentant, d’enfants suivis régulièrement pour épilepsie, âgés de 2 à 16 ans, l’enfant devait présenter une épilepsie active et le parent interrogé devait vivre avec le patient depuis au moins 12 mois. N’étaient pas inclus les parents ayant vécu des changements majeurs dans leur vie dans les 3 précédents mois sur les conditions sociales ou économiques de la famille (séparation, chômage des parents, etc.) ainsi que la présence de comorbidités importantes : pathologie progressive du système nerveux central, atteinte d’un autre système, la présence d’un retard mental (de ce fait, les encéphalopathies épileptiques étaient exclues). Nous ne nous intéressions qu’à l’épilepsie en elle même et tout autre facteur aggravant tel qu’une comorbidité, un retard mental, influencerait davantage la perception des parents sur la maladie et l’impact familial.

Nos patients étaient vus en consultation externe de neuropédiatrie et d’épileptologie ainsi que lors des rendez-vous pour réaliser un électroencéphalogramme (EEG). Tous nos patients étaient suivis pour une épilepsie dont le diagnostic avait été posé préalablement par le neuropédiatre. Une fois le consentement des parents obtenu, nous leur proposions un questionnaire. Pour tous nos patients, ce sont les mères qui étaient interrogées.

L’échelle utilisée pour mener l’étude était l’IPES (Impact of Pediatric Epilepsy Scale), une échelle à 11 items cotée sur 33 points destinée aux parents. Cette échelle évalue l’impact de l’épilepsie sur l’accomplissement scolaire, la participation aux activités (jeux, sport, etc.), la santé, les relations avec la famille, les amis et la fratrie, les activités sociales, l’estime de soi. L’IPES est un outil de mesure fidèle et rapide pour refléter l’impact de l’épilepsie d’un enfant sur sa vie et celle de sa famille elle peut être utilisée en 3 à 5 minutes (3). Hormis l’échelle de l’IPES, le questionnaire permettait également de connaitre les caractéristiques socio-démographiques du patient et des parents, les informations sur la maladie (durée d’évolution, fréquence des crises, type d’épilepsie, étiologie de l’épilepsie), des questions étaient également élaborées pour évaluer la perception de la maladie par les parents et l’impact sur leur vie socio-professionnelle. Les données ont été analysées dans le logiciel SPSS version 17.0. Les calculs des fréquences avec leur intervalle de confiance et des moyennes avec leur écart-type et leur intervalle de confiance ont été calculés à l’aide de ce logiciel.

RESULTATS

La moyenne d’âge des enfants était de 8,94 ans et l’écart type 4,3ans. Les patients de sexe masculin étaient 74 et ceux de sexe féminin 72, donnant un sex-ratio M/F de 1,02. Les parents mariés étaient les plus représentés (86,3%), le reste vivait dans une famille monoparentale. La majorité des pères de nos patients avaient un travail (87,2%), la majorité des mères étaient ménagères (53,4%) et la profession n’était pas connue pour 3,17% des pères. Seuls 8 patients avaient un frère ou une sœur atteinte d’épilepsie. La plupart des patients avaient une épilepsie évoluant depuis 3 ans (23,3%) en moyenne. Les crises d’épilepsie duraient depuis 3,16 ans en moyenne. Les parents consultaient pour la plupart (78%) en première intention dans les structures sanitaires modernes. Mais parmi eux, 62% avouent avoir consulté un tradipraticien parallèlement. Les épilepsies focales étaient légèrement plus fréquentes (51%). Pour la plupart des patients (69%) nous n’avons pas retrouvé d’étiologie. Selon les parents 50,5% des enfants faisaient au moins une crise par mois et pour 49,5% la survenue d’une crise était dans un intervalle supérieur à un mois.

Les céphalées étaient la symptomatologie la plus retrouvée chez les mères (32,9%), mais 47,9% d’entre elles estimaient que l’épilepsie de leur enfant n’a pas affecté leur état de santé [Figure 1]. Plusieurs mères (73%) de nos patients présentaient des troubles du sommeil (insomnies particulièrement) depuis que leur enfant faisait des crises et 52% des mères ayant un emploi estimaient que l’épilepsie de leur enfant a entrainé des bouleversements dans leur travail tels que : des baisses de performance, des absences répétées, et même des démissions [Figure 2].

Beaucoup de mères (60%) n’avaient plus eu d’enfant après le diagnostic d’épilepsie, et seules 14, soit 9,5% affirmaient que l’épilepsie de leur enfant en était la cause. Environ 2/3 des mères soit 40% estimaient qu’elles délaissent les autres enfants au profit de celui malade. Seules 7% des mères culpabilisaient vis à vis de l’épilepsie de leur enfant.

Pour la majorité des mères interrogées (67,6%), l’épilepsie n’a pas entrainé de conflits dans leur couple. Un grand nombre de parents (85%) estimaient que l’épilepsie de leur enfant affectait leurs finances, dont 49% pensaient qu’elles ont été très affectées. Environ la moitié des mères (48%) connaissaient l’épilepsie avant que le diagnostic n’ait été fait chez leur enfant. Une grande part des mères (73%) attribuaient l’épilepsie de leur enfant à la destinée (qui peut être perçue ici comme la fatalité) [Figure 3].

Dix-sept pour cent des mères estimaient que leur enfant n’était pas épanoui à cause de sa maladie. Seules 11% des mamans trouvaient que leur enfant atteint d’épilepsie avait une relation difficile (disputes, conflits, rixes) avec ses frères. Une minorité des mères (13%) estimaient que leur enfant était moins accepté par autrui (amis, entourage…). Une grande majorité des mères (86%) voulaient que leur enfant continue à fréquenter jusqu’au niveau baccalauréat, tandis que 14% préféraient qu’il opte pour un métier rapidement. Près de la moitié des mamans (49%) trouvaient que leur enfant avait des difficultés scolaires liées à l’épilepsie.

La moyenne du Score IPES était de 8, 97 avec les extrêmes allant de 2 à 22.

DISCUSSION

L’approche holistique dans la prise en charge de toute pathologie est la guérison définitive. Dans l’épilepsie infantile, le but du médecin traitant est la réduction voire l’arrêt définitif des crises. Cependant la participation et le rôle à jouer par les parents qui sont des acteurs majeurs de la prise en charge est à prendre en considération.

Notre moyenne d’âge était de 8,94 ans, dans des études similaires, telles qu’au Nigeria, où Lagunju et al. (13) retrouvaient une moyenne d’âge de 8 ans ; au Canada, Camfield et al. (3) avaient une moyenne d’âge de 10,2 ans, et Wirrel et al. (22) obtenaient 9,8 ans de moyenne d’âge. Ces résultats concordent avec les nôtres, et mettent en évidence cette tranche d’âge (8-10 ans) dans laquelle on retrouve les plus fréquentes des épilepsies de l’enfant (absences, épilepsies à pointes centro-temporales) (18). Le sexe masculin prédominait légèrement dans notre étude (50.5%). Au Nigeria, Lagunju et al. retrouvaient une égalité parfaite des sexes (13) ; pour Ferro et al. (8) au Canada, le sexe masculin était de 52% ; Camfield et al. (3) rapportaient 40% de sexe masculin, et Wood et al. (23) obtenaient 43% de sexe masculin. Larson et al. (14) aux USA retrouvaient 58% de sexe masculin. Ces résultats assez similaires ne permettent pas de conclure à une prédominance d’un quelconque sexe, mais montrent une répartition plus ou moins égale des épilepsies de l’enfant selon le sexe.

La fréquence des crises était relativement élevée dans différentes études, 30% d’enfants à plus d’une crise/mois au Nigeria (13). Dans notre étude 50% d’enfants ont plus d’une crise/mois, ceci était un facteur important pour apprécier l’impact sur la famille, car les études démontrent que l’impact familial est corrélé à la fréquence des crises (23).

Nos résultats rapportent 13% d’épilepsie d’origine structurelle (lésionnelle), nous avons suspecté une cause génétique dans 18% des cas compte tenu des antécédents familiaux d’épilepsie, et pour 69% des patients nous n’avons pas retrouvé de causes.

Selon l’ancienne classification, nous aurions 13% d’épilepsies symptomatiques, 18% d’épilepsies cryptogéniques et 69% d’épilepsies idiopathiques. Des résultats relativement similaires à ceux de Lagunju et al. (13) qui rapportent 12% d’épilepsies symptomatiques et 88% d’épilepsies idiopathiques. Ceci pose toujours le problème des moyens d’exploration de l’épilepsie dans nos milieux, en effet même si l’avènement de l’IRM est une révolution dans l’exploration de cette maladie, la mise à disposition de laboratoire de génétique serait très importante également.

Les parents d’enfants souffrant d’épilepsie, particulièrement les mères, présentent plus de troubles du sommeil que les parents d’enfants bien portants (14). Ces troubles sont corrélés à l’horaire des crises (nocturnes surtout) ainsi qu’à la fréquence. Nos résultats rapportent 73% de troubles du sommeil chez les mères, la cohorte de Larson et al. (14) dans une étude cas-témoins révèle que les parents d’enfants souffrant d’épilepsie ont plus de troubles du sommeil par rapport à la population générale, et que 63.8% dorment avec leur enfant, bien que dans cette étude 25% des enfants avaient des encéphalopathies épileptogènes.

La santé des parents est étroitement liée au sommeil (car celui-ci fait partie de la santé), et il faut dire que les troubles les plus étudiés dans ce domaine sont l’anxiété et la dépression des parents.

Cette dépression a un impact négatif sur la qualité de vie de l’enfant et son évolution (8). Nous avons retrouvé 33% de céphalées (probablement dominées par les céphalées de tension), 10% des parents disaient être stressés, 5% souffraient d’anxiété et 2% présentaient une dépression (l’anxiété et la dépression ayant été diagnostiquées par les psychiatres et les parents que nous rapportons étaient suivis dans ce service pour ces pathologies).

Des résultats relativement similaires à ceux retrouvés dans la littérature par Jakobsen et al (10). Ces résultats nous permettent de conclure qu’il faudrait approfondir notre étude avec des échelles d’anxiété/dépression et de stress pour mieux évaluer l’état des parents.

L’épilepsie a un impact direct sur la vie professionnelle des parents. Dans notre étude 52% des mères estimaient que leur travail était affecté dont 8% ont abandonné leur travail, et 17% estimaient être fréquemment absentes. Lagunju et al. (13) retrouvaient 15% des mères qui ont abandonné leur travail, Tanvinerdi et al avaient des résultats similaires en Turquie (20). Des résultats assez semblables aux nôtres qui mettent en évidence, l’impact de la maladie sur la vie professionnelle des parents.

La santé et la profession des parents étant affectées, et compte tenu du coût de la prise en charge de la maladie, l’impact sur les finances n’est qu’une suite logique.

Nous rapportons 85% des parents qui estimaient que l’épilepsie affecte leur vie économique (dont 49% estimaient être très affectés). Lagunju et al. (13) rapportaient 21% de parents très affectés financièrement. Si cet aspect peut être considéré comme subjectif, il faut noter que chaque pays a ses réalités mais que l’épilepsie peut avoir un énorme impact financier sur la famille. Le coût annuel moyen d’un enfant atteint d’épilepsie est de 1767 euros soit un peu plus de 1 150 000 F CFA selon certains auteurs (5).

La santé, le travail et l’économie étant affectés, sans évoquer d’autres aspects, cela pourrait constituer de réelles tensions dans les couples, 14% des mères estimaient que l’épilepsie de leur enfant a entrainé des tensions dans le couple, et 2 (1,36%) ont affirmé qu’un divorce en était secondaire. Des résultats assez similaires à ceux de Lagunju et al. (13) qui rapportaient 24,2% de tensions dans les couples mais nettement plus de divorces (7,6%).

Nous avons retrouvé 7% des mères qui culpabilisaient vis-à-vis de l’épilepsie de leur enfant, Lagunju et al. (13) rapportaient un taux légèrement supérieur à 13,6%. Ces résultats peuvent s’expliquer par le fait que dans leur étude, ils avaient retrouvé plus d’épilepsies sévères.

L’épilepsie est une maladie entrainant de nombreux préjugés sociaux, et certains patients souffrant d’épilepsie présentent une certaine irritabilité, voire des troubles comportementaux et émotionnels (2). Dans notre série, 13% des mamans estimaient que leur enfant n’est pas accepté par ses amis et différents membres de l’entourage. Lagunju et al. (13) rapportaient 12,6% de rapports houleux entre les enfants souffrant d’épilepsie et leurs camarades d’école. Ainsi, Moffat et al. (17) dans une étude sur la qualité de vie des enfants souffrant d’épilepsie, retrouvaient que 22,7% d’entre eux se sentent rejetés et non acceptés par leurs camarades et 13,6% estiment que leurs enseignants les lèsent dans les différentes activités.

La stigmatisation, le rejet par les semblables, peuvent être un facteur de non-épanouissement pour le jeune souffrant d’épilepsie. Seules 17% des mères dans notre étude estimaient que leur enfant n’est pas épanoui, Lagunju et al. (13) rapportaient que 34,7% d’enfants ne se sentent pas heureux, Moffat et al. (17) rapportaient que 27,2% des enfants ne sont pas épanouis. Ces résultats témoignent des difficultés sociales que les enfants vivant avec l’épilepsie rencontrent. L’épilepsie de l’enfant a un réel impact sur les performances scolaires et même académiques à venir (17). Ndiaye et al. (18) au Sénégal retrouvaient que les épilepsies idiopathiques de l’enfant sont associées à 34% de difficultés scolaires. Dans notre série, 49% des enfants présentaient des difficultés scolaires selon les mères.

Au Nigeria (13), ce taux est estimé à 47% ; en Angleterre, Moffat et al. (17) retrouvaient 45% d’enfants qui ont des difficultés scolaires. Bien que les difficultés scolaires soient de différents ordres : absence, renvoi, échec, ceci montre la nécessité d’un meilleur encadrement pour ces enfants, et la motivation de l’entourage pour un bon suivi et l’encouragement des enfants.

Malgré les difficultés scolaires, dans notre étude nous retrouvons 86% des parents qui voudraient que leur enfant ait une scolarité classique (niveau baccalauréat, puis université). Motiver les parents dans ces ambitions est le rôle du praticien. Bien qu’à l’âge adulte ils puissent présenter des séquelles cognitives, psychologiques et sociales, qui auront un impact négatif sur le mariage, la conduite automobile, l’emploi (12).

Concernant le score IPES, la moyenne retrouvée dans notre étude était de 8,97. Camfield et al. (3) dans leur étude retrouvaient une moyenne de 6,59 ; l’intérêt de répéter le score dans le suivi de l’épilepsie a été démontré par les auteurs, qui, 3 ans plus tard dans une étude similaire ont mis en évidence la diminution du score corrélée à la bonne évolution de l’épilepsie (2).

 

Conflit d’intérêt : Les auteurs de ce manuscrit ne déclarent aucun conflit d’intérêt.

 

Figure 1 : Impact d l’épilepsie sur la santé des mères

 

Figure 2 : Impact de l’épilepsie sur la vie professionnelle des parents

 

Figure 3 : Croyances des parents vis-à-vis de l’épilepsie.

  • Articles récents

  • Commentaires récents

  • Archives

  • Catégories

  • Méta


  • © 2002-2018 African Journal of Neurological Sciences.
    All rights reserved. Terms of use.
    Tous droits réservés. Termes d'Utilisation.
    ISSN: 1992-2647